L’opération Bouclier du Nord, entamée par Israël mardi pour faire face aux tunnels d’attaque que le Hezbollah aurait creusés sur son territoire à partir du Liban, se poursuit à vitesses variables.
Dans la nuit de dimanche, après le retrait des pelleteuses de l’armée israélienne de la zone frontalière située à hauteur de la localité libanaise de Mayss al-Jabal, où un tunnel présumé aurait été repéré, l’Agence nationale d’informations (ANI) a rapporté qu’une perceuse géante entamait des travaux un peu plus loin, au niveau de la porte de Fatmé, pour boucher un troisième tunnel sondé par l’armée israélienne. Mais aucune information de terrain n‘est venue y faire suite hier. La chaîne al-Manar s’est contentée de publier une photo, plus populaire qu’informative, prise à la frontière de Mayss al-Jabal, d’habitants se prélassant en pleine nature en fumant le narguilé sous le regard impuissant des soldats israéliens en poste de l’autre côté de la frontière. Une manière de répondre à la mise en garde que le porte-parole arabophone de l’armée israélienne Avichay Adraee avait adressée via Twitter aux habitants de la province frontalière de Kfarkila : « Les tunnels terroristes du Hezbollah sont sous vos foyers et mettent en péril vos vies que (celui-ci) prend à la légère… Ne laissez pas le terrorisme détruire vos vies. »
Le risque d’une nouvelle escalade est pris au sérieux par des observateurs du Liban-Sud.
Le chef d’état-major israélien Gadi Eisenkot a effectué une tournée d’inspection auprès de ses troupes aux frontières, a rapporté le porte-parole de l’armée israélienne.
Il s’était entretenu la veille avec le commandant en chef des Forces intérimaires de l’ONU (Finul), le général Stefano del Col, sur « la progression » de l’opération Bouclier du Nord et sollicité l’intervention de la Finul pour neutraliser les tunnels du côté libanais, en imputant par ailleurs au gouvernement libanais la responsabilité des actes du Hezbollah.
L’État libanais continue quant à lui de nier l’existence de ces tunnels, pourtant confirmée par la Finul.
(Lire aussi : Pour le Hezbollah, Israël a « peur » d’une guerre)
Elizabeth Richard à AÏn el-Tiné
Le président de la Chambre Nabih Berry a regretté hier que « malgré ses demandes répétées pour obtenir la localisation exacte de ces tunnels, il n’a toujours rien reçu ». Il se confiait ainsi à l’ambassadrice des États-Unis Elizabeth Richard, en visite à AÏn el-Tiné.
« Même lors de la réunion tripartite (de la semaine dernière entre des responsables militaires israéliens et libanais sous l’égide de la Finul) à Naqoura, le commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, n’a pas pu obtenir ces coordonnées », a précisé M. Berry en rapportant la teneur de son entretien avec la diplomate.
Accusant Israël de « ne pas respecter la résolution onusienne 1701 », il a rappelé que « 150 violations israéliennes du territoire libanais sont enregistrées chaque mois, la dernière en date étant le lancement d’un ballon gonflable au-dessus de la localité de Mayss el-Jabal, à la frontière, il y a trois jours ». « La seule solution est une application totale de la 1701 », a-t-il insisté.
Pour la Rencontre de Saydet al-Jabal, réunie hier sous la présidence de l’ancien secrétaire général du 14 Mars, Farès Souhaid, la question à poser est plutôt de savoir pourquoi l’État ne demande pas des explications au Hezbollah.
« Le président de la République et le Premier ministre, et avec eux les appareils sécuritaires officiels réunis, osent-ils demander au Hezbollah des explications sur les récents développements aux frontières ? » s’est-elle demandée dans un communiqué.
Parce que, a poursuivi le communiqué, « s’il est du devoir de l’État libanais de poursuivre Israël pour ses violations répétées de la souveraineté libanaise, aérienne, maritime ou terrestre, il est aussi de son devoir de retenir le Hezbollah » d’entraîner le Liban dans une guerre comme il l’avait fait en 2006.
« Si toutefois l’État continue de faire preuve de laxisme face au Hezbollah (…), mieux vaut alors réclamer l’annulation de la 1701, pour éviter au Liban de devoir assumer sa non-application », a conclu le texte.
Le porte-parole de l’armée israélienne a annoncé hier que l’opération Bouclier du Nord sera au cœur de la visite de responsables militaires israéliens aujourd’hui à Moscou, faisant suite à « l’accord » entre le Premier ministre israélien et son homologue russe.
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commentaires (15)
Et vous pensez que l'état peut demander au Hezbollah des réponses vous faites rire les poules?
Eleni Caridopoulou
18 h 15, le 19 décembre 2018