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Liban - Micro-trottoir À Basta et Tarik Jdidé

« Musulmans et chrétiens admiraient le patriarche Sfeir, c’était un vrai patriote »


« C’était le patriarche de tous les Arabes ! » lance un octogénaire beyrouthin à la lecture de son journal. Photo Z.A.

Au détour d’une rue à Basta, un homme d’un certain âge lit tranquillement son journal sur le trottoir. En une, la photo du patriarche Nasrallah Sfeir. Comme beaucoup de Beyrouthins, cet octogénaire regrette la disparition du prélat. Décédé dimanche dernier à l’aube, Mgr Sfeir a marqué les esprits de nombreux Libanais, grâce à ses prises de position politiques qui ont dessiné les contours du Liban d’aujourd’hui.

Âgé de 84 ans, ce Beyrouthin a connu toutes les étapes de la vie politique du cardinal Sfeir. « C’était le patriarche de tous les Arabes ! » lance-t-il, réagissant à la une de son journal, qui qualifie Nasrallah Sfeir de « patriarche de tous les Libanais ». « Il s’est démarqué par sa droiture. Et le plus important, c’est qu’il n’avait pas du tout d’attitude confessionnelle. C’était un personnage modéré. Malheureusement, il ne reste plus personne de sa stature au Liban », regrette-t-il.

Son ami Sleimane, 69 ans, se dit « très triste » de la mort du patriarche. « Le moment qui m’a le plus marqué dans son parcours, c’est lorsque les partisans du général Michel Aoun l’ont forcé en 1989 à embrasser une photo de M. Aoun. Ça m’a fait mal au cœur », souligne-t-il, en référence aux fameux incidents de Bkerké, vers la fin de la guerre civile, durant lesquels le patriarche avait été violenté par quelques aounistes. « Paix à son âme. Il était humble et humain. Je l’aimais beaucoup. Musulmans et chrétiens l’admiraient. Il était contre la Syrie, c’était un vrai patriote. C’était un pilier du pays », ajoute Sleimane.

Mohammad, 66 ans, pense également que Mgr Sfeir « faisait l’équilibre entre musulmans et chrétiens, il ne faisait pas de différence entre les uns et les autres. Ce qui lui importait, c’était le bien du pays ».


(Lire aussi : Le Chouf pleure le « patriarche de la réconciliation »)



Sfeir, un « patriote »
Un peu plus loin, dans le quartier populaire de Tarik Jdidé, quelques hommes assis devant un magasin passent en revue la politique du pays. Parmi eux Ahmad, 40 ans, qui regrette la perte de « ce grand symbole national » qu’était le patriarche. « Si vous regardez l’émotion sur les réseaux sociaux, on a l’impression que le patriarche Sfeir était sunnite ou qu’il était issu de Tarik Jdidé, tellement les gens l’admirent et pleurent sa mort. C’était un patriote qui se souciait des intérêts du pays. Il ne faisait pas de distinction entre une confession et une autre. Avec son décès, on a perdu quelque chose qu’on ne pourra pas retrouver, comme à la mort de Rafic Hariri », estime Ahmad. La seule personne qui pourrait, selon lui, prétendre égaler Mgr Sfeir aujourd’hui serait le Premier ministre, Saad Hariri. « Cheikh Saad est un cas exceptionnel. Il a fait et continue de faire des concessions pour le Liban, parfois même aux dépens des membres de sa propre communauté, à la différence d’autres chefs politiques qui ne travaillent que pour les confessions auxquelles ils appartiennent », lance-t-il.


(Lire aussi : La disparition du patriarche Sfeir « une perte pour tout l’Orient arabe », affirme au nom de ses pairs l’ambassadeur du Koweït)


Un de ses amis, un coiffeur de 55 ans, se rappelle surtout avec émotion de la réconciliation de la Montagne, en août 2001. Ce jour-là, le patriarche Sfeir avait parrainé aux côtés du chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, la réconciliation entre les chrétiens et les druzes dans la région du Chouf. « La réconciliation de la Montagne, c’est grâce à lui. La Montagne appartient à tout le Liban, s’il lui arrive malheur, c’est tout le Liban qui ira mal. De plus, Nasrallah Sfeir est le seul qui a travaillé sans relâche sur le dossier des Libanais détenus en Syrie. Des gens de toutes les confessions allaient le voir les dimanches à Bkerké pour demander son intercession en faveur de certains de ces prisonniers », se souvient-il.

Rabih, 42 ans, se rappelle quant à lui du 14 mars 1989, lorsque 5 000 obus sont tombés sur Beyrouth-Ouest avec le déclenchement de la guerre de libération. « J’étais adolescent à l’époque. Le patriarche Sfeir a été l’un des seuls à condamner cet incident. Je l’admire pour cela », confie-t-il.


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