L’ambassadeur de Russie au Liban Alexandre Rodakov, lors d’une conférence de presse à Beyrouth, le 27 février 2022. Photo Reuters/Ahmad al-Kerdi
L’ambassadeur de Russie au Liban Alexandre Rodakov a affirmé dimanche que la position officielle libanaise, qui avait condamné l'invasion russe de Ukraine, "n'influera pas beaucoup sur les relations bilatérales entre les deux pays", critiquant toutefois qu'elle "ne prenne pas en compte les relations amicales qui les lient".
Jeudi, le ministère libanais des Affaires étrangères avait "condamné l'invasion des terres ukrainiennes et appelé la Russie à arrêter ses opérations militaires sur-le-champ, à retirer ses forces et à recourir au dialogue et aux négociations comme moyen idéal pour résoudre le conflit en cours". Une position qui a subi aussitôt le feu des critiques sur la scène locale et dont plusieurs parties s'étaient démarquées.
Vendredi, l'ambassade de Russie avait exprimé sa "surprise face au communiqué du ministère libanais des Affaires étrangères" et estimé qu’il "enfreint la politique de distanciation et prend position dans le cadre de ces événements, bien que la Russie n'a jamais épargné ses efforts pour contribuer au redressement et à la stabilité du Liban". Une prise de position qui a fait craindre des répercussions inquiétantes à Beyrouth, notamment sur le plan économique, vu que le Liban dépend à 50% du blé russe et ukrainien.
"Je ne pense pas qu'un communiqué puisse influencer beaucoup les relations bilatérales entre la Russie et le Liban", a affirmé M. Rodakov au cours d'une conférence de presse. "Durant les moments difficiles, nous savons qui est avec nous et qui est contre nous", a-t-il toutefois lâché. Selon lui, le document libanais "ne prend pas en compte les relations amicales et historiques entre les deux pays".
Revenant sur la crise, l'ambassadeur a souligné que "la Russie n'adopte pas de politique hostile à l'égard de l'Ukraine mais exerce son droit légal dans la protection de la sécurité de sa nation et de ses citoyens russes à Donetsk et de Lougansk". Il a également rappelé que son pays "avait à maintes reprises appelé à l'exécution de l'accord de Minsk". "Nous ne sommes pas en guerre, mais face à une opération particulière qui a des buts précis", a-t-il insisté, notant que "celle-ci ne vise pas le peuple ukrainien".
Dimanche, le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, s'est démarqué de la position officielle libanaise et s'est contenté d'appeler à "résoudre les conflits à travers le dialogue".
Le Hezbollah fustige la position libanaise
Des responsables du Hezbollah ont par ailleurs fustigé dimanche la position officielle libanaise et dénoncé l'ingérence américaine dans le conflit russo-ukrainien.
Le cheikh Nabil Kaouk, membre du Conseil central du parti chiite, a estimé que les Américains ont fourvoyé l'Ukraine puis délaissée". Il a dans ce cadre exprimé l'espoir que les prochaines législatives permettront de "libérer le Liban des commandements américains et saoudiens".
De son côté, le député du Hezbollah Hassan Fadlallah a estimé que "la position du Liban nécessitait une étude attentive au sein du gouvernement, conformément aux normes, vu que le Liban entretient des relations avec la Russie et l'Ukraine", et "un langage diplomatique qui lui permette de traiter avec les deux parties, mais aussi de prendre des initiatives positives aux niveaux politique et humanitaire". Il a par ailleurs estimé que "l'administration américaine est en grande partie responsable de ce qui arrive au peuple ukrainien" et mis en garde contre "les dangers de son ingérence au Liban".
Hébergement de Libanais à Varsovie
L'offensive russe en Ukraine, qui a fait au moins 64 morts parmi les civils et près de 200 blessés, a entre-temps bloqué nombre de Libanais dans ce pays. A Moscou, les autorités locales poursuivent leurs efforts afin de les rapatrier via les pays voisins.
Dimanche, le secrétaire général du Haut comité de secours, le général Mohammad Kheir, a affirmé qu'un accord a été conclu avec les autorités polonaises, en coordination avec l'ambassade de Liban à Varsovie, visant à regrouper et héberger les Libanais en provenance d'Ukraine au centre de "L'association d'amitié avec les enfants", dans le quartier de Wzycolenia 31, situé dans la capitale polonaise. Les personnes souhaitant s'y réfugier sont appelées à se connecter sur le site du centre ou à appeler le 00 22 7826843 - 509 673 133. M. Kheir a également indiqué que le rapatriement des Libanais qui ont trouvé refuge en Pologne débutera dès le 4 mars. Les frais des vols seront pris en charge par l'Etat, a-t-il ajouté.
De son côté, l'Association des parents d'étudiants libanais à l'étranger a appelé le ministère des Affaires étrangères et le gouvernement à entamer des négociations avec l'ambassade de Russie, afin d'ouvrir un passage sûr aux étudiants et expatriés qui se trouvent dans des villes de l'est de l’Ukraine pour qu'ils soient évacués à travers la frontière russo-ukrainienne.
Ces mesures interviennent après que le ministre des Affaires étrangères Abdallah Bou Habib a chargé le Haut comité de secours de s'assurer du rapatriement des Libanais réfugiés en Pologne et en Roumanie. Le ministère des AE avait également annoncé que les Libanais bloqués en Ukraine seront autorisés à traverser la frontière vers la Pologne. Les autorités roumaines fourniront pour leur part un hébergement, de la nourriture et une assistance médicale pour une période de 24 à 48 heures aux personnes venant d'Ukraine.
Vendredi, l'ambassadeur du Liban à Kiev, Ali Daher, avait affirmé que des efforts étaient en cours pour assurer des bus afin d'évacuer vers la Pologne les Libanais coincés en Ukraine. Pour les ressortissants qui souhaitent quitter le pays et qui ont rempli le formulaire en ligne dédié, "des bus les transporteront à la frontière polonaise (...) Ils devront quitter la Pologne sous quinze jours", avait-il noté.
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MITEL EL DRAT 3ALA ILBLAT!
IMB a SPO
13 h 47, le 28 février 2022