Rechercher
Rechercher

À La Une - crise des déchets

Manifestation contre les incinérateurs à Beyrouth : "Vous nous avez asphyxiés, ça suffit !"

La manifestation, organisée par six collectifs de la société civile, intervient trois ans exactement après une crise des déchets d'une gravité inédite, qui a frappé le pays durant l'été 2015.

Des centaines de personnes ont répondu à l'appel de la société civile et ont manifesté mercredi après-midi devant le siège du Conseil municipal de Beyrouth pour protester contre la construction d'incinérateurs. Photo Matthieu Karam.

Des centaines de personnes ont répondu à l'appel de la société civile et ont manifesté mercredi après-midi devant le siège du Conseil municipal de Beyrouth pour protester contre la construction d'incinérateurs. Elles se sont ensuite dirigées vers le ministère de l'Environnement. La manifestation intitulée "Vous nous avez asphyxiés, ça suffit !", est organisée par six collectifs, "Vous Puez !", "Beirut Madinati', "Li Baladi", "Mon droit - Chouf-Aley 2018", "L'Observatoire populaire pour la lutte anti-corruption" et "La coalition pour la gestion des déchets". Elle intervient trois ans exactement après une crise des déchets d'une gravité inédite, qui a frappé le Liban durant l'été 2015.

"Vous nous avez asphyxiés, nos enfants sont soit sans travail soit émigrés, nous payons des factures deux fois, notre poubelle est comme notre eau, notre électricité comme votre comportement (...) Par votre politique et votre comportement vous nous avez asphyxiés", a déclaré Wassef el-Haraké s'exprimant au nom des six collectifs.  "Les alternatives existent, nous en avons parlé avec les responsables, mais malgré cela ils tiennent aux incinérateurs. Si un incinérateur est construit à Medawar comme il se dit, cela voudra dire qu'il y en aura partout au Liban, a-t-il mis en garde. Aujourd'hui nous adoptons des solutions mauvaises pour l'environnement et la santé. Cela fait 18 ans que vous suivez un plan d'urgence pour les déchets est-ce qu'un seul pays au monde suit un plan d'urgence durant 18 ans ? Le problème des déchets n'est pas un réel problème de déchets c'est une question politique. Arrêtez les appels d'offres des incinérateurs !, a-t-il lancé. Commencez à diminuer la quantité de déchets en diminuant les sacs en plastique par exemple, faites le tri à la source, (...). Nous allons utiliser tous les moyens légaux pour vous empêchez d'exécuter vos décisions !".


(Lire aussi : À Amroussiyé, le centre de tri... où l’on ne trie pas)


Selon notre collègue Suzanne Baaklini, des slogans assez agressifs contre les incinérateurs étaient lancés lors de la manifestation. Sur des affiches l'on pouvait lire : "Je compte mes jours" ou voir des photos du drapeau libanais avec un incinérateur à la place du cèdre. 

Ghassan Salamé du collectif Beirut Madinati a affirmé à L'Orient-Le Jour qu'il faut "aujourd'hui  faire échouer ce projet d'incinérateur, car il est très dangereux surtout dans le cadre d'un manque total de transparence". "Nous discuterons des autres solutions pour les déchets après, mais pour l’instant il faut faire échouer ce projet", a-t-il ajouté. 


(Lire aussi : L’article de « L’OLJ » sur le centre de tri de Amroussiyé mis à la disposition du parquet)


"Cela fait vingt ans que nous souffrons de la crise des déchets", avaient écrit les collectifs sur la page de l'événement sur Facebook. "Tous les gouvernement ont échoué à trouver une solution environnementale, saine et durable à cette crise, car les seules solutions qu'ils adoptent sont celles qui consacrent le partage des parts et les pots de vin. En 2015, ils nous ont enterrés dans les ordures et nous leur avons fait face dans la rue. Ils nous ont promis une solution, et cela fait trois ans que nous patientons. Mais tout ce qu'ils ont fait, c'est couvrir de déchets la mer, les fleuves et les montagnes, en détruisant l'environnement. (...) Aujourd'hui, ils veulent nous imposer les incinérateurs. Le marché des incinérateurs ne passera pas. Vous nous avez asphyxiés, ça suffit !".

Le 26 juillet, des députés avaient adopté en commission parlementaire mixte une loi ouvrant la voie à la construction d'incinérateurs, au grand dam de plusieurs de leurs collègues, notamment Samy Gemayel et Élias Hankache pour les Kataëb, et Paula Yacoubian, issue de la société civile. Cette loi définit un cadre juridique concernant les appels d'offres sur la mise en place de ces incinérateurs de déchets solides et d'usines de transformation "waste to energy" (récupération des gaz pour la production d’énergie), à laquelle s'opposent les écologistes et les riverains potentiels de ces installations, notamment en raison de la toxicité des rejets et des risques de pollution qu'elles pourraient engendrer en cas de mauvaise application de la technologie. Le lendemain, le ministre sortant de l'Environnement, Tarek el-Khatib, avait salué le "sens des responsabilités" des députés qui ont adopté la loi.

L'option des incinérateurs a toujours été privilégiée par le gouvernement comme solution à long terme, faisant l'objet d'une décision gouvernementale datant de 2010 mais pas encore mise en application. Les cabinets successifs ont adopté au fil des années des mesures temporaires dont l'installation de décharges côtières à Bourj Hammoud et à Costa Brava, respectivement au nord et au sud de Beyrouth. Ces mesures sont contestées par les Kataëb, la société civile et les écologistes. Ces derniers mois, les Kataëb et Mme Yacoubian ont effectué des opérations coup de poing pour sensibiliser contre le danger que constituent ces décharges.

Le 31 juillet, le conseil municipal de Beyrouth avait tenu une réunion autour du cahier des charges du futur incinérateur qu'il compte installer. Toutefois, le document n'a pas été adopté comme cela était prévu, en raison notamment d'une opposition interne à certains points figurant dans le texte. Au final, le conseil municipal a décidé de demander au bureau international de consultants Rambol, qui a rédigé le cahier des charges, d'inclure des mesures de contrôle plus strictes en vue de dissiper les craintes exprimées autour du projet. L’appel d’offres vise à confier la construction et le fonctionnement de l’incinérateur à une société privée. Ce cahier des charges devra encore être approuvé par le ministère de l’Intérieur puis par le Conseil des ministres avant d’être opérationnel.


(Lire aussi : « Il n’y aura pas d’incinérateurs, alors réfléchissez aux alternatives », lance Paula Yacoubian)


Quelques heures avant la manifestation, le Conseil municipal de Beyrouth a une nouvelle fois défendu le projet d'incinérateurs de déchets, qu'ils a présenté comme "la solution applicable la plus optimale à la crise des déchets".  "Le conseil municipal est jusqu'à présent la seule instance à avoir pris en charge la problématique des déchets et pris l'initiative de développer un plan complet, basé sur des études scientifiques", peut-on lire dans le communiqué, dans lequel il est rappelé que ce plan comprend "le tri des déchets à la source et dans une usine, le traitement de ces déchets et l'incinération". Le conseil municipal a estimé qu'"une crise de cette ampleur doit être résolue de manière scientifique, avec des experts et non pas dans la rue", soulignant qu'aucun autre plan clair n'a été présenté pour résoudre cette problématique. Le conseil municipal ajoute que "toutes les phases du plan qu'il a présenté représentent la solution applicable la plus optimale à la crise des déchets". 



Repère

Gestion des déchets ménagers au Liban : retour sur un terrible fiasco

Lire aussi

Déchets : le centre de tri de Bickfaya partage son expérience avec d’autres municipalités

Une nouvelle crise de déchets en perspective au Liban ?    

Des centaines de personnes ont répondu à l'appel de la société civile et ont manifesté mercredi après-midi devant le siège du Conseil municipal de Beyrouth pour protester contre la construction d'incinérateurs. Elles se sont ensuite dirigées vers le ministère de l'Environnement. La manifestation intitulée "Vous nous avez asphyxiés, ça suffit !", est organisée par six collectifs,...

commentaires (3)

Avec recul et loin de la politique politicienne locale. Il faut savoir qu'aucune solution ne peut satisfaire toutes les parties et toutes les corporations, partis politiques ou autres représentations. Il faut savoir trancher vite (assez de temps perdu depuis de longues années) et opter pour la ou les solutions la moins nocive. On peut se raconter des histoires autant que l'on veut concernant les incinérateurs... Personne ne détiendra une vérité absolue les concernant! C'est trop technique et il faut savoir faire confiance à la technologie qui a fait ses preuves en Europe. Je parle en connaissance de cause, si notre pays se dote d'un ou des incinérateurs aux normes européennes, (standard et qualité hautement apprécié et respectueux de l'environnement) on finira avec ces interminables calamités et humiliations. (Sentir les déchets nocifs à tout bout de champ), n'est pas acceptable! Il faut savoir accepter une décision d'intérêt collectif et arrêter de croire toujours que notre connaissance est toujours au-dessus des autres.

Sarkis Serge Tateossian

22 h 33, le 29 août 2018

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Avec recul et loin de la politique politicienne locale. Il faut savoir qu'aucune solution ne peut satisfaire toutes les parties et toutes les corporations, partis politiques ou autres représentations. Il faut savoir trancher vite (assez de temps perdu depuis de longues années) et opter pour la ou les solutions la moins nocive. On peut se raconter des histoires autant que l'on veut concernant les incinérateurs... Personne ne détiendra une vérité absolue les concernant! C'est trop technique et il faut savoir faire confiance à la technologie qui a fait ses preuves en Europe. Je parle en connaissance de cause, si notre pays se dote d'un ou des incinérateurs aux normes européennes, (standard et qualité hautement apprécié et respectueux de l'environnement) on finira avec ces interminables calamités et humiliations. (Sentir les déchets nocifs à tout bout de champ), n'est pas acceptable! Il faut savoir accepter une décision d'intérêt collectif et arrêter de croire toujours que notre connaissance est toujours au-dessus des autres.

    Sarkis Serge Tateossian

    22 h 33, le 29 août 2018

  • ON RECOLTE CE QU,ON SEME ! DES ABRUTIS QU,ON ENVOIE A LA GROTTE ALIBABIENNE QUE PEUT-ON ATTENDRE AUTRE QUE DES CONNERIES ?

    JE SUIS PARTOUT CENSURE POUR AVOIR BLAMER GEAGEA

    21 h 47, le 29 août 2018

  • Prendre les memes. Recommencer. A quoi faut il s'attendre? Libanais, mes chers freres, arreter de vous lamenter. Vous avez voulu ces politiciens. Vous les avez elu. Vous continuez a les elire. A quoi vous attendez-vous?? Ce n'est plus de l'idiotie. Ce n'est plus de l'imbecilite. C'est de la COMPLICITE ET ASSOCIATION AVEC MALFAITEURS.

    sancrainte

    20 h 19, le 29 août 2018

Retour en haut