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Politique - Portrait

Mohammad Fahmi face au défi de son legs politique

Crédité de grandes qualités de commandement, le nouveau ministre de l’Intérieur, compté dans le camp du 8 Mars, n’a aucun intérêt à durcir la répression de la contestation, estiment les analystes.

Mohammad Fehmi, le nouveau ministre de l’Intérieur. Photo AFP

Placé à la tête d’un ministère régalien des plus stratégiques, celui de l’Intérieur et des Municipalités, un poste traditionnellement confié au camp haririen ou à des indépendants, Mohammad Fahmi, compté dans le camp du 8 Mars, aura probablement du mal à se défaire de l’image qui lui colle à la peau.

Pourtant, cet ancien officier qui a fait un parcours remarquable au sein de l’armée, comme en témoignent plusieurs de ses compagnons d’armes, ne manque pas de qualités professionnelles, encore moins d’atouts lui permettant de remplir à bien sa mission.

Titulaire d’un master en gestion des entreprises et des ressources humaines et d’un diplôme d’études supérieures de l’Université James Madison aux États-Unis, le général Fahmi a rapidement grimpé les échelons au sein de l’institution militaire, qu’il a intégrée en 1978. Proche du commandant en chef de l’armée de l’époque, le général Émile Lahoud (1989-1998), et du général Jamil Sayyed lorsque ce dernier était le numéro 2 des services de renseignements militaires, Mohammad Fahmi « a longtemps gravité dans l’orbite du camp prosyrien », témoignent plusieurs sources concordantes.


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En 1997, il préside le département central de sécurité de la direction des services de renseignements de l’armée, un poste « névralgique qui lui accorde une ascendance certaine sur les officiers », selon un ancien officier, et lui permet de s’affirmer au sein de l’institution militaire qu’il quittera en 2006. Il sera ensuite chargé de diriger le Centre libanais de déminage, une mission qui lui vaudra beaucoup d’honneurs notamment pour ses « compétences exceptionnelles et l’excellence dans la réalisation de son mandat », d’après un autre ancien militaire.

Dévoué et courageux sur le champ de bataille, on lui reconnaît des qualités de commandement « exceptionnelles, bien qu’il soit toutefois capable de faire certains compromis, quitte à contourner les règlements », témoigne un ancien militaire qui l’a connu de près.

De père égyptien et de mère chiite originaire du Liban-Sud, le général Fahmi obtiendra la nationalité libanaise grâce notamment aux relations politiques tissées au sein de la famille de sa mère, qui se trouve être la sœur du député Abdellatif Zein, comme le confie à L’Orient-Le Jour un ancien officier de l’armée.

« Il est sunnite de titre, mais chiite de mœurs et de style de vie », raconte l’ancien officier, qui explique qu’après le divorce de ses deux parents, Mohammad Fahmi a surtout fréquenté les milieux chiites de l’entourage de sa mère. Considéré proche du Hezbollah, de l’aveu même des milieux du parti chiite, il a préservé une bonne relation avec Jamil Sayyed qui aurait joué un rôle de premier rang dans sa désignation à l’Intérieur.


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Relations privilégiées avec le régime Assad

« C’est un officier qui a fait une carrière réussie. Il faisait équipe avec Jamil Sayyed qui entretenait des relations privilégiées avec le régime Assad. Il serait par conséquent erroné de le considérer comme une figure indépendante », commente un ancien militaire qui l’a connu. Mais par-delà ses choix politiques, sa réputation est celle d’un homme respectueux des institutions, « un peu à la manière du général Sayyed lui-même qui a réussi à redresser la Sûreté générale », ajoute la source précitée.

Fort d’un passé qui l’a propulsé dans le camp politique du 8 Mars, le général Fahmi risque fort de devenir la cible d’attaques de la part des forces politiques qui ne sont pas dans le gouvernement, le courant du Futur à leur tête. C’est certainement cet écueil que tentera d’éviter le nouveau ministre de l’Intérieur, conscient de la vulnérabilité de sa position, du fait de l’absence de légitimité auprès de la rue sunnite et de ses affiliations politiques proches de l’axe de la résistance.

D’où probablement ses premiers propos conciliants à l’égard du directeur général des Forces de sécurité intérieure, Imad Osmane, proche du camp haririen, dont il a salué mardi la « performance », en affirmant, en réponse à une question, qu’il n’entend absolument pas le démettre de ses fonctions. Une prise de position qui en dit long sur son souci de ménager la direction des FSI et de faire preuve d’une politique modérée à la tête du ministère.


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« C’est un homme de bon sens, qui a assez de tact et de déontologie pour éviter d’entrer en confrontation avec Imad Osmane », commente un ancien militaire qui estime que le nouveau ministre fera de son mieux pour se distancier en politique de son ami Jamil Sayyed, qui est depuis des années en confrontation ouverte avec le haririsme politique.

Pour de nombreux observateurs, il serait en outre difficile pour le nouveau ministre de l’Intérieur, comme d’ailleurs pour l’ensemble du gouvernement, d’envisager un durcissement de la répression du mouvement de contestation. Cela pourrait se retourner contre lui et sonner le glas d’un cabinet accusé d’être à la solde d’un camp politique donné. D’où son intérêt à faire preuve de souplesse en matière de respect des libertés, diront certains. « Placé d’ores et déjà au banc des accusés, le nouvel exécutif, dont le ministre de l’Intérieur, fera tout pour se déculpabiliser », conclut un analyste politique.


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Placé à la tête d’un ministère régalien des plus stratégiques, celui de l’Intérieur et des Municipalités, un poste traditionnellement confié au camp haririen ou à des indépendants, Mohammad Fahmi, compté dans le camp du 8 Mars, aura probablement du mal à se défaire de l’image qui lui colle à la peau. Pourtant, cet ancien officier qui a fait un parcours remarquable au sein de...

commentaires (7)

Avec tous ses référents, Assad, HB etc nous voilà rassurés. Pauvre pays. Il manque de libanais compétents intègres et qualifiés pour occuper un poste régalien tel que celui-là. On préfère confier le sort de notre pays à une personne dont on sait peu et ce peu ne nous procure aucun anthousiasme dans l'avenir. On parle de ses prouesses militaires?? Qu'est ce que cela veut dire? Quel guerre et où et comment?

Sissi zayyat

16 h 54, le 24 janvier 2020

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Commentaires (7)

  • Avec tous ses référents, Assad, HB etc nous voilà rassurés. Pauvre pays. Il manque de libanais compétents intègres et qualifiés pour occuper un poste régalien tel que celui-là. On préfère confier le sort de notre pays à une personne dont on sait peu et ce peu ne nous procure aucun anthousiasme dans l'avenir. On parle de ses prouesses militaires?? Qu'est ce que cela veut dire? Quel guerre et où et comment?

    Sissi zayyat

    16 h 54, le 24 janvier 2020

  • Un avatar des divins shi3a, shi3a donc!

    Christine KHALIL

    22 h 23, le 23 janvier 2020

  • Il est libanais de "père en grand-père" comme on dirait ici. Je peux le confirmer puisque son grand-père est mon arrière grand-père. Merci de vérifier vos sources avant de publier.

    Fehmi Marwan

    20 h 04, le 23 janvier 2020

  • ON A INTERET A DESAMORCER LA CRISE DE LA CONTESTATION NON EN REPRESAILLES CONTRE LES MANIFESTANTS MAIS EN EPOUSANT ET APPLIQUANT LA PLUPART DE LEURS REVENDICATIONS. UN TRAVAIL D,HERCULE VU LA MEFIANCE DE LA RUE CONTRE CE GOUVERNEMENT DE MARCHANDAGES DES PARTIS POLITIQUES D,UNE SEULE COULEUR ET QUI NE REPOND PAS AUX EXIGENCES DEMOCRATIQUES DE TOUT LE PEUPLE LIBANAIS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 22, le 23 janvier 2020

  • Papier super intéressant: on y apprend beaucoup de choses.

    Marionet

    08 h 34, le 23 janvier 2020

  • Puisqu’il sera en charge de la chose, et que lui-même fait partie des rares privilégiés de père étranger ayant été naturalisés par leur mère libanaise, Cela fera-t-il avancer ce dossier une fois pour toutes?

    Gros Gnon

    07 h 51, le 23 janvier 2020

  • Un partisan du Hezbollah et, de surcroît ami de Jamil Sayyed, au ministère de la police! Voilà qui, a priori, n'est pas de nature à rassurer les citoyens. Espérons toutefois qu'il saura se montrer pragmatique et comprendre que le vent de la révolte est un vent de liberté.

    Yves Prevost

    07 h 36, le 23 janvier 2020

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