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Liban - Vie politique

La lutte contre la corruption commence à sentir mauvais

Fouad Siniora, à sa conférence de presse vendredi dernier. Photo ANI

Instrumentalisée à des fins politiques par le Hezbollah, qui cherche depuis le débat de confiance à déboulonner l’ancien président du Conseil Fouad Siniora, la lutte contre la corruption semble avoir pris un bien mauvais départ.

L’ancien Premier ministre « se désigne lui-même comme accusé », a affirmé samedi le député du Hezbollah Hassan Fadlallah, pris à partie vendredi par Fouad Siniora, qui s’est considéré à juste titre visé par la démarche qui se voulait « vertueuse et désintéressée » du député. Ce dernier lui avait demandé, sans le nommer, mais dans une allusion on ne peut plus claire, de rendre compte de sa gestion financière entre 2006 et 2009, période durant laquelle l’État libanais a dépensé plus de 11 milliards de dollars « sans justificatifs », selon le député. L’accusation du Hezbollah reprend à son compte une ancienne accusation du Courant patriotique libre, rappelle-t-on. M. Fadlallah avait demandé au procureur financier Ali Ibrahim de se saisir du dossier.


(Lire aussi : Le Hezbollah (pas) libanais, l'édito de Ziyad MAKHOUL)


Attaque préventive
Dans une « attaque préventive » à sa façon, M. Siniora, qui avait à ses côtés tous les ténors du 14 Mars, avait dénoncé vendredi la manœuvre du parti chiite. Il avait notamment expliqué que les dépenses publiques avaient été supérieures sur la période allant de 2006 à 2009 que les 10 000 milliards de livres prévus par an – soit 40 000 milliards de livres au total (26,5 milliards de dollars) – via la règle du douzième provisoire, en raison notamment de la hausse des prix du pétrole ou des dépenses engagées suite à la guerre de juillet 2006 contre Israël. Des aléas qui ont porté le total des besoins de l’État, selon lui, à 56 590 milliards de livres (37 milliards de dollars) qui ont été financés par des avances du Trésor. L’ancien ministre avait communiqué un répertoire des différentes dépenses financées par les « 11,7 milliards de dollars » de différence. Sur ce total, a-t-il précisé, « 3 139 milliards de livres » (2,08 milliards de dollars) ont été versés à Électricité du Liban pour assurer son fonctionnement ; « 5 288 milliards de livres » pour payer le service de la dette publique ; 2 990 milliards de livres (1,98 milliard de dollars) pour couvrir des dépenses liées à l’exécution de loi antérieures engageant le gouvernement ; 1 694 milliards de livres (1,12 milliard de dollars) correspondent à des sommes dues aux municipalités, entre autres. M. Siniora a assuré que ces comptes pouvaient être retracés et reconstitués notamment via le ministère des Finances ou la Banque du Liban.


(Lire aussi : Gestion des comptes publics : les principaux arguments de Fouad Siniora)


Un ancien ministre interrogé par L’Orient-Le Jour estime que le « timing » de cette offensive du Hezbollah n’est pas innocent et vise, notamment, à faire capoter le programme d’endettement productif de la conférence de Paris, et à trouver un remplaçant sunnite au chef du gouvernement actuel. Ces attaques sont programmées, selon cet ancien ministre. Elles ont été lancées durant la présence à Beyrouth de Pierre Duquesne, le diplomate français chargé du suivi du processus CEDRE, alors que plus personne n’en parlait, dans le but évident de créer une tension politique. Et l’ancien ministre d’assurer que les dépenses ont été « toujours envoyées » par M. Siniora au Parlement, mais qu’en l’absence d’un gouvernement délégitimé « politiquement » par la démission des ministres chiites, la Chambre avait refusé d’en prendre acte – sauf que le gouvernement, où siégeaient toujours des ministres musulmans, en a toujours été informé.

Par ailleurs, l’ancien ministre a fait le rapprochement entre la guerre qui est faite indirectement au courant du Futur et les tentatives de Damas de diviser les rangs druzes et de déboulonner Walid Joumblatt. « Ces deux batailles font partie d’un même combat, il s’agit pour l’axe syro-iranien de prendre le contrôle de la vie politique », analyse-t-il.



Fuite en avant
« Fuite en avant », a riposté samedi Hassan Fadlallah qui, pointant du doigt Fouad Siniora, l’accuse directement de « maîtriser l’art de se dérober au devoir de rendre des comptes », d’avoir « caché les dépenses de l’État aux organismes de contrôle et à la Chambre » et enfin d’avoir « détourné les dons par le biais d’un compte spécial du Haut Comité des secours, pour dilapider les montants à des fins politiques au détriment des victimes de l’agression de juillet 2006 ».

Le plus malsain, dans cette confrontation entre le Hezbollah et le courant du Futur, c’est qu’elle fonctionne comme ces entonnoirs galactiques que sont les trous noirs, attirant vers le gouffre des règlements de comptes les autres forces politiques, et compromettant d’autant le grand chantier de la lutte contre la corruption, qui se voit lui-même ainsi… corrompu par des intérêts politiques divergents. Dans son préambule, hier, la Future TV s’en est cavalièrement prise hier à la station OTV, proche du chef de l’État, qui avait tenté la veille de faire la distinction entre Fouad Siniora et Saad Hariri. Cette distinction a été considérée comme « une tentative bon marché et fabriquée de toutes pièces, pour mettre les deux hommes en opposition ». « Celui qui s’en prend à lui s’en prend à Saad Hariri », a conclu péremptoirement le préambule.

En attendant, sur le plan institutionnel, la semaine politique sera marquée par deux réunions du Parlement, mercredi et jeudi. La première devrait être consacrée à l’élection des sept députés membres de la Haute Cour chargée de juger les anciens présidents et ministres, tandis que la seconde traiterait du vote de lois urgentes en attente. Ces votes, s’ils sont urgents, prendront même le pas sur la réunion du gouvernement, avait jugé Nabih Berry.

Rappelons que la Haute Cour se compose de sept députés élus par la Chambre et de huit des plus hauts magistrats pris par ordre hiérarchique ou, à rang égal, par ordre d’ancienneté. Ces huit magistrats sont choisis en Conseil des ministres. Les arrêts de cette cour sont rendus à la majorité de dix voix.


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Instrumentalisée à des fins politiques par le Hezbollah, qui cherche depuis le débat de confiance à déboulonner l’ancien président du Conseil Fouad Siniora, la lutte contre la corruption semble avoir pris un bien mauvais départ.L’ancien Premier ministre « se désigne lui-même comme accusé », a affirmé samedi le député du Hezbollah Hassan Fadlallah, pris à partie...

commentaires (15)

OK VOYONS LES DOUANES ET LA MAINMISE TOTALE SUR L'AEROPORT ET LE PORT DE BEYROUTH C'EST LA OU LES MILLIARDS SONT SOIT EVAPORES OU NON ENCAISSE PAR QUI VOUS SAVEZ ET OU LES ARMES ILLEGALLES ARRIVENT PROBABLEMENT EN QUANTITE INDUSTRIELLE DE TOUTE FACON AUCUN SUJET N'EST TABOU ET QUE LES RESPONSABLES SI ILS SONT CORROMPUS PAYENT LEUR MEFAITS MAIS TOUS SANS EXCEPTION JE REPETE TOUS

LA VERITE

18 h 16, le 04 mars 2019

Tous les commentaires

Commentaires (15)

  • OK VOYONS LES DOUANES ET LA MAINMISE TOTALE SUR L'AEROPORT ET LE PORT DE BEYROUTH C'EST LA OU LES MILLIARDS SONT SOIT EVAPORES OU NON ENCAISSE PAR QUI VOUS SAVEZ ET OU LES ARMES ILLEGALLES ARRIVENT PROBABLEMENT EN QUANTITE INDUSTRIELLE DE TOUTE FACON AUCUN SUJET N'EST TABOU ET QUE LES RESPONSABLES SI ILS SONT CORROMPUS PAYENT LEUR MEFAITS MAIS TOUS SANS EXCEPTION JE REPETE TOUS

    LA VERITE

    18 h 16, le 04 mars 2019

  • Ce n'est que mon humble et propre avis : le gouvernement doit faire un travail de rétrospectif, rigoureux et sincère, aidé par une commission parlementaire le plus indépendant et intègre pisdible. Aujourd'hui le plus important est de corriger ces erreurs et d'empêcher que d'autres corruptions et "magouilles" ne se répètent. Les barges de la honte (navires turcs) sur nos littorales sont encore là, pour nous rappeler ces ignominie au vu et su de tout le monde.

    Sarkis Serge Tateossian

    14 h 39, le 04 mars 2019

  • Pourquoi le Hezbollah, instrumental dans la formation de tous les gouvernements, n’a-t-il pas, alors qu’il était membre du gouvernement Siniora soulevé toutes ces questions et participé à la prise de décision alors??

    LeRougeEtLeNoir

    13 h 05, le 04 mars 2019

  • Le grand déballage qui, esperons, finira par toucher tous les corrompus et SURTOUT ceux qui, depuis des lustres, ont sucé l'Etat jusque dans la moelle et se croient protegés par la main divine.

    Remy Martin

    11 h 41, le 04 mars 2019

  • ne serait il pas mieux si le hezb optait a attaquer les sources de corruption et gaspillage actuellement que plutot de recourir inutilement a ouvrir de nouveau des anciens dossiers qui montrent l'aspect partisan de sa demarche ?

    EL KHALIL ABDALLAH

    11 h 26, le 04 mars 2019

  • En matière de justice, il est certain que ça ne peut pas parfait, mais comme commencement pour le bien du Liban on ne pouvait pas faire mieux que mettre en examen les plus ripoux du MOMENT. Que justice soit faite, le Liban ne fera pas comme la bensaoudie du charcutier , mais aboutira à ses fins whatsoever.

    FRIK-A-FRAK

    10 h 11, le 04 mars 2019

  • Une chose est sûre, pour M. Noun l'argent public dilapidé n'a pas d'odeur sinioresque!

    Tina Chamoun

    10 h 07, le 04 mars 2019

  • Plutôt que de chercher à punir les éventuels coupables passés, évertuons-nous à empêcher les certains coupables futurs. Ce sera beaucoup plus efficace. Il sera toujours temps de ressasser le passé lorsque l’urgence sera traitée.

    Gros Gnon

    09 h 34, le 04 mars 2019

  • PRIERE LIRE L,ASPECT BIEN CONNU ETC... MERCI.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 00, le 04 mars 2019

  • Timing innocent ou pas , la procédure est déclenchée, et ça ne fera que du bien si elle abouti à lyncher les coupables de tous bords . On applaudit

    Chucri Abboud

    08 h 23, le 04 mars 2019

  • Une histoire de poutre et de paille racontée par des "divins" démobilisés en manque de reconnaissance.

    Christine KHALIL

    08 h 16, le 04 mars 2019

  • Ils accumulent les erreurs, nous payons les pots cassés. Ils en sortent grandis et nous le dos courbé. Très intelligent le Siniora, ratrappé par son passé. Quoique le lynchage public, s’il est mérité ne doit pas se faire par ces bourreaux là, qui sont eux encore plus corromopus que leur victime. C’est désormais ce spectacle que le Liban à offrir. Dommage, nous avons mieux. Georges Tyan

    Lecteurs OLJ 3 / BLF

    07 h 48, le 04 mars 2019

  • CE N,EST PAS A UNE LUTTE CONTRE LA CORRUPTION QUE NOUS ASSISTONS... MAIS A UNE LUTTE REVANCHARDE QUI PREND L,ESPECT BIEN CONNU DES SABOTAGES CONTRE LES REFORMES QUE CERTAINS NE VEULENT PAS CAR ILS NE VEULENT PAS QUE LE PAYS REVIVE POUR POUVOIR ASSEOIR LEUR MAINMISE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 47, le 04 mars 2019

  • Comment cette lutte pouvait-elle sentir autrement que mauvais????

    NAUFAL SORAYA

    06 h 59, le 04 mars 2019

  • C'est triste car on constate que c'est toujours l'électricité qui coûte le plus cher à notre pays, nous payons depuis des décennies des dizaines de milliards de dollars pour une électricité qui frise le ridicule, nous sommes dans un domaine où nous jouons dans la cour des nains...digne des pays les plus pauvre de la planète. Sauf qu'avec l'argent dépensé nous pouvions construire au moins trois pu quatre centrales ultramodernes. HONTE.

    Sarkis Serge Tateossian

    02 h 06, le 04 mars 2019

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