Comment décrypter ce qui se passe en ce moment au Liban, sur le plan politique comme sur d’autres plans ? La rencontre hier, à Hadeth, entre députés du CPL, du mouvement Amal et du Hezbollah est-elle une grotesque comédie des acteurs d’un drame qui a été évité in extremis, ou une sincère repentance des incitateurs de la parade motorisée et armée du mouvement Amal, qui a failli dresser les uns contre les autres chrétiens et chiites ?
Il est impossible de répondre aussi vite à ces questions cruciales, et il faudra attendre les prochains jours pour en avoir le cœur net. L’entente entre le CPL et le Hezbollah, dont le douzième anniversaire sera commémoré mardi 6 février, donnera le ton de la prochaine étape. Le chef de l’État, pour sa part, s’est montré rassurant hier, devant ses visiteurs. « La leçon des événements a été tirée », a-t-il affirmé.
(Lire aussi : Les dignités personnelles sont sauves, mais l’État laisse des plumes !, le décryptage de Scarlett Haddad)
D’ores et déjà, cependant, il apparaît clairement que le mouvement Amal a commis une énorme erreur d’appréciation, et que le Hezbollah, en ne réagissant pas assez rapidement aux provocations de son allié, a failli lui-même être emporté par le mouvement. Des coups de téléphone urgents de Hassan Nasrallah à Baabda et Aïn el-Tiné ont sauvé Hadeth d’un bain de sang, dit-on.
Peu crédibles, à cet égard, restent les accusations lancées hier par le député d’Amal, Ali Bazzi, contre Israël, accusé d’avoir fomenté les provocations de mercredi. La ficelle est trop grosse et l’opinion n’est pas dupe. De ce fait, entre le Hezbollah et son allié, une rencontre de franche explication reste à prévoir. Par ailleurs, des mesures devront être prises pour rebâtir la confiance entre le CPL et le Hezbollah, que des observateurs disent en net recul.
(Lire aussi : Le crépuscule des magiciens, l'édito de Issa Goraieb)
La Saint-Maron
D’autres rendez-vous donneront également le ton de l’étape à venir, et d’abord, la réunion prévue mardi entre le chef de l’État et le président de la Chambre, que l’urgence du moment a enfin persuadé de la nécessité de se parler de vive voix, plutôt que de dialoguer indirectement par l’intermédiaire de propos rapportés. Les deux hommes s’entendront-ils sur le décret d’avancement de la promotion d’officiers de l’armée de 1994 ? Car c’est bien elle qui a envenimé le climat politique au cours des dernières semaines, et a indirectement conduit à la diatribe exaspérée de Gebran Bassil contre le président de la Chambre.
Deux autres rendez-vous significatifs sont à prévoir : le Conseil des ministres du jeudi et la fête de saint Maron vendredi. Les séquelles du séisme de mercredi seront-elles dissipées d’ici là ? Le Conseil des ministres examinera-t-il son ordre du jour comme d’habitude ? Nabih Berry assistera-t-il, comme prévu, à l’office religieux traditionnel que célèbre, à la Saint-Maron, l’archevêque de Beyrouth ? Autant de points de passage obligé d’un apaisement politique rendu d’autant plus urgent que la convoitise israélienne sonne aux portes, avec la contestation par Tel-Aviv de la frontière méridionale de la zone économique exclusive du Liban. Un point dont devra discuter le conseil de défense qui se tient au début de la semaine prochaine.
Une chose est sûre. Qu’il soit conscient que son impertinence publique était une erreur ou non, le ministre des Affaires étrangères était toujours aussi combatif, hier, dans son adresse au congrès de la LDE, même s’il ne s’est pas rendu à Abidjan. « Que personne ne tente de faire prévaloir une nouvelle domination unilatérale ! » a-t-il lancé hier à qui de droit, dans une envolée qui, comme tout ce qui se dit en ce moment, sent aussi très fort les prochaines législatives.
Lire aussi
Coup de théâtre à la LDE : Bassil s’adresse aux participants à Abidjan par écrans interposés
Infantiliser pour mieux manipuler
« Si nous, chrétiens, ne nous défendons pas, nous n’existerons plus »
Après le coup de fil « magique » de Aoun à Berry, une détente en vue
Le congrès LDE à Abidjan devrait bénéficier de la détente interne
Têtes de cultes, le billet de Gaby NASR
Dérapages incontrôlés, le billet d'Anne-Marie EL-HAGE
L’Oscar du gâchis, l'édito de Issa GORAIEB
Des libanaiseries en définitive. C'est pas nouveau , c'est prévisible et le rideau est tombé. Suite au prochain numéro , en attendant le raz de marée législatif de Mai 2018.
20 h 38, le 03 février 2018