Depuis quarante-quatre ans, depuis ce funeste 13 avril 1975, chaque 13 avril s’impose comme une date anniversaire, engageant une réflexion sur cette guerre qui a ravagé le Liban pendant quinze ans, plongeant dans le désarroi un peuple qui a certes pansé certaines de ses blessures, mais n’a pas réussi à surmonter les clivages entre ses composantes. Des clivages socio-communautaires aux racines profondes illustrant une crise existentielle qui a pavé la voie, au fil des ans, à la conflagration du 13 avril 1975, à l’instar des interférences régionales liées aux débordements des organisations palestiniennes armées, lesquelles s’étaient implantées militairement dans le Arkoub, au Liban-Sud, à partir de la fin des années 60 et jusqu’au retrait de l’OLP en 1982.
Le 13 avril 1975 aura été ainsi l’aboutissement d’un long processus de déstabilisation et de crises en cascade dont les effets se font ressentir jusqu’à nos jours, notamment au niveau de l’État qui demeure disloqué et affaibli et qui, quarante-quatre ans plus tard, n’a pas encore su s’imposer comme une autorité centrale forte.
Les retombées de ces guerres successives sont même manifestes au plan culturel. Pour s’en convaincre, il suffit de se plonger dans les archives de L’Orient-Le Jour pour revivre, le temps d’une lecture, ce à quoi ressemblait la scène culturelle au Liban en cet avril 1975 sur les plans du cinéma, du théâtre, dans les galeries ou au musée.
Comment parler de la guerre civile sans parler de la mémoire ? Plus de quatre décennies après son commencement, la guerre « civile » libanaise donne encore à voir un contraste saisissant entre, d’une part, la présence toujours virulente de certains de ses stigmates (architecturaux, politiques etc.) et, d’autre part, son absence des manuels scolaires et la relative pauvreté de la réflexion historique et historiographique à son sujet, nous dit Dima De Clerck, chercheuse associée à l’Institut français du Proche-Orient et enseignante en histoire à l’USJ et l’ALBA. Et s'il fallait encore une preuve du fait que le rapport à la mémoire reste tourmenté, au Liban, les difficultés rencontrées par Marwan Chahine, lors de son enquête sur ce qui s'est passé, exactement, le 13 avril 1975, en sont une.
Plus de quatre décennies après son commencement, nous vous invitons donc à revenir, avec nous, sur l'Histoire de la guerre. Celle qui fut stoppée en plein élan, celle que l’on n’enseigne pas, celle dont les traces perdurent aujourd’hui.
Lire dans notre dossier spécial pour la 44e commémoration de la guerre libanaise :
La conflagration du 13 avril, apogée d’un long processus de crises en cascade, par Michel Touma
Pourquoi l’État n’arrive toujours pas à s’imposer 29 ans après la fin de la guerre, par Zeina Antonios
Ils ont couvert la guerre du Liban : cinq journalistes livrent leurs souvenirs les plus marquants, par Julien Abi Ramia et Matthieu Karam
Le 13 avril 1975 dans la presse : un "dimanche noir", plusieurs récits, par Claire Grandchamps
Sur Facebook, un féru d’histoire raconte la guerre du Liban « au jour le jour », par Zeina Antonios
Un musée de l’indépendance des Kataëb pour lutter contre l’amnésie, par Patricia Khoder
Le bus de Aïn el-Remmané, véhicule de nos mémoires tourmentées, le récit de Marwan Chahine
La difficile écriture historique de la guerre civile, le commentaire de Dima de Clerck
Avril 1975, sorties et rentrées des artistes, par Maya Ghandour Hert
Les anciens acteurs de la guerre et les partisans du groupe armé devraient s'abstenir de toutes manifestations écrites, vocales, télévisuelles ou autres, en ce genre du souvenir du début de la destruction de notre pays par certains de ses propres citoyens.
10 h 06, le 14 avril 2019