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Politique - Contestation

« Provocation », « partage du gâteau », « farce »... La société civile fustige le cabinet Diab

La formation du nouveau gouvernement mardi soir a laissé un goût amer aux groupes de l’intifada du 17 octobre, qui y voient une continuité de la mentalité au pouvoir et une équipe incapable de résoudre la crise.


« Le pouvoir du peuple est plus fort que les gens au pouvoir », peut-on lire sur cette pancarte, brandie par une manifestante le 20 octobre 2019, aux premiers jours de la révolution. Où en est-on de ces aspirations ? Anwar Amro/Photo d’archives AFP

Même si le nouveau Premier ministre Hassane Diab a affirmé, dans l’une de ses premières déclarations après la formation de son cabinet, mardi soir, « représenter la contestation » populaire du 17 octobre, ce n’est pas l’impression qui se dégage auprès des personnes qui ont mis tous leurs espoirs dans la révolution, et qui oscillent entre découragement et colère. Sur cette réaction épidermique à l’encontre du nouveau gouvernement, les groupes de l’intifada mettent des mots. Comme en chœur, ils expliquent pourquoi ce cabinet, composé de personnalités proches du président de la République, Michel Aoun, du Hezbollah et de leurs alliés, ne répond pas aux aspirations de la rue, et ce indépendamment de la valeur de certains des ministres qui s’y trouvent.

Pour le parti Beirut Madinati, le nouveau « gouvernement des quotas est une insulte, une provocation et un mépris de la dignité du peuple ». « Après trois mois d’atermoiements et de fausses promesses d’un gouvernement restreint et indépendant, trois mois couronnés de violence, le pouvoir stérile a formé un gouvernement de quotas politiques ne répondant qu’à ses propres intérêts. Cette ignorance provocatrice des revendications légitimes du peuple promet une large confrontation populaire, qui conduira à l’effondrement complet du pays et accroîtra notre dépendance vis-à-vis de la politique des axes », dénonce le parti dans un communiqué.


(Lire aussi : Un gouvernement, quelques bonnes têtes, et après... ?)


« Le processus de formation du gouvernement, en particulier la farce dont nous avons été témoins ces derniers jours, indique clairement qu’il s’agit d’un gouvernement dépendant, soumis à des politiques qui ont détruit et pillé le pays, même si certains (ministres) affichent une certaine expérience ou un certain professionnalisme. Le conseiller est devenu ministre et le ministre est devenu conseiller, poursuit Beirut Madinati. Il n’y a aucune confiance dans la capacité d’un tel gouvernement à fournir un véritable programme de sauvetage qui redonne aux gens leur dignité. Pas de retour en arrière. »

Le Bloc national a estimé pour sa part qu’il ne peut y avoir de « sauvetage » du pays à l’ombre du gouvernement formé par Hassane Diab. Dans un communiqué publié sur son site, le BN dénonce « la demande du tiers de blocage au sein d’un gouvernement composé uniquement d’alliés stratégiques ». Il fustige également « les différends au sujet du nombre (de ministres) et des portefeuilles ministériels dans une logique purement confessionnelle », critiquant également « les tiraillements (qui ont eu lieu, lors de la gestation du cabinet, NDLR) pour s’arracher les ministères juteux ».

Le BN considère ainsi que « cette logique basée sur une absence de confiance entre les partis d’un même camp et sur une logique clairement confessionnelle et de partage du gâteau ne peut aboutir à un plan de sauvetage, ni même à une volonté de sauvetage ».

Le parti prédit enfin que ce gouvernement « mendiera quelques milliards auprès des donateurs afin d’éviter l’effondrement économique et celui de l’État ».


(Lire aussi : Le ciel et le fromage, le billet de Fifi Abou Dib)



« Ceux qui ont causé la crise ne peuvent la résoudre »

Même son de cloche auprès de Ali Mourad, militant au sein du groupe Ammiyet 17 techrine (commune du 17 octobre) et maître de conférences en droit public. « Notre refus de ce gouvernement n’est pas lié aux personnalités qui le composent, mais à l’approche employée pour sa formation, explique-t-il à L’OLJ. D’une part, il n’a pas de programme politique ou économique clair. D’autre part, le choix du Premier ministre et des ministres obéit à une logique de partage des parts politiques, comme si rien n’avait changé et que le pays n’était pas en faillite. Nous considérons que ce gouvernement, né de la volonté des partis politiques ayant contribué à la crise, n’est pas à même de la résoudre. » Selon l’activiste, « nous ne souffrons pas, au Liban, d’un problème de gouvernement mais de gouvernance politique et économique ». « Le vrai pouvoir n’est aux mains ni du gouvernement ni du Parlement, mais de quatre à cinq leaders qui décident de tout, poursuit Ali Mourad. Ni ces ministres ni le Premier ministre ne seront libres de leurs décisions quand il s’agira de choix importants et/ou stratégiques. »


(Lire aussi : Mission accomplie pour Hassane Diab, mais tout reste encore à faire, le décryptage de Scarlett Haddad)



« Quelle honte ! » s’exclame pour sa part Fatmé Hamasni du parti Sabaa. « Nous savions dès le début que Hassane Diab formerait un gouvernement monochrome, dit-elle à L’OLJ. Mais nous espérions qu’il choisirait des personnalités qui jouissent d’une certaine indépendance. Au lieu de cela, nous l’avons vu attendre que les politiciens, contre lesquels le peuple manifeste, lui imposent des noms, et leurs conditions avec ! C’est inacceptable, ils prennent les gens pour des imbéciles. »

Quand on lui fait remarquer qu’il était fortement improbable que cette classe politique cède tous ses atouts d’un coup, elle répond : « Certainement. Mais ce gouvernement montre qu’ils ont choisi d’ignorer les revendications populaires. Il est compréhensible donc que la population soit découragée et en colère. Et j’ai bien peur que les confrontations n’aillent crescendo. »


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commentaires (3)

La naïveté doit me rendre aveugle. Oui le Hezbollah est un mal relatif, juste devant le reste des libanais mais, étant donné son influence supposée dans la conviction de cet attelage, il ne me semble pas constitué que de mauvaises rosses. Après, qu'il puisse tirer le pays, et en plus dans la bonne direction, c'est aussi fonction du chemin et de la masse de problèmes ...

M.E

12 h 34, le 23 janvier 2020

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Commentaires (3)

  • La naïveté doit me rendre aveugle. Oui le Hezbollah est un mal relatif, juste devant le reste des libanais mais, étant donné son influence supposée dans la conviction de cet attelage, il ne me semble pas constitué que de mauvaises rosses. Après, qu'il puisse tirer le pays, et en plus dans la bonne direction, c'est aussi fonction du chemin et de la masse de problèmes ...

    M.E

    12 h 34, le 23 janvier 2020

  • EN FAIT C,EST UN PARTAGE DU GATEAU PAR UNE SEULE ET MEME COULEUR DE PARTIS POLITIQUES CONTRAIREMENT AUX PRATIQUES DU PAYS ET SURTOUT CONTRAIREMENT AUX REVENDICATIONS POPULAIRES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 26, le 23 janvier 2020

  • C'EST L'HEURE DE L'AMNISTIE MAINTENANT SUR TOUT LE MAL QU'ILS NOUS ONT FAIT ET TOUS LES VOLS. ILS ONT TOUS LES POUVOIRS EN MAINS POUR LE VOTER. ET S'IL Y A ENCORE UN JUGE QUELQUE PART QUI RÉFLÉCHIT POUR SE LIBÉRER D'EUX, C'EST TROP TARD POUR LUI. IL SERA REMPLACÉ IMMÉDIATEMENT.

    Gebran Eid

    02 h 09, le 23 janvier 2020

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