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Liban - Législatives 2018 - Portrait

Rafic Bazerji : Je veux œuvrer pour les jeunes... alors que la classe politique fait le contraire

Candidat au siège des minorités chrétiennes sur la liste indépendante « Nous sommes Beyrouth » à Beyrouth I, cet amoureux de la nature libanaise compte défendre les droits politiques de ces communautés sous-représentées.

Rafic Bazerji, candidat des minorités sur la liste « Nous sommes Beyrouth », avec Michèle Tuéni, l’actuel député Serge TerSarkissian, Sebouh Makhjian et Georges Sfeir.

Le bureau de Rafic Bazerji, transformé pour l’occasion en bureau électoral, est situé à Gemmayzé, dans une bâtisse au style traditionnel qui n’est autre que celle où il a grandi, et où même sa mère est née. « Cela fait 80 ans que cette maison est dans la famille, raconte-t-il. À la mort de mes parents, j’ai décidé de la reprendre, de la rénover entièrement et d’y installer mon bureau. »

Né en 1962 dans ce quartier même, père de trois enfants de 30, 29 et 25 ans, Rafic Bazerji a baigné depuis tout petit dans la politique. Côté maternel, la famille était très proche du Parti national libéral et apparentée au fondateur et ancien président Camille Chamoun. Le jeune Rafic Bazerji s’est donc trouvé, comme l’ensemble de sa génération, au centre de la guerre de 1975-1990, mais il prend ses distances suite aux luttes fratricides de 1980, qui vont à l’encontre de ses convictions profondes. Aujourd’hui, il reste proche du PNL, est même secrétaire général de la Fondation Camille Chamoun, mais n’est plus affilié à ce parti ou à d’autres.

Après 30 ans à la direction de l’entreprise familiale d’importation de voitures, Rafic Bazerji décide, il y a cinq ans environ, de quitter ce poste pour se consacrer à d’autres activités, notamment à la Ligue latine dont il est élu président en 2010, réélu deux fois depuis. « À travers la Ligue latine, j’ai renoué avec le service public, surtout quand nous apportons notre aide aux plus démunis », dit-il. Amoureux fou de la nature libanaise, notamment celle de la région de sa mère, le Chouf, Rafic Bazerji a construit une maison d’hôte très renommée, noyée dans la verdure.

Mais il faut croire qu’il a la politique dans le sang, puisqu’il a abandonné son « paradis » au Chouf pour se présenter aux élections, briguant le siège des minorités dans la circonscription de Beyrouth I (Achrafieh, Saïfi, Medawar, Rmeil). « Je considère que je fais partie de ceux qui sont l’essence même du 14 Mars, même si j’ai souvent été déçu par les politiciens de ce mouvement », explique-t-il.


(Lire aussi : Joumana Haddad : Je n’ai pas peur de la confrontation) 


« La seule liste indépendante »
Rafic Bazerji ne cache pas qu’il a entrepris des pourparlers afin d’intégrer l’une des listes aujourd’hui rivales, ce qui n’a pas été possible. « J’ai été contacté par Michèle Tuéni, dit-il. La profondeur de sa compréhension de la politique m’a épatée. C’est ainsi que j’ai intégré cette liste vraiment homogène et solidaire. »

Pour lui, la liste « Nous sommes Beyrouth » est « la seule indépendante » dans cette circonscription : il estime en effet que les autres jouissent soit de l’appui politique de pays étrangers, soit de sources de financement opaques pour certains. Mais ne s’exprime-t-il ainsi que parce qu’il n’a pas intégré l’une de ces listes ? « Pas du tout, explique-t-il, ce n’est que maintenant que je réalise les combines conclues en vue de former ces listes. Et puis de là où je me trouve, je suis plus libre pour critiquer tout ce qui me semble répréhensible. » Comment les membres de sa liste comptent-ils faire valoir leur indépendance, alors que les soupçons pèsent sur tant d’autres candidats selon eux ? « Notre histoire parlera pour nous, répond Rafic Bazerji. Pour ma part, je table sur mon parcours marqué par l’honnêteté et le succès de mes entreprises. »

S’il est élu, Rafic Bazerji compte soulever avec force l’affaire des droits politiques des minorités chrétiennes (syriaques-orthodoxes et catholiques, latins, chaldéens, nestoriens, etc.) représentées par un seul siège à Beyrouth I. « Nous sommes 90 000 personnes, cela vaut bien deux sièges au moins, sinon trois, et le projet de loi existe », affirme-t-il. L’autre question qui le préoccupe, c’est la situation des jeunes au Liban. « Je veux œuvrer pour eux parce que je suis bien conscient que la classe politique fait le contraire, s’insurge-t-il. Est-ce possible qu’on les prive de prêts immobiliers sous des conditions avantageuses, pour privilégier les étrangers qui achètent des domiciles au Liban et qui bénéficieront d’un permis de séjour (NDLR : en référence à l’article 49 du budget national) ? »

Même s’il croit en ses chances de succès, Rafic Bazerji annonce d’ores et déjà qu’il pourrait ne pas renouveler l’expérience en cas d’échec. « Mais ce qui me décevra le plus, c’est qu’il n’y ait pas, dans le futur Parlement, un noyau de dix députés vraiment indépendants et honnêtes, pour initier un changement, affirme-t-il. L’élection de telles personnes est mon espoir aujourd’hui, même si leur entreprise revient à creuser la roche avec une épingle. »



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Le bureau de Rafic Bazerji, transformé pour l’occasion en bureau électoral, est situé à Gemmayzé, dans une bâtisse au style traditionnel qui n’est autre que celle où il a grandi, et où même sa mère est née. « Cela fait 80 ans que cette maison est dans la famille, raconte-t-il. À la mort de mes parents, j’ai décidé de la reprendre, de la rénover entièrement et d’y...

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