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Lifestyle - Gastronomie

Les fourneaux zahliotes de Jeanette Chawki au cœur de la « League of Kitchens » new-yorkaise

Cette Libanaise expatriée aux États-Unis partage ses recettes et sa culture à travers un groupe de femmes venues du monde entier, des ateliers de travail, des livres et des émissions télévisées.

Les fourneaux zahliotes de Jeanette Chawki au cœur de la « League of Kitchens » new-yorkaise

Jeanette derrière les fourneaux. Photo tirée du compte Instagram League of Kitchens

En s’installant aux États-Unis il y a de nombreuses années, la Coréenne Lisa Kyung Gross, en manque de repères, de saveurs authentiques et sans doute de souvenirs, a longtemps regretté de ne pas avoir conservé les recettes et techniques de cuisine de ses deux grands-mères. Tout comme toutes ces personnes venues des quatre coins du monde faire leur vie au pays de l’Oncle Sam. Comme Jeanette Chawki.

En 2014, Gross fonde à New York The League of Kitchens, avec une dream team composée de femmes de différentes origines, quatorze mères et grands-mères venues d’Indonésie, du Mexique, du Burkina Faso et… du Liban. Cette école de cuisine transculturelle, unique en son genre, a permis aux femmes immigrantes, durant ces dix années, de se transformer en cheffes qui enseignent leur expertise culinaire et leurs traditions respectives à travers des ateliers de cuisine, chez elles ou en ligne.

Selon le site de The League of Kitchens, ces femmes transmettent, certes, leurs compétences et leurs recettes, mais surtout leurs secrets et leur amour de la cuisine et la culture de leur pays. Cette initiative a aujourd’hui porté ses fruits, avec la récente publication d’un très bel ouvrage intitulé The League of Kitchens Cookbook: brilliant tips, secret methods & favorite family recipes from around the world. « Pour tester mon idée, j’ai commencé par un petit projet pilote travaillé avec Jeanette, qui est originaire du Liban, et Asfari du Bangladesh, a confié Lisa. Toutes deux font encore partie de notre programme démarré en 2014. »

Dans une conversation informelle, devenue amicale, avec Jeanette, qui a rapidement pris la forme d’une sobhié autour d’un café, comme elle l’a qualifiée, la Libanaise installée aux États-Unis depuis 2006 s’est écriée avec passion : « Le Liban c’est mon oxygène, ma thérapie. La joie de vivre des Libanais, malgré toutes les difficultés qu’endure le pays, est une belle leçon de vie qui n’existe nulle part ailleurs. Quand j’y reviens en visite et que l’on me dit : “On vient te chercher à l’aéroport”, je réponds : “Jamais ! Ici, je suis chez moi, je prends ma valise et je me déplace comme je veux”, pour bien sentir notre atmosphère. »

Un livre riche en recettes. Photo DR


Une « success-story » spontanée

L’histoire américaine de Jeanette Chawki est celle d’une réussite naturelle et inattendue. Rejoignant en 2006 son mari Chehadé Arnaout avec ses trois enfants, un talent culinaire familial et pas un mot d’anglais dans les bagages, la première chose qu’elle fait est de s’inscrire dans une école de langue anglaise. « Dans cette école, la tradition veut que l’on clôture l’année par un déjeuner composé de plats concoctés par chaque élève venu de différents horizons qui, comme moi, s’initiait à la langue locale. J’avais préparé un grand plat de feuilles de vignes farcies. » Lorsque la directrice demande : « Qui a fait cela ? » Jeanette pense au pire… « Puis, je la vois se diriger vers moi et me tendre une carte de visite, me précisant de contacter une compagnie de catering qui avait besoin d’une personne pour préparer des spécialités méditerranéennes. »

Jeanette Chawki s’exécute immédiatement et démarre ainsi une carrière dans la cuisine, forte d’une solide formation héritée de sa mère aux origines turques, de ses grands-parents, de son père agriculteur, Abdelahad-Dominique, et de sa tante. « Nous vivions tous dans une maison de deux étages, nos repas étaient partagés ensemble au quotidien, préparés par mes parents qui, en bons Zahliotes, avaient les meilleures recettes des plats du terroir. »

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En plus d’avoir assimilé l’art de préparer une multitude de plats libanais, Jeanette Chawki possédait naturellement ce qu’on appelle chez nous le nafas. Cette qualité innée qui, sans doute, lui a permis de se faire remarquer dans la compagnie de catering américaine qui l’avait engagée. C’est d’ailleurs là qu’elle est repérée par une Américaine d’origine coréenne qui lui propose de collaborer avec elle dans un projet de cuisine transculturelle. Cette collaboration donnera naissance, en 2014, à la League of Kitchens.

Des cours de cuisine à la manière libanaise d’un « Jeanette reçoit »

À la League of Kitchens, une session de cuisine en ligne dure plusieurs heures. La dernière en date Avec Jeanette, menée dans sa cuisine, propose l’art de réussir un riz au poulet accompagné d’un bol de laban parfumé à la menthe sèche et d’un fattouche. L’apprentissage se fait aussi en direct au domicile même de la cheffe et dure cinq heures. Et la Libanaise reçoit comme « au pays ». Les apprenties, au nombre de cinq ou six, sont accueillies par une tasse de café turc et les petites douceurs qui vont avec, « pour faire plus ample connaissance ».

Puis, cap sur la cuisine pour les choses sérieuses : observer l’hôtesse opérer derrière ses fourneaux tout en fournissant les moindres détails sur les plats concoctés. Vient ensuite le moment de la dégustation, un pur bonheur. Un deuxième café, pour finir, avant de se séparer avec un cahier noirci de recettes libanaises. « Jeanette et son mari nous ont accueillis chez eux comme si nous faisions partie de la famille. Ce fut une superbe expérience de découvrir son pays et ses recettes », témoigne Danielle H., l’une des participantes à cette session. 

La cuisine libanaise de Jeanette Chawki a figuré dans les plus grands magazines gastronomiques, dont Food & Wine, Vogue, Serious Eats, Travel + Leisure, The New York Times, The Infatuation, Chopt Travels. Les grandes chaînes de télévision américaines lui ont également rendu visite pour la filmer derrière ses fourneaux. « Je fais toujours confiance au Liban, conclut-elle avec inquiétude et regret, mais je me pose cette question : pourquoi cela nous arrive-t-il ? Le monde a vécu la Première Guerre mondiale et la Seconde et le chapitre a été clos. Et nous, quelle guerre va nous permettre d’y mettre un point final ? » Une guerre ou mieux encore, une paix durable.

En s’installant aux États-Unis il y a de nombreuses années, la Coréenne Lisa Kyung Gross, en manque de repères, de saveurs authentiques et sans doute de souvenirs, a longtemps regretté de ne pas avoir conservé les recettes et techniques de cuisine de ses deux grands-mères. Tout comme toutes ces personnes venues des quatre coins du monde faire leur vie au pays de l’Oncle Sam. Comme Jeanette Chawki.En 2014, Gross fonde à New York The League of Kitchens, avec une dream team composée de femmes de différentes origines, quatorze mères et grands-mères venues d’Indonésie, du Mexique, du Burkina Faso et… du Liban. Cette école de cuisine transculturelle, unique en son genre, a permis aux femmes immigrantes, durant ces dix années, de se transformer en cheffes qui enseignent leur expertise culinaire et leurs traditions...
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