À Paris, il pleut. De cette pluie fine et continue qui mouille et transperce petit à petit les vêtements. Dehors, c’est la grève aussi. Des métros aux dépôts, à l’arrêt. D’autres pleins à craquer de passagers. Des lignes fermées. Des scènes de panique dans les gares. Des bousculades. Des centaines de kilomètres d’embouteillage sur les routes. Les écoles en service minimum. Les activités des enfants annulées. La cantine suspendue. Depuis le jeudi 5 novembre, la France tourne au ralenti. Ce jour-là, près de 800 000 personnes sont descendues dans la rue pour dire non au projet de réforme des retraites du gouvernement. Ce qu’ils redoutent, c’est la précarisation, des pensions de retraites dégradées. La casse du système social.
Le président Macron doit annoncer aujourd’hui le contenu de sa réforme. En attendant, le voici sans doute bien embêté par l’« oubli » de son haut-commissaire aux Retraites. Celui-ci a omis de déclarer ses liens avec le monde de l’assurance dans sa déclaration d’intérêts publiée samedi. Une « erreur », reconnaît l’intéressé. Un tollé pour les autres, qui maintiennent la pression sur l’exécutif.
Il pleut et il grêle à Beyrouth. C’est la saison. Et comme chaque année, les routes se transforment en torrents, provoquant d’énormes embouteillages. Je me rappelle avoir mis plus de 7 heures pour faire Nabatiyé-Beyrouth, un jour de décembre, il y a quelques années, bloquée pendant des heures dans le tunnel menant à l’aéroport, asphyxiée par les gaz des pots d’échappement. Cela va-t-il changer un jour ? « J’assume la responsabilité de ce qu’il se passe », a toutefois annoncé le ministre sortant des Travaux publics et des Transports.
Et puis finalement, on choisit d’en rire, à défaut d’en pleurer. Car ce qui fait de la peine, ce sont la détresse et les appels à l’aide de ceux qui n’ont plus rien au Liban. Plus de quoi se vêtir. Plus de quoi se nourrir. Plus de quoi se soigner. Plus de quoi éduquer leurs enfants. Endettés jusqu’au cou. Un tiers des Libanais vivent sous le seuil de pauvreté. Plus de 30 % des jeunes sont au chômage. À Paris, elles ne sont pas rares à n’avoir pu refouler leurs larmes face à ces situations désespérées. « Ici, les écoles sont gratuites, les soins aussi. Il y a des aides sociales, au logement, des revenus de solidarité. Au Liban, il n’y a rien. Aucun filet social, me dit l’une d’elles, venue donner des vêtements chauds et des médicaments. Alors, c’est à nous d’essayer d’aider les plus démunis. C’est le minimum qu’on puisse faire. »
Heureusement qu’il reste la solidarité, magnifique, des Libanais. Cette générosité, ce sens de l’entraide, qui tente, tant bien que mal, de combler les manquements d’un État défaillant.
*Ce carnet de bord d’un départ est le récit, partagé une fois par semaine, des aventures, des émotions et de la nostalgie d’une Française qui a passé 10 ans au Liban, avant de repartir pour la France avec son époux libanais et ses enfants.
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