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À La Une - reportage

Des milliers de fidèles à Bkerké : "Le patriarche Sfeir était notre père à tous"

Parmi les Libanais venus dire adieu au patriarche émérite, une très grande délégation druze de la Montagne du Chouf et de la Békaa-Ouest.

A l'entree de Bkerké, une file de Libanais venus assister aux obsèques du patriarche émérite Nasrallah Sfeir. Photo Michel Sayegh

Des Libanais de toutes confessions ont afflué par milliers jeudi vers Bkerké, pour accompagner dans son dernier voyage le cardinal Nasrallah Sfeir, "patriarche de tout le Liban", lors d'obsèques officielles tenues à 17h.

Dans un parking situé à proximité du stade Fouad Chehab, à Jounieh, des bus ont fait durant la journée la navette vers le siège patriarcal, selon notre correspondante sur place Zeina Antonios.

"Le patriarche Sfeir était notre père à tous, c'était le patriarche de la deuxième Indépendance. La moindre des choses est que nous l'accompagnions dans son dernier voyage", affirme Saïd Tarabay, la cinquantaine, originaire du village de Tannourine.

Mgr Sfeir "représentait tout le Liban, pas seulement les chrétiens du Liban", déclare de son côté Chadi, 32 ans, venu de Dbayé, dans le nord de Beyrouth. "Espérons qu'il fasse un miracle un jour pour que la situation du pays s'améliore". Nadine, également venue de Dbayé, se souvient que Mgr Sfeir "avait toujours défendu les victimes de l'injustice, les opprimés et ceux qu'on emprisonnait" (sous la tutelle syrienne après la fin de la guerre civile en 1990). 

Mgr Sfeir, qui aurait eu 99 ans mercredi, avait été élu en 1986 chef de l'Eglise maronite, la plus grosse communauté chrétienne du Liban, alors déchiré par la guerre civile. "Patriarche d'Antioche et de tout l'Orient", il avait été nommé cardinal de l'Eglise catholique en 1994 par le pape Jean-Paul II. Il avait présenté sa démission au Vatican en 2011 à l'âge de 90 ans. Il était connu pour son opposition farouche à la présence syrienne au Liban, de la fin de la guerre civile jusqu'en 2005 et pour son engagement en faveur de la réconciliation entre druzes et chrétiens.



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"A bras ouverts"
Sur le parvis où ont eu lieu les obsèques, les préparations battaient leur plein depuis 13h30, heure à laquelle ont été fermées les portes de la chapelle où reposait, depuis mercredi, la dépouille du dignitaire. Plus de 8.000 chaises ont été installées afin de recevoir les Libanais, laïcs et religieux, venus des quatre coins du pays pour assister à la cérémonie. Des casquettes blanches à l'effigie du patriarche émérite ont été disposées sur les chaises afin de protéger la foule du soleil.

Parmi les Libanais venus dire adieu au patriarche émérite, une très grande délégation druze de la Montagne du Chouf et de la Békaa-Ouest. "Nous sommes là pour rendre hommage au patriarche de la réconciliation. Il n'était pas le patriarche des maronites seulement, il était le patriarche de tout le Liban", confie à notre correspondante sur place Patricia Khoder l'une des femmes, sortant le foulard bland du deuil en descendant du bus.

Une mère de famille sunnite vivant à Aïn Anoub, un village du caza d'Aley, est, elle, venue avec toute sa famille. "C’était un homme qui a beaucoup donné pour le Liban, surtout sur le plan de la paix et de la souveraineté", affirme-t-elle.


Aux premiers rangs, devant les milliers de chaises disposées pour accueillir la foule, ont pris place le chef de l'Etat, Michel Aoun, le Premier ministre, Saad Hariri, et le chef du Parlement, Nabih Berry, entourés de grand nombre de personnalités politiques libanaises, des délégations officielles étrangères dépêchées pour les funérailles, notamment une délégation française présidée par le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, une qatarie menée par le ministre d’État Hamad ben Abdel Aziz Kawari, ansi qe des représentants saoudiens et jordaniens.


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Enterré dans un cercueil plus "modeste"
Après la cérémonie, le patriarche émérite a été enterré dans le cimetière patriarcal. Il reposait dans un cercueil différent de celui réalisé par le sculpteur libanais Rudy Rahmé et dans lequel sa dépouille avait été présentée mercredi au public. "Le cercueil du patriarche Sfeir (...) sera remplacé par un autre plus simple et plus léger, de sorte à correspondre à la vie modeste qu'a menée le patriarche", avait expliqué dans la journée Walid Ghayyad, le responsable de la communication du siège patriarcal maronite de Bkerké.

Le cercueil réalisé par M. Rahmé à partir de bois d'olivier de la vallée de Qannoubine et de roche de Bkerké, sur lequel figure une sculpture à l'image du visage du patriarche et pesant 220 kg, sera exposé à Reyfoun, le village natal du patriarche Sfeir, au siège de l'association qui porte son nom.



(Lire aussi : Sfeir-Khaled, même combat : l’unité nationale pour la souveraineté)



"Le roc sur lequel nous pouvions nous appuyer"
Parmi les premiers responsables arrivés à Bkerké pour assister aux obsèques, le député druze Teymour Joumblatt, à la tête d'une délégation de la Montagne, a salué la "personnalité exceptionnelle" qu'était le patriarche Sfeir, "représentant du Liban de la réconciliation". Le député de Zghorta Michel Moawad a quant à lui affirmé que "tous les partisans de l'ancien président René Moawad, jeunes et moins jeunes sont venus rendre un dernier hommage au père de l'Indépendance". "Le patriarche nous a toujours soutenus, notamment dans le projet du président Moawad. Le patriarche Sfeir était le roc sur lequel nous pouvions nous appuyer", a-t-il ajouté. 

L'ambassadeur d'Arabie saoudite à Beyrouth, Walid Boukhari, a de son côté affirmé, à son arrivée à Bkerké, qu'il était "incontestable que le patriarche Sfeir était le père de la paix et du vivre-ensemble au Liban". Il a souligné avoir été "mandaté par le pouvoir saoudien" pour participer aux obsèques.
Sleimane Frangié, leader maronite du mouvement des Marada et député de Zghorta a, quant à lui, souligné que sa relation avec le patriarche Sfeir avait toujours été marquée par "le respect mutuel". 

Dans la matinée, le préfet de la Congrégation pontificale pour les Eglises orientales, le cardinal Leonardo Sandri, représentant le pape François, avait, lui, rendu hommage lors d'une messe à un homme "qui a servi l'Eglise pendant des années sans se départir de loyauté ni de son sourire". "Il a visité tous les endroits où vivent des maronites, au Liban et ailleurs", a affirmé le cardinal Sandri, soulignant que le patriarche Sfeir a "offert tout ce qu'il pouvait à son pays blessé par la guerre et la haine".  Et de conclure : "Il ne voulait pas seulement garantir la paix et la réconciliation qu'aux chrétiens libanais mais également aux musulmans du Liban-message".



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