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Liban - Exécutif

En Conseil des ministres, le feu sous la cendre des compromis...

Le ministre de l'Information s'est félicité hier de l'approbation d'un projet de réforme structurelle du syndicat des journalistes.

Le Conseil des ministres, réuni hier sous la présidence du chef de l’État au palais de Baabda. Photo Nasser Trabulsi

Réuni hier à Baabda sous la présidence du chef de l'État, Michel Aoun, le Conseil des ministres a réussi une nouvelle fois à résorber les litiges latents et à maintenir une cohésion minimale, jusqu'à nouvel ordre.

Sur la question d'une relance d'un dialogue direct avec le régime de Damas, qui avait été suggéré par le Hezbollah et les partis pro-Assad comme passage obligé au retour des déplacés, chacun s'est contenté de donner son avis en dehors de l'ordre du jour, sans plus. Une volonté générale d'éviter le clash était sous-entendue. Le Premier ministre, Saad Hariri, a d'emblée donné le ton : cette question fait partie des questions conflictuelles sur lesquelles il n'est pas possible de s'entendre, et qui sont donc à écarter du débat, a-t-il dit. Ce n'est qu'accessoirement qu'il a ensuite formulé son avis sur la question, en appelant au retour des déplacés sans passer par le dialogue avec Bachar el-Assad.

 

Fneich : Le dialogue avec le régime ne va pas le renflouer
Le ministre Mohammad Fneich (Hezbollah), dont le parti avait relancé le débat sur la question par la voix de son secrétaire général adjoint, le cheikh Naïm Kassem, a réitéré, mais en le rassérénant, le souhait d'un dialogue avec Damas. « Ni le dialogue avec le régime syrien ne va renflouer ce dernier, ni le boycottage de ce régime ne va le faire chuter », aurait-il relevé, apprend-on de sources ministérielles. Il répondait ainsi au ministre Pierre Bou Assi (Forces libanaises), qui jugeait tout aussi « inutile » le dialogue avec le régime syrien dans la garantie d'un retour des déplacés. M. Bou Assi s'est appuyé sur l'exemple de l'Irak, « dont les bonnes relations avec Damas n'ont pas suffi à ramener chez eux les centaines de milliers de déplacés syriens présents sur le territoire irakien ». S'appuyant sur la politique de distanciation, il a estimé que le retour des déplacés est à régler entre l'État syrien et ses ressortissants.

 

(Lire aussi : Machnouk persiste et signe : Des ingérences politiques ont eu lieu)

 

Aoun associe les déplacés au terrorisme
Ce contre-argumentaire plutôt réaliste face au Hezbollah pourrait préluder à un compromis qui prendrait forme lors du prochain Conseil des ministres. De source bien informée, une feuille de route pour le retour des déplacés serait en cours d'élaboration, prévoyant de recourir aux canaux onusiens. La feuille de route doit être soumise au président de la République et au Premier ministre avant son examen par le cabinet, selon la même source.

Pourtant, le feu a semblé couver sous la cendre hier. À l'ouverture du Conseil des ministres, Michel Aoun avait fait le lien entre les troubles sécuritaires et les déplacés, en évoquant « l'augmentation de 20 % des incidents sécuritaires avec la participation de certains déplacés syriens, en dépit des mesures prises par les services de sécurité concernés ». Dans le prolongement du récent discours du chef de la diplomatie, Gebran Bassil, diabolisant les déplacés, le président Aoun a mis en garde contre le risque de voir « les camps de déplacés se transformer en environnements favorables au terrorisme ». Une remarque que les ministres contactés par L'OLJ se sont abstenus de commenter...

 

Pharaon répond à « la menace » de Kanso
C'est l'intervention « véhémente » du ministre Ali Kanso (Parti syrien national social), sous l'œil bienveillant des ministres du Hezbollah, qui a sonné presque comme « une menace » aux oreilles de certains. Ce qui lui a valu une réponse immédiate du ministre Michel Pharaon. À L'OLJ, M. Pharaon évoque « la tirade de M. Kanso pour un dialogue avec le régime syrien » et le segment qui l'a fait « sursauter », lorsque ce dernier a posé ce dialogue comme condition sine qua au retour des déplacés. « Sans dialogue, pas de retour », aurait-il dit, amenant le ministre d'État à la Planification à l'interrompre en jugeant « inadmissible et indécent pour un ministre de faire fi gratuitement des sacrifices du Liban en tant que pays d'accueil, alors qu'une solution se présente de recourir aux canaux diplomatiques onusiens pour lui ôter une partie de ce fardeau ». « Au mieux, les propos de M. Kanso sont de la provocation, au pire, il s'agit d'une menace ... », aurait renchéri M. Pharaon. C'est là que M. Fneich serait intervenu en faveur du ministre prosyrien, appelant à le « laisser finir ce qu'il a à dire »...

Dans le sillage de ce même conflit entre deux visions stratégiques antinomiques relatives au positionnement du Liban dans la région, un ministre évoque à L'OLJ « la frilosité » presque générale qui s'est faite sentir lorsqu'un ministre FL a pris l'initiative de critiquer nommément le dernier discours du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, et ses diatribes contre l'Arabie saoudite... « Comme si nous étions sous le règne de la terreur », mais une « terreur douce, pernicieuse », commente de son côté une source proche du camp souverainiste.

 

(Lire aussi : La vendetta au Liban, ou lorsque les morts tuent...)

 

Bassil veut court-circuiter le mécanisme des nominations
Les ministres du Hezbollah auront aussi leur mot décisif sur le point relatif au mécanisme des nominations, soulevé en dehors de l'ordre du jour. À la suite de l'appel du président de la République à « poursuivre les nominations administratives, judiciaires et diplomatiques », le ministre Gebran Bassil, relayé par le Premier ministre, a proposé une alternative au mécanisme de nominations. Ce mécanisme basé sur le principe de présélection par un jury, en vigueur depuis quelques années, est considéré comme une réforme substantielle. M. Bassil aurait toutefois suggéré, au regard de la durée de vie relativement courte du cabinet, de donner à chaque ministre la possibilité, s'il le souhaite, de renoncer à ce mécanisme en soumettant directement le nom d'un candidat à l'approbation du Conseil des ministres. Ce à quoi les ministres du Hezbollah et d'autres, comme les FL, se seraient opposés, reportant ainsi le débat sur la question.

 

Électricité : un rapiéçage imprécis
Par ailleurs, il semble que la polémique autour du dossier de location de deux navires-centrales soit elle aussi mise en veilleuse. L'absence du ministre de l'Énergie, César Abi Khalil, à la réunion d'hier, pour cause de voyage, a semblé fournir un prétexte suffisant pour ne pas évoquer ce dossier, d'ailleurs non prévu à l'ordre du jour. Pour rappel, le gouvernement réuni le 21 juin dernier avait décidé de transférer à la direction des adjudications le dossier par souci de transparence. Le hic toutefois, révélé lundi dernier par le président des FL, Samir Geagea, est que la décision du gouvernement a été communiquée à la direction des adjudications dans une formulation différente de celle convenue en Conseil des ministres : la première avait prévu de lui soumettre l'ensemble du dossier, de l'élaboration du cahier des charges jusqu'à l'ouverture des plis, alors que la seconde restreint le travail de la direction à la supervision de l'ouverture des plis. Des questions avaient alors été soulevées sur l'origine de cette erreur et la possibilité que le ministre de l'Énergie ait déféré la décision à la direction des adjudications en outrepassant le secrétariat général du Grand Sérail. L'ambiguïté aurait été levée hier en catimini à l'issue d'un « accord » précédant le Conseil des ministres : le document a bel et bien été rectifié, et l'erreur « technique » a été imputée au secrétaire général du Conseil des ministres, Fouad Fleifel... Une version que les ministres FL ne démentent pas.

 

(Lire aussi : Le dossier des déplacés syriens, inopportun en période de campagne électorale !, le décryptage de Scarlett Haddad)

 

 

Riachi à « L'OLJ » : Une victoire pour les journalistes
Du reste, deux décisions concrètes, prévues à l'ordre du jour, auraient résulté de la réunion d'hier.
La première est l'approbation du projet de loi, cher au ministre de l'Information, Melhem Riachi, visant à amender le statut du syndicat des journalistes. Il est prévu notamment de :
– Revoir les conditions d'adhésion au syndicat, de manière à y inclure non seulement les journalistes de la presse écrite, mais aussi les journalistes des médias audiovisuels, électroniques, ainsi que les attachés de presse auprès des ambassades et autres.
– Garantir l'immunité judiciaire aux journalistes inscrits au syndicat.
– Imposer aux sociétés médiatiques un salaire minimum d'embauche d'un journaliste.
– Créer « une mutuelle professionnelle et de santé », qui doit servir entre autres à assurer un salaire temporaire à tout journaliste se trouvant dans une phase intermédiaire entre deux emplois.
– Créer un fonds de retraite, devant assurer un salaire mensuel aux journalistes âgés de plus de 75 ans, même s'ils continuent d'exercer leur métier.
L'approbation de ce projet hier en Conseil des ministres n'a pas été aisée, semble-t-il. Mais, à L'OLJ, M. Riachi dit espérer que « cette première victoire » pour les journalistes aboutisse à un vote au Parlement.
Par ailleurs, le ministre de l'Intérieur, Nouhad Machnouk, a annoncé la tenue des partielles pour pourvoir aux trois sièges parlementaires vacants au Kesrouan et à Tripoli, dont les modalités seront annoncées la semaine prochaine.

 

Sarraf invoque « un litige à la tête de l'Église orthodoxe »
En outre, le projet visant à créer de nouvelles branches à des universités existantes, remis sur le tapis par le ministre de l'Éducation, Marwan Hamadé, a lui aussi été approuvé hier. En revanche, le projet visant à créer une nouvelle université chapeautée par l'évêché orthodoxe de Beyrouth n'a pas été retenu pour l'instant. Le ministre Yaacoub Sarraf serait en effet intervenu pour rapporter « un litige entre le patriarche orthodoxe, Mgr Youhanna Yazigi, et le métropolite de Beyrouth, Mgr Élias Audi », ce litige rendant inopportun à ses yeux l'approbation du projet. Des réserves jugées « saugrenues » par d'autres ministres, s'étonnant de l'incorporation de prétendus litiges internes à l'Église, qui ne concernent pas le gouvernement.

 

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Réuni hier à Baabda sous la présidence du chef de l'État, Michel Aoun, le Conseil des ministres a réussi une nouvelle fois à résorber les litiges latents et à maintenir une cohésion minimale, jusqu'à nouvel ordre.
Sur la question d'une relance d'un dialogue direct avec le régime de Damas, qui avait été suggéré par le Hezbollah et les partis pro-Assad comme passage obligé au...

commentaires (4)

Bien entendu, c'est mieux de balayer la salete sous le tapis au lieu d'affronter les problemes.....Comme cela tout le monde va croire que tout va bien dans ce gouvernement....

IMB a SPO

16 h 24, le 06 juillet 2017

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Bien entendu, c'est mieux de balayer la salete sous le tapis au lieu d'affronter les problemes.....Comme cela tout le monde va croire que tout va bien dans ce gouvernement....

    IMB a SPO

    16 h 24, le 06 juillet 2017

  • comment -ppurquoi s'attendre a mieux ? un cabinet forme de presque toutes les "forces" politiciennes du pays, toute opposition SERIEUSE ET VRAIE etant exclue. et va pour les bazars qd ce serait possible.

    Gaby SIOUFI

    10 h 54, le 06 juillet 2017

  • Même le patriarche orthodoxe Mgr. Y. Yazigi et le métropolite de Beyrouth Mgr. E. AUDI s'inventent des "litiges"...maintenant ? Ont-ils été contaminés par no IRRESPONSABLES-INCAPABLES du gouvernement...de mieux en mieux ! Irène Saïd

    Irene Said

    10 h 30, le 06 juillet 2017

  • AUCUNE AFFAIRE N,EST RESOLUE COMME IL SE DOIT... DES COMPROMIS ET DES COMPROMIS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 15, le 06 juillet 2017

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