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Liban - Environnement

Barrage de Bisri : le désaccord reste entier

La commission parlementaire de l’Environnement réunie hier sous la présidence de Marwan Hamadé. Photo Ali Fawaz

La réunion de la commission parlementaire de l’Environnement, tenue hier sous la présidence de Marwan Hamadé, a été consacrée au barrage de Bisri, auquel s’oppose farouchement la société civile, en raison notamment de son impact sur l’environnement dans la région qui risque d’être noyée en grande partie et de la destruction d’un patrimoine très riche.

Le barrage devrait être édifié sur une superficie de six millions de mètres carrés dans une vallée située entre le Chouf et Jezzine, avec pour objectif d’alimenter Beyrouth en eau. D’une capacité de 120 millions de mètres cubes, il devrait être exécuté par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) pour un budget de plus de 1,2 milliard de dollars, assuré par un prêt de la Banque mondiale. Près de la moitié de l’eau qui devrait être acheminée vers la capitale provient du lac du Qaraoun (barrage du Litani), dont l’eau est polluée.

À l’ordre du jour de cette réunion, trois points relatifs aux « dangers » que représente l’édification du projet, notamment « les séismes, l’atteinte à l’environnement et au patrimoine », a expliqué M. Hamadé à l’issue de la réunion, qui s’est tenue en présence de représentants du CDR et de la société civile. « Il s’est avéré que les arbres qui ont été abattus sont au nombre de 120 000 ou 130 000 et non d’un million comme il a été dit, a-t-il poursuivi. En ce qui concerne l’ancienne église, elle sera déplacée sur un site situé en dehors de la région du barrage. »

« Nous ne pouvons pas faire assumer au ministère de l’Environnement actuel ni au CDR la décision politique qui consiste à acheminer l’eau vers Beyrouth (…) », a insisté M. Hamadé, notant que la vigilance est de mise pour ne pas répéter le même scénario observé avec l’électricité, dans le sens où des centrales électriques ont été édifiées sans qu’il n’y ait de réseaux de distribution. « Nous ne voulons pas construire des barrages sans que l’eau ne parvienne aux habitations, a-t-il poursuivi. De même, nous voulons nous assurer de la salubrité de l’eau. »


(Lire aussi : Barrage de Bisri : halte au « pire scandale écologique du Moyen-Orient ! »)

Une réunion de désinformation

« Les représentants du CDR ont induit les membres de la commission parlementaire de l’Environnement en erreur », affirme à L’Orient-Le Jour Paul Abi Rached, président du Mouvement écologique libanais, présent à la séance. « Ils ont eu recours à de la désinformation pour convaincre les présents qu’il n’y a pas d’alternative à l’édification du barrage de Bisri », s’insurge-t-il.

Il explique ainsi que le nombre des arbres qui seront abattus a été minimisé. « Ce sont au moins un million d’arbres qui seront déracinés selon une étude que nous avons menée en coordination avec un expert forestier », note M. Abi Rached. Selon ce document, chaque hectare de la vallée de Bisri compte au moins 2 000 arbres. « Si on déduit les terrains agricoles, il restera 500 hectares soit l’équivalent d’un million d’arbres qui, selon les experts, emmagasinent au quotidien 20 millions de kilogrammes de gaz carbonique contre cinq millions captés par l’ensemble des arbres plantés au cours des treize dernières années », affirme M. Abi Rached.

« Les représentants du CDR ont en outre insinué que l’étude effectuée par l’Institut fédéral allemand de géosciences et de ressources naturelles (BGR) pour la protection de la source de Jeïta a souligné la nécessité de construire quatre barrages dont le plus petit a la même capacité que celui de Bisri, martèle M. Abi Rached. Or selon ce document, il est conseillé de construire six petits barrages dans le bassin de la source de Jeïta pour que l’eau puisse s’infiltrer dans les nappes phréatiques et alimenter la source durant la période de sécheresse. Le plus grand de ces barrages a une capacité de 9 millions de mètres cubes. De plus, selon ce rapport, la construction d’un pipeline supplémentaire et la réparation des canalisations défectueuses suffiront pour alimenter Beyrouth en eau à partir de la source de Jeïta. »


(Lire aussi : Un hydrogéologue répond au CDR : Pourquoi stocker de l’eau superficielle sur un réservoir d’eau propre ?)


M. Abi Rached note que les représentants du CDR ont fait état de « 500 millions de mètres cubes en ressources hydrauliques renouvelables ». « Or selon un rapport du PNUD daté de 2014 et qui est une mise à jour de l’étude menée en 1970, les ressources hydrauliques renouvelables sont estimées en moyenne à trois milliards de mètres cubes par an », insiste-t-il. Et d’ajouter : « Les représentants du CDR ont avoué que la moitié des canalisations d’eau à Beyrouth sont défectueuses, ce qui entraîne une perte de près de 50 % de l’eau. Il fallait réhabiliter ce réseau de canalisations avant d’entamer la construction des barrages. »

Concernant l’étude d’impact environnemental, M. Abi Rached rappelle que celle-ci a été réalisée en 2014 et que, selon les lois en vigueur, elle n’est valable que pour deux ans. « Donc, il fallait effectuer une nouvelle étude avant d’entamer les travaux dans le barrage de Bisri, d’autant que de nouvelles données ont éclaté au grand jour au cours des dernières années. Sans oublier qu’un tel projet a un coût financier élevé, alors que le pays passe par une forte crise économique, et qu’il a un impact sur la santé, vu que la moitié de l’eau est acheminée du Litani, et sur l’environnement puisque, avec le changement climatique, il y aura moins de pluies et que le taux d’évaporation de l’eau sera plus important. »




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commentaires (3)

Même si c'est "seulement de 120 000 ou 130 000 arbres" c'est quand même assez triste qu'on fait ca abattre 120 000 arbres pour faire une sorte de barrage dubieux. Tout le monde sait que c'est justement les arbres qui retiennent l'eau et que si on abbat les arbres, il n'y a que l'érosion qui va suivre, les gens du Liban, druzes, chrétiens, musulmans et autres tout le monde ils vont perdre les terres riches de la vallée de Bisri, ce n'est pas seulement une problématique chrétienne.

Stes David

14 h 05, le 09 octobre 2019

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Commentaires (3)

  • Même si c'est "seulement de 120 000 ou 130 000 arbres" c'est quand même assez triste qu'on fait ca abattre 120 000 arbres pour faire une sorte de barrage dubieux. Tout le monde sait que c'est justement les arbres qui retiennent l'eau et que si on abbat les arbres, il n'y a que l'érosion qui va suivre, les gens du Liban, druzes, chrétiens, musulmans et autres tout le monde ils vont perdre les terres riches de la vallée de Bisri, ce n'est pas seulement une problématique chrétienne.

    Stes David

    14 h 05, le 09 octobre 2019

  • JE LE REDIS. QUE LES EXPERTS EN DECIDENT TOUT EN PRENANT EN COMPTE LES RETOMBEES ECOLOGIQUES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 10, le 09 octobre 2019

  • le cafouillage reste entier oui ! la non clarte reste entiere oui ! le mensonge ehonte reste entier oui ! oserais je y ajouter qq chose de mon cru ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 57, le 09 octobre 2019

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