
Marc Daou, député druze de Aley, dans son bureau à Gemmayzé. Photo Zeina Antonios
Candidat à l’un des sièges druzes de Aley, il a créé la surprise en détrônant Talal Arslane, une des figures de proue du système décrié par le soulèvement populaire d’octobre 2019. Marc Daou, qui a cofondé le parti Takaddom en novembre 2019 avec plusieurs activistes de la société civile, a été élu haut la main avec 11 656 voix, le score le plus élevé du caza. Un résultat auquel il ne s’attendait pas, mais qu’il assume pleinement, lui qui s’était déjà porté candidat en 2018, sans succès à l’époque.
« Je savais que notre liste allait avoir des scores élevés, mais être premier à Aley était une surprise », reconnaît Marc Daou. Diplômé de l’Université américaine de Beyrouth et de la London School of Economics and Political Sociology, ce publicitaire et professeur d’université est persuadé que la réforme est déjà amorcée. « L’opinion publique s’est prononcée en faveur d’un changement radical dans le pays. Il est temps de tourner la page et de commencer une nouvelle phase politique, loin de la logique de la guerre civile et du partage du gâteau », confie le député élu à L’Orient-Le Jour.
Tenue décontractée et cheveux indisciplinés, ce jeune célibataire de 43 ans, qui milite dans les milieux politiques depuis les années 90, se prépare à entrer de plain-pied au Parlement. Entouré d’une équipe de jeunes issus de toutes les communautés, il peaufine les moindres détails dans son bureau situé dans un immeuble à caractère traditionnel à Gemmayzé. « On se réunit tous les matins avec les membres de l’équipe. Ensuite, nous organisons des rencontres avec des électeurs et des interviews avec la presse. Le soir, je consacre un bon moment à répondre aux nombreux appels et messages que je reçois », raconte-t-il. Sa victoire, Marc Daou la doit à la thaoura, « qui a remporté la bataille », selon lui. « Le 17 octobre 2019 (date du soulèvement populaire) a changé la donne. Avant, on faisait la guerre au système pour obtenir des réformes. Aujourd’hui, on veut tout simplement en finir avec le système », lance le nouveau député de Aley.
Son parti, Takaddom, prône le renforcement de la souveraineté du pays, le désarmement du Hezbollah et l’établissement d’un État laïc au Liban. Sur le plan socio-économique, Takaddom appelle à freiner l’effondrement économique à travers la levée du secret bancaire, l’audit juriscomptable, le contrôle des capitaux ou encore la restructuration du secteur bancaire.
« Futur leader politique »
Attiré depuis son entrée à l’université par l’activisme politique, Marc Daou s’était déjà pleinement engagé dans la bataille pour l’indépendance lancée dès le début des années 2000 aux côtés du journaliste Samir Kassir, assassiné à Beyrouth en juin 2005, en pleine révolution du Cèdre. « En 2004, Samir travaillait à mettre en place un parti laïc (le parti de la Gauche démocratique). Des réunions se tenaient chez nous », raconte sa veuve, la journaliste Gisèle Khoury. « Un jour, Samir m’a présenté un de ses compagnons de lutte et m’a annoncé que j’allais être témoin de la naissance d’un futur leader politique. Le jeune homme en question s’appelait Marc Daou », poursuit Mme Khoury, qui a publié ce témoignage sur les réseaux sociaux, quelques heures après l’annonce des résultats.
Pour la chercheuse Laury Haytayan, coordinatrice générale du parti Takaddom, Marc Daou est l’homme de la situation, « capable de communiquer avec les gens, tout en gardant un œil sur ses dossiers ». « J’ai fait sa connaissance en 2013 à Riad el-Solh, à Beyrouth, pendant les manifestations contre la prorogation du mandat du Parlement. Nous avons continué à militer ensemble en 2014 puis en 2015, lors de la crise des déchets. En 2018, nous avons mené les législatives chacun de son côté », se rappelle Mme Haytayan. Elle rend hommage à celui qui est devenu un ami. « Malgré son emploi du temps chargé, il n’a pas hésité à prendre le temps de m’appeler pour me prodiguer des conseils pour ma campagne électorale », confie la chercheuse à L’OLJ. « Marc a beaucoup travaillé pour en arriver là, il n’a pas été parachuté à la députation. Il est proche des gens et connaît bien leurs problèmes. Je pense qu’il est là où il faut maintenant », souligne-t-elle.
Risques sécuritaires
S’il est heureux d’avoir enfin accédé à la députation à Aley, Marc Daou n’en est pas moins conscient des risques sécuritaires qu’il encourt. En janvier 2021, il avait retrouvé une balle de Kalachnikov placée sur le pare-brise de sa voiture, une menace de mort à peine voilée. Il avait confié à l’époque à notre journal avoir fait l’objet de toutes sortes de menaces, liées selon lui à son engagement pendant le soulèvement populaire ainsi qu’à ses multiples critiques des partis au pouvoir, notamment le Hezbollah.
« Les milices sont prêtes à en arriver au meurtre, mais tant que nous restons soudés, il y a un espoir de changement. Depuis l’assassinat de Lokman Slim (en février 2021 dans le sud du pays), nous savons très bien à qui nous avons affaire. Malgré tout, il est important d’avoir le courage nécessaire pour leur faire face », reconnaît Marc Daou. Un risque sécuritaire accru au vu de certaines batailles que l’élu entend mener, telle la candidature de Nabih Berry à la tête du Parlement. « La Constitution ne précise pas la confession du président de la Chambre. N’importe quel député peut donc accéder à cette fonction », indique M. Daou. Il ajoute : « Un gouvernement d’union nationale n’est pas envisageable. Il vaut mieux former un cabinet de technocrates indépendants. »
Le nouveau député ne se fait pas d’illusion quant à l’animosité du camp adverse. « Les partis au pouvoir seront dérangés par notre présence parce que nous ne rentrons dans aucun moule confessionnel. Nous ne sommes pas non plus liés à des pays étrangers comme eux. Nous représentons un nouveau système qui fait face à la classe au pouvoir. Ce n’est qu’une affaire de temps avant qu’ils ne perdent davantage de privilèges », conclut-il.
On vous supplie de ne pas décevoir ce peuple tellement tourmenté, appauvri, exploité depuis des années. Ne nous décevez pas, vous ainsi que tous ces nouveaux venus, nos héros. Réunissez vos voix au moins pour les 3 épreuves à venir. Vous êtes notre seul espoir pour au moins déstabiliser cette entreprise qui va dans sa grande majorité réunir leurs voix malgré toutes les apparences. Car ils vous craignent. Ne vous laissez pas tenter par les spécimens comme Kaa le python de la jungle qui va essayer d’étouffer ou de séduire les nouveaux venus. J’ai bien apprécié le refus de l’offre un peu déplacée de la chaîne MTV que je privilège normalement pour ses bons interviewers et le choix bien varié des invités contrairement à quelques autres stations qui se limitent à des porte-paroles du même clan et des interviewers plus cancaniers qu’informatifs niveau Kindergarten. N’acceptez de personne des aides, des bureaux. Oui on devient bien méfiant même quand les intentions sont bonnes. Ne dépendez de personne. Un peuple tout entier vous sera reconnaissant pour votre action innovatrice. David contre Goliath oui, mais le chemin de mille miles commence par un pas et une grande majorité soutient David si minuscule soit-il alors que Goliath est entrain de se disséquer lui-même avec des incertitudes des révélations, des trahisons. Courage, on compte sur vous ainsi que tous vos pareils nos nouveaux élus, nos héros.
23 h 13, le 28 mai 2022