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Politique - Crise Ukraine/Russie

Aoun se démarque de la position officielle libanaise et se contente d'un appel au dialogue

"La seule situation qui pourrait faire craindre un report des élections est le boycott sunnite", affirme le chef de l'Etat.

Aoun se démarque de la position officielle libanaise et se contente d'un appel au dialogue

Le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, au palais présidentiel de Baabda, le 7 avril 2021. Photo Dalati et Nohra

Le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, s'est démarqué dimanche de la position officielle libanaise qui avait explicitement condamné l'invasion russe en Ukraine, et s'est contenté d'appeler à "résoudre les conflits à travers le dialogue", alors que Moscou et plusieurs parties locales ont vivement critiqué cette déclaration.

Au sujet du scrutin législatif prévu le 15 mai prochain, M. Aoun a affirmé que "la seule situation qui pourrait faire craindre un report des élections est le boycott sunnite", une hypothèse qui plane toujours suite au retrait de la vie politique de l'ancien Premier ministre et chef du Courant du Futur, Saad Hariri.

Jeudi, le ministère libanais des Affaires étrangères avait "condamné l'invasion des terres ukrainiennes et appelé la Russie à arrêter ses opérations militaires sur-le-champ, à retirer ses forces et à recourir au dialogue et aux négociations comme moyen idéal pour résoudre le conflit en cours". Cette position a subi aussitôt le feu de critiques sur la scène locale et certaines parties s'en étaient démarquées. 

"La position du Liban est claire quant à la nécessité de résoudre les conflits à travers le dialogue, notamment parce que le pays a connu des conflits, des confrontations et des incidents sécuritaires difficiles qui se sont terminés grâce au dialogue", a indiqué M. Aoun dans un entretien accordé à Assas media. "Le Liban est en faveur de négociations politiques pour résoudre le conflit entre la Russie et l'Ukraine, suivant les principes fixés par la charte des Nations unies et les lois internationales qui prônent les moyens pacifiques pour résoudre les conflits entre les pays". 

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De son côté, l’ambassadeur de Russie à Beyrouth, Alexandre Rodakov, a affirmé dimanche que la position du Liban "n'influera pas beaucoup sur les relations bilatérales entre les deux pays", critiquant toutefois le fait qu'elle "ne prenne pas en compte les relations amicales qui les lient".

Dans certains milieux, on estime que la position officielle libanaise s’inscrit dans une volonté du chef de l’Etat de tendre une perche à Washington en espérant que les Etats-Unis lèveront les sanctions qui frappent son gendre, le chef du Courant patriotique libre (CPL) et député Gebran Bassil, bien que celui-ci ait démenti ces allégations. C’est pour les mêmes raisons de complaisance vis-à-vis de Washington que les adversaires de M. Aoun le soupçonnent d’avoir opéré une volte-face sur la question de la démarcation de la frontière maritime avec Israël. 

Frontière maritime
Le président Aoun avait revu les prétentions du Liban à la baisse au niveau du tracé de la frontière, revenant sur une surenchère qu’il avait lui-même alimentée pendant plusieurs mois. Il revendique dorénavant uniquement la ligne 23, une réclamation officielle du Liban depuis 2011 qui lui permet de revendiquer 860 km2 de la zone disputée avec l’État hébreu. Les négociations sont interrompues depuis décembre 2020 parce que le président avait opté pour des demandes maximalistes : la ligne 29 qui lui donne 1 430 km2 supplémentaires. Il avait refusé, par la suite, de signer l’amendement du décret 6433 auprès des Nations unies, condition sine qua non pour officialiser cette requête.

"Nous avons tenu à la ligne 29 lors des négociations et Israël a tenu à la ligne 1. Le deux lignes sont systématiquement tombées et les négociations ont été arrêtées", a expliqué le chef de l'Etat. "Nous n'avons pas de temps à perdre", a-t-il précisé, insistant sur "la nécessité de reprendre les négociations" et de "préserver le droit du Liban au forage". Le président a noté que "les négociations sont bloquées au niveau du refus du Liban de se diviser le champ Cana (qui part de la ligne 23 et s’étend plus au sud, ndlr) avec Israël". Il a enfin affirmé "attendre que l'émissaire américain Amos Hochstein lui envoie une proposition finale après avoir terminé ses négociations avec la partie israélienne".

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M. Hochstein avait effectué, il y a trois semaines, une visite de deux jours à Beyrouth pour relancer les pourparlers indirects entre le Liban et Israël autour de la délimitation de leur frontière maritime et s'était dit "très optimiste", affirmant que le processus se trouvait dans la phase de "comblement des lacunes, pour aboutir à un accord".

Abordant la position du parti chiite pro-iranien dans ce dossier, le chef de l'Etat a estimé que "le Hezbollah agit avec logique". Le Hezbollah "a laissé le gouvernement traiter ce dossier et soutiendra ce qui sera décidé à ce sujet au vu des négociations et de la ligne officielle qui sera adoptée, qu'il s'agisse de la ligne 23 ou d'une autre", a indiqué M. Aoun. 

Législatives et boycott sunnite
Interrogé au sujet d'une "expiration" de l'entente de Mar Mikhaël, scellée entre le Hezbollah et M. Aoun en 2006, et d'une rupture de l'alliance avec le parti chiite, M. Aoun a affirmé qu'"isoler le Hezbollah entraînera une guerre civile". Les deux alliés, qui entretiennent actuellement des liens assez tendus, avaient dernièrement souligné la nécessité d'améliorer cet accord, notamment en amont des législatives.

"Je dors tranquillement parce que j'ai accompli tout ce qu'il fallait faire pour organiser les législatives. Si quelqu'un veut bloquer leur tenue, cela ne me concerne pas", a dit M. Aoun. Selon lui, "la seule situation qui pourrait faire craindre un report des élections est le boycott sunnite". "Nous ne pouvons supporter de boycott sunnite. Nous avons vu ce qui s'est passé en 1992", a-t-il souligné. En 1992, les élections législatives s’étaient déroulées sous occupation syrienne au Liban, à la sortie d'une guerre civile de 15 ans. Les partis politiques les plus représentatifs sur la scène chrétienne avaient alors boycotté le scrutin, avec l’approbation du patriarcat maronite de Bkerké.

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La décision de retrait de Saad Hariri a mis dans l’embarras différents partis et alliés potentiels. Si l'ancien ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, et l'ancien Premier ministre Tammam Salam, connu pour sa proximité avec M. Hariri, avaient annoncé renoncer à briguer un siège au Parlement, le Premier ministre Nagib Mikati et l'ancien Premier ministre Fouad Siniora avaient affirmé, pour leur part, qu'ils n'appelleront pas à un boycott sunnite des législatives. Le frère de M. Hariri, Baha’ Hariri, avait pour sa part annoncé que son mouvement, Sawa li Lubnan, présentera une trentaine de candidats aux législatives, sans toutefois confirmer sa propre candidature.

Le président Aoun est enfin revenu une nouvelle fois à la charge contre le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, et l'a appelé "à dévoiler aux Libanais où se trouvent leurs dépôts". "Cela me fait mal au cœur", a noté le président, en abordant "ce qu'a commis M. Salamé à l'égard des Libanais", soulignant la nécessité que "les lois soient appliquées". 

Les milieux de la présidence de la République et du camp aouniste ont intensifié ces dernières semaines leur campagne visant à limoger le gouverneur de la BDL, poursuivi dans le cadre de plusieurs enquêtes. 

Le chef de l'Etat libanais, Michel Aoun, s'est démarqué dimanche de la position officielle libanaise qui avait explicitement condamné l'invasion russe en Ukraine, et s'est contenté d'appeler à "résoudre les conflits à travers le dialogue", alors que Moscou et plusieurs parties locales ont vivement critiqué cette déclaration.Au sujet du scrutin législatif prévu le 15 mai prochain, M....

commentaires (6)

Les sunnites ont bien entendu le message. Il veut leur faire porter le chapeau de la destruction du pays maintenant qu’il l’a achevé. Alors si les sunnites continuent à ne pas se mettre d’accord pour contrer ses projets ce sera du pain béni pour toute cette clique et le premier ennemi du peuple sera tout désigné pour disculper tous les pourris qui ont mené notre pays à l’enfer pour le caprice d’un autre rejeton qui n’a pas été à la hauteur de son héritage et qui veut le déluge pour éteindre le feu de l’enfer alors que ce sera du pareil au même, cad la fin de notre nation. Réveillez-vous chers leaders sunnites et combattez le mal par le bon sens pour sauver notre pays qui est aussi le votre et qui exige une union sacrée pour sortir de ce piège mille fois tendu dans lequel vous tombez à chacune de leur tentative.

Sissi zayyat

11 h 08, le 28 février 2022

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Commentaires (6)

  • Les sunnites ont bien entendu le message. Il veut leur faire porter le chapeau de la destruction du pays maintenant qu’il l’a achevé. Alors si les sunnites continuent à ne pas se mettre d’accord pour contrer ses projets ce sera du pain béni pour toute cette clique et le premier ennemi du peuple sera tout désigné pour disculper tous les pourris qui ont mené notre pays à l’enfer pour le caprice d’un autre rejeton qui n’a pas été à la hauteur de son héritage et qui veut le déluge pour éteindre le feu de l’enfer alors que ce sera du pareil au même, cad la fin de notre nation. Réveillez-vous chers leaders sunnites et combattez le mal par le bon sens pour sauver notre pays qui est aussi le votre et qui exige une union sacrée pour sortir de ce piège mille fois tendu dans lequel vous tombez à chacune de leur tentative.

    Sissi zayyat

    11 h 08, le 28 février 2022

  • "… "La seule situation qui pourrait faire craindre un report des élections est le boycott sunnite", affirme le chef de l'Etat …" - Ça c’est de la politique de très haut niveau. Au dessus c’est le soleil. Prenez-en de la graine les jeunes. Dire qu’on est contre le report des élections législatives, et en même temps donner mine de rien la recette de son report, sans cligner du regard, c’est tout un art. Fort. Très fort. La première fois c’était "le manque de fonds pour organiser les législatives", mais ça a été éventé trop vite. Bon, il reste toujours le joker des "mégacentres" au cas où…

    Gros Gnon

    21 h 34, le 27 février 2022

  • Il change d'avis comme change de couleur un caméléaoun...

    Gros Gnon

    21 h 00, le 27 février 2022

  • En tant que président de la République, il ne doit pas ignorer où se sont volatilisés les dizaines de milliards de dollars.. Au moins, ses conseillers savent bien. Il est évident que Salamé ne les a pas englouti ! Et cette assiette ne sert plus...

    Esber

    17 h 13, le 27 février 2022

  • Je suis tellement soulagé d'apprendre que notre président chéri dort tranquillement car c'est également mon cas alors que je n'ai rien fait pour les législatives! Lorsque l'on lit le titre de l'article, on peut penser qu'il y a une cohabitation à la tête du pays. Est-ce le cas? Je l'ignorais si tel devait être le cas. Je suis d'accord (comme toujours) avec Michel Aoun : il faut que Salamé nous dise où se trouve l'argent des Libanais et s'il pouvait commencer par les politiques ça serait pas mal.

    Georges Olivier

    17 h 13, le 27 février 2022

  • Il n'y a pas de boycott sunnite. Aoun cherche quoique ce soit pour perturber l'échéance électorale. En 1992, il y avait un boycott chrétien, et des élections ont eu lieu avec des députés qui ont occupé leurs sièges pendant 4 ans..

    Esber

    17 h 03, le 27 février 2022

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