La Commission épiscopale pour les médias au sein du Centre catholique d'information, réunie lundi sous la présidence de l’ancien archevêque maronite de Beyrouth, Mgr Boulos Matar, et en présence de l'évêque de Jbeil, Mgr Michel Aoun, a réclamé une fois de plus l'annulation du concert du groupe libanais Mashrou' Leila, programmé le 9 août au festival de Jbeil, estimant que le fait que l'entièreté des membres du groupe n'aient pas encore présenté des excuses pour avoir porté atteinte à des symboles sacrés démontre "leur volonté de gagner du temps".
Mgr Aoun a rappelé que seuls deux des musiciens de Mashrou' Leila avait exprimé, lors d'une réunion à l'évêché de Jbeil la semaine dernière, leur volonté de s'excuser pour les paroles de leur chanson heurtant la religion et de supprimer de leur programmation les chansons concernées. Mais Mgr Aoun aurait souhaité que ces excuses "viennent de tous les membres du groupe, lors d'une conférence de presse commune, ce qui n'a pas encore eu lieu". "Cela montre la volonté du groupe de gagner du temps", regrette le dignitaire.
(Lire aussi : Mashrou’ Leila présentera-t-il des excuses à l’Église pour pouvoir chanter à Byblos ?)
Dans ce contexte, la commission épiscopale, qui affirme que l'Eglise respecte les libertés de chacun "tant qu'elles ne heurtent pas les sentiments religieux et la foi des autres", "refuse que le groupe donne son concert du 9 août". Les religieux réitèrent leur refus de toute œuvre "qui s'en prend à la religion, la foi et les symboles religieux et qui déforme l'image de Dieu". Ils appellent "l'Etat à assumer ses responsabilités, conformément à la Constitution libanaise qui appelle au respect des religions, et à ne pas accepter un coup d'Etat contre cette Constitution, symbole de sa liberté, de son existence et de sa dignité". Ils appellent ainsi les responsables concernés à "prendre les mesures nécessaires pour empêcher toute atteinte aux religieux et interdire ce concert".
Dans l'après-midi, une soixantaine de personnes se sont rassemblées place Samir Kassir, dans le centre-ville de Beyrouth, en soutien à Mashrou' Leila, à l'initiative de groupes de la société civile. Une vingtaine de policiers, et nombre de soldats, encadraient le mouvement.
La polémique concernant le concert du groupe à Jbeil avait éclaté il y a une semaine sur les réseaux sociaux, en raison d'une atteinte présumée à la religion chrétienne due à une photo représentant une icône de la Vierge dont le visage a été remplacé par celui de la chanteuse Madonna accolée à un article partagé par le chanteur du groupe, Hamed Sinno, en 2015. Un des titres du groupe est également pointé du doigt. Sur un plan plus implicite, l’homosexualité affichée du chanteur semble également déranger.
Mercredi, deux membres de la formation musicale avaient été interpellés par la Sécurité de l’État, puis relâchés sur ordre de la procureure générale du Mont-Liban, Ghada Aoun. Les deux autres membres, dont le chanteur, se trouvaient à l’étranger. Ces derniers "pourront rentrer au pays car ils ne sont pas visés par une circulaire", avait précisé la juge Aoun, tout en indiquant qu’il n’y aurait pas de mesures supplémentaires à l’encontre du groupe. La juge avait considéré que l'affaire relevait du domaine de la liberté d'expression.
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Marrant ces curés normalement tapis derrière les ulemas en se prétendant plus ouverts qu'eux à des concepts laïcs comme le mariage civil, "si seulement il n'y avait pas cette majorité musulmane" mais chez qui un rien les révèle pour ce qu'ils sont: leurs alliés objectifs à tous les niveaux.
21 h 46, le 29 juillet 2019