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Liban - Polémique

Barrage de Bisri : halte au « pire scandale écologique du Moyen-Orient ! »

Des dizaines de militants se sont mobilisés hier devant le siège du CDR à Beyrouth pour réitérer leur refus de ce projet titanesque... alors que l’abattage d’arbres a commencé dans la vallée.

Les manifestants, hier place Riad el-Solh, contre la construction du barrage de Bisri. Photo S.B.

Le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) est « un conseil de la démolition et de la destruction ». « Le ministre de l’Environnement a enfreint la loi. » Tels sont quelques-uns des slogans qui étaient brandis hier par les manifestants devant le CDR à Beyrouth, mobilisés à la demande de la Campagne nationale pour sauver la vallée de Bisri, représentant diverses organisations. Leur sit-in intervient quelques jours seulement après que des travaux d’abattage d’arbres à grande échelle ont commencé dans cette vallée entre Jezzine et le Chouf, destinée par le gouvernement à accueillir un barrage majeur qui devrait alimenter Beyrouth, financé par la Banque mondiale. L’abattage d’arbres, que les militants soupçonnent avoir été confié par le CDR à un entrepreneur privé, semble être le coup d’envoi des travaux si controversés.

Roland Nassour, coordinateur de la campagne, explique le choix du lieu, accusant le CDR « de corruption ». « L’abattage d’arbres a été adjugé à la société Abou Afif Haïdar, et d’autres sociétés auront bientôt le droit de se partager le reste de la vallée », s’insurge-t-il. Il accuse « le ministre de l’Environnement d’avoir approuvé le début des travaux alors que l’étude d’impact environnemental est trop ancienne pour être validée, le ministre de la Culture d’autoriser qu’un terrain aussi riche en vestiges soit noyé, et le ministre de l’Agriculture de permettre que tant d’arbres soient abattus ». Il se demande « pourquoi construire un nouveau barrage à des millions de dollars sur six millions de mètres carrés d’espaces verts, quand d’anciens barrages, comme à Brissa, n’ont jamais stocké d’eau ».

Le jeune militant assure que « des mesures d’escalade sont envisagées par la société civile » et énumère les revendications : un arrêt immédiat de l’abattage d’arbres, une nouvelle étude d’impact environnemental ainsi qu’un renouvellement de toutes les études nécessaires (notamment celle de la faisabilité économique), un retrait du dossier des mains du CDR, des solutions durables alternatives pour le Grand Beyrouth et la création d’une réserve naturelle et culturelle.


(Lire aussi : Un hydrogéologue répond au CDR : Pourquoi stocker de l’eau superficielle sur un réservoir d’eau propre ?)


Pour sa part, Paul Abi Rached, président du Mouvement écologique libanais, estime que « le barrage de Bisri est le plus grand scandale écologique du Moyen-Orient, étant donné que toutes les études montrent que le projet n’est pas viable ». « Le patriarche maronite Béchara Raï a déclaré il y a à peine une semaine qu’il discuterait de ce dossier avec la ministre de l’Énergie, et voilà qu’on nous surprend avec l’abattage d’arbres, comme pour nous mettre devant le fait accompli », déplore-t-il. Il confirme à L’Orient-Le Jour que les mouvements de protestation se poursuivront, sans en préciser la nature.

De son côté, Ali Darwiche, président de Green Line, affirme que de nombreuses failles entachent ce dossier, dont les premières études remontent à 1991. « Le barrage initial devait être conçu pour 50 millions de mètres cubes, suivant l’Office du Litani en ce temps-là. Il est ensuite passé à 100 millions suite aux recommandations d’une compagnie américaine, et on en est aujourd’hui à un projet de 125 millions, ajoute-t-il. Qui garantit que les ressources hydrauliques sont suffisantes pour remplir ce barrage ? Et pourquoi drainer une eau polluée (du Litani) par des composants industriels à Beyrouth, sachant que les autorités n’ont aucune idée de la manière dont il faut la purifier ? »

Les habitants de la région sont de toute évidence les plus personnellement affectés. Amani Beaïni de Mazraat Chouf en fait partie. « Nous irons jusqu’au bout ! » affirme-t-elle.


(Pour mémoire : La campagne contre le barrage de Bisri se poursuit sur tous les fronts)


La réponse du CDR

En soirée, le CDR a publié une réponse concernant l’abattage massif d’arbres dont l’accusent les militants. « Dire que le CDR a confié la tâche de l’abattage à une société privée n’est pas précis, l’adjudication effectuée concerne globalement la construction du barrage, dont les travaux sont de la responsabilité d’un entrepreneur, lit-on dans le texte. Or, la construction du barrage implique l’abattage de certains arbres à certains endroits, et non sur la superficie entière du projet. »

Le CDR précise qu’un permis a été accordé par le département des forêts au ministère de l’Agriculture, avec une mention des espèces d’arbres et leur nombre. Le communiqué mentionne « des indemnités écologiques » qui consisteront principalement dans le reboisement d’autres parcelles.



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commentaires (5)

Une politique de construction de barrages ne fera qu’aggraver et détériorer notre environnement, causer des problèmes démographiques, exposer les cuves et contre bas des barrages a des graves risques sismiques, sans garantir la qualité de notre eau. C'est essentiellement en réduisant et empêchant les pollutions de surface et des nappes phréatiques, en assainissant les lits de nos fleuves, en boisant un peu plus nos montagnes, en réglant nos problèmes démographiques, et en récupérant de manière scientifique les eaux douces des rivières souterraines qui se déversent au bords de notre litoral a quelques mettres de profondeur en mer, que nous pourrions assurer durablement notre eau potable tout en assainissant notre environnement général.

Bibette

17 h 27, le 20 septembre 2019

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Commentaires (5)

  • Une politique de construction de barrages ne fera qu’aggraver et détériorer notre environnement, causer des problèmes démographiques, exposer les cuves et contre bas des barrages a des graves risques sismiques, sans garantir la qualité de notre eau. C'est essentiellement en réduisant et empêchant les pollutions de surface et des nappes phréatiques, en assainissant les lits de nos fleuves, en boisant un peu plus nos montagnes, en réglant nos problèmes démographiques, et en récupérant de manière scientifique les eaux douces des rivières souterraines qui se déversent au bords de notre litoral a quelques mettres de profondeur en mer, que nous pourrions assurer durablement notre eau potable tout en assainissant notre environnement général.

    Bibette

    17 h 27, le 20 septembre 2019

  • il faut choisir entre la soif et le manque d'eau et les barrages qui c'est vrai détruisent des arbres et engloutissent quelques pierres anciennes mais qui sont à la base d'écosystèmes encore plus riches en faune et flore et oiseaux migrateurs ainsi que zones d'activités récréationnelles et touristiques ...sans égal au proche orient... quand on veut voir le verre à moitié vide on s'évertue en polémiques absurdes.... et on oublie l'essentiel ... l'eau est vitale pour notre survie et notre bien être ... il faut choisir ....

    Joseph Zoghbi

    12 h 54, le 20 septembre 2019

  • QUE LES EXPERTS, PAR LEURS ETUDES, MAIS SANS DES INTERVENTIONS POLITIQUES ET DES 3ABBIL JAYBÉ, EN DECIDENT. S,IL Y A DE PLUS SIMPLES ET MOINS CHERS MOYENS D,AUGMENTER LE DEBIT DE L,EAU VERS BEYROUTH CES MOYENS DEVRAIENT AVOIR LA PRIORITE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 32, le 20 septembre 2019

  • This Bisri dam project reeks of major corruption considering the abject failures of the other dam projects in Lebanon. The project will destroy a large green area rich in history in Southern Lebanon to bring polluted water to Beirut. Rather than looking at alternative, sustainable and much cheaper solutions to increase the water output to Beirut, the champions of this project, members of a corrupt government and institutions, are looking at borrowing hundreds of millions of dollars more to complete the project, while we’re nearing a hundred billion dollars in government debt. The systematic environmental destruction and ecocide in Lebanon must stop, from the failed dam projects, to the quarries destroying the mountains of Lebanon, to the failed policies of collecting and treating household and industrial waste, the dumping of waste and pollution of rivers. Meanwhile, the government keeps on increasing our taxes and giving civilians nothing in return. We are fed up with the corruption, and leaders stuffing their pockets while destroying the lands of Lebanon and impoverishing the Lebanese.

    Mireille Kang

    11 h 54, le 20 septembre 2019

  • Il faudrait d'abord faire le reboisement des autres parcelles et puis attendre quelques dizaines et centaines d'années pour vérifier que le reboisement c'est bien passé ... Ici on fait l'inverse : d'abord abattre puis (promettre de) reboiser, pendant que c'est l'inverse qui est nécessaire.

    Stes David

    09 h 53, le 20 septembre 2019

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