Au terme de sa première visite au Liban depuis la formation du gouvernement Hariri III, le diplomate français chargé par le président Emmanuel Macron du suivi du processus CEDRE, l’ambassadeur Pierre Duquesne, s’est voulu rassurant quant à la validité du processus CEDRE tout en réclamant des « signaux positifs » du nouvel exécutif sur les réformes promises à la conférence de Paris, tenue en avril dernier. Beyrouth s’y était engagé à amorcer un assainissement de ses finances publiques, à réformer certains secteurs-clés comme celui de l’électricité et à engager une lutte contre la corruption ; tandis que la communauté internationale avait promis de mobiliser plus de 11 milliards de dollars pour le financement de projets d’infrastructures. « En ce qui concerne les donateurs, aucun d’entre eux n’a indiqué qu’il allait annuler les sommes promises pour le Liban. (…) Le contrat de CEDRE Projets, financements, réformes reste valable, et on en trouve la confirmation dans la déclaration ministérielle (du cabinet). On y retrouve aussi un constat : le gouvernement n’a pas le luxe du temps. Il faut avancer sur plusieurs plans », a déclaré hier M. Duquesne lors d’une conférence de presse à la Résidence des Pins. « Tout ce qui pourra être fait pas le gouvernement au cours des prochaines semaines et prochains mois à travers des décisions pour confirmer cette volonté d’avancer sera utile et même nécessaire », a encore souligné le diplomate.
Signe que les choses n’ont pas vraiment avancé depuis sa dernière visite en octobre dernier, Pierre Duquesne a réitéré les mêmes demandes d’avancées formulées à ce moment-là qu’il considère comme « simples » et « réalisables » à court terme. « La nomination des membres vacants des autorités de régulation sectorielle, dans les télécommunications, l’énergie et l’aviation civile est un dossier qui est sur la table depuis quelques mois. Il faut le faire, car sans ces nominations ces autorités ne fonctionnent pas, ces secteurs ne sont pas régulés et il n’y aura pas d’investissements dans ces secteurs », a-t-il insisté. De même pour le renforcement des moyens du Haut Conseil pour la privatisation et les partenariats (HCPP, organe rattaché à la présidence du Conseil des ministres, chargé de la mise en œuvre des partenariats public-privé). « Il faut donner au HCPP les moyens de son fonctionnement qui lui permettent de faire marcher la loi, convenable et bonne, de septembre 2017 sur les PPP », a-t-il affimé.
(Lire aussi : CEDRE : le gouvernement attendu au tournant pour le budget 2019)
« Pas laisser déraper les comptes publics »
En revanche, « il y a des choses plus complexes et difficiles qui doivent être engagées, (notamment) pour réduire le déficit public. Il faut adopter le budget pour 2019 rapidement, idéalement avant fin mars, de façon à ce que le budget de 2020 soit adopté avant la fin de l’année 2019. Le pays ne peut pas fonctionner sans budget », a recommandé M. Duquesne. Rappelant l’engagement du Liban à la CEDRE de réduire d’un point de pourcentage le ratio déficit public/PIB pendant cinq années consécutives, il a estimé que cela devait ne devrait pas se faire « d’une manière qui casserait l’économie, mais qui témoignerait tout de même d’une volonté de ne pas laisser déraper les comptes publics ». Mais s’il dit ne pas douter de cette volonté « contrairement à d’autres donateurs », le diplomate admet que la décision prise par le Conseil des ministres la veille d’augmenter les salaires des enseignants du secondaire n’était « pas vraiment un signe positif de cette volonté ».Pour réduire le déficit public, il a appelé à une réforme de la fonction publique, mais surtout à celle du secteur de l’électricité « qui est à la fois macroéconomique, sectoriel et technique, et sans quoi les investissements en infrastructures ne pourraient être effectués ». Une réforme qui devra commencer, selon lui, par une hausse des tarifs de l’électricité : « Il y a des solutions de moyen terme mais aussi d’autres de court terme, en veillant à ce qu’à terme, l’électricité soit payée à son coût, tout en soustrayant les plus démunis comme le précise la déclaration ministérielle du gouvernement. »
S’agissant de la lutte contre la corruption, Pierre Duquesne a salué l’annonce faite par le gouvernement sur l’adoption prochaine d’une stratégie nationale anticorruption. « C’est une bonne chose et la transition vers l’administration électronique est certainement un moyen de réduire la petite corruption », a-t-il suggéré.
Le diplomate a par ailleurs rappelé les trois mécanismes de suivi du processus de la CEDRE. Le premier est un site internet à destination du grand public, dédié à l’état d’avancement des réformes, des projets et de leurs financements. « Il y aura deux groupes de coordination, l’un local beyrouthin très opérationnel, et l’autre qui réunira des représentants des capitales des principaux donateurs et des organisations internationales avec une vision plus stratégique », a indiqué M. Duquesne.
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commentaires (6)
en depit du sermon - direct et precis & menacant de m. Duquesne, elle est TRES Inquietante sa phrase : "" m .Duquesne donc s’est voulu rassurant quant à la validité du processus CEDRE tout en réclamant des « signaux positifs » du nouvel exécutif sur les réformes promises à la conférence de Paris"" - DES SIGNAUX POSITIFS ? est ce adire que ce sera assez, que les sous seraient debourses aux 1ers signaux positifs, preuves de notre Bonne Volonte ? on le sait,il sera TRES AISE a nos responsables de montrer bien mieux que cela(ils en ont l'habitude quoi )! mais, et la suite ? l'execution des reformes? ne faudrait il pas attendre 1 ou 2 ans- voir qu'au moins un nombre de reformes requises ont effectivement ete mises en application, leurs resultats probants?
Gaby SIOUFI
14 h 18, le 02 mars 2019