Rechercher
Rechercher

Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

Le désir de savoir de l’analyste, moteur de la cure et ce qui y résiste

Comme nous le voyons depuis les dernières rubriques, le désir de savoir de l'analyste est le moteur de la cure psychanalytique, ce qui permet d'accéder à la vérité du patient et par là, de le libérer de ses symptômes. Amour de transfert et de contre-transfert peuvent s'opposer à ce désir de savoir de l'analyste et bloquer l'accès à la vérité, surtout quand le patient ne le veut pas et préfère en rester à une amélioration de la souffrance. La dimension thérapeutique intervient à ce niveau, mais aussi la technique de l'analyse qui peut s'opposer à ce désir de savoir.

Freud a-t-il forcé Cécilie en l'obligeant à aller plus loin dans ses souvenirs que la version qu'elle avait donnée et répétée à Breuer ? Non, car la patiente lui a donné le feu vert en construisant ses symptômes avec certains détails qu'elle aurait pu ne pas dévoiler et qui ont permis à Freud de poursuivre son investigation. Ainsi, pourquoi Cécilie a affirmé que les deux personnes qui sont venues la prendre à l'hôtel étaient des médecins, ce qui était illogique? Pour se convaincre que son père est mort dans un hôpital et non pas dans un bordel, fallait-il ajouter à la description de l'hôpital de la musique et des infirmières maquillées ?

Si « Le symptôme est écrit dans la langue d'un Autre qui reste à rencontrer », le patient va donc mettre la puce à l'oreille de cet Autre. Le patient fabrique un symptôme non seulement pour diminuer le niveau de son angoisse intérieure qu'il ne peut plus contenir, mais aussi pour l'adresser à un Autre qui pourra enfin le déchiffrer. L'Autre est un concept lacanien qui permet de ne pas en rester au niveau de l'intrasubjectif du symptôme, non pas pour entrer dans l'intersubjectif comme peuvent le penser les théories du contre-transfert mais pour poser l'Autre comme extérieur au sujet également. Ce concept d'Autre permet de désigner l'inconscient du sujet et en même temps le destinataire à qui on s'adresse. L'Autre? C'est la mère, le père ou les frères et sœurs de notre enfance, mais également l'analyste qui nous écoute. Par exemple, il n'y a pas de lapsus si le sujet qui le fait ne s'adressait pas à un Autre, comme « l'éducation prostitute » et le « Dr Freuer », les deux lapsus énoncés par Cécilie et adressés à Freud.

De même, ils n'auraient pas pu se produire précédemment dans la relation de Cécilie à Breuer, ni au début de la relation de Cécilie avec Freud. C'est le désir de savoir de Freud qui a ouvert une brèche dans les défenses de Cécilie en permettant un retour du refoulé : le désir incestueux envers le père. Par ailleurs, il faut qu'il y ait du langage, des mots pour que ce désir incestueux s'énonce, se dise. Enfin, lorsque Freud abandonne l'hypnose, c'est bien parce qu'il s'est rendu compte, d'une part, que l'hypnose signifiait quelque chose d'érotique lié à Breuer : « Que penserait le Dr Breuer ? » dit la jeune femme en refusant, pour la première fois, de se faire hypnotiser. De l'autre, la patiente commençait par parler librement au point de dire ce que Freud voulait savoir, avant même qu'il ne posât ses questions. Plus besoin de l'hypnose pour parler.

Et pour ne pas se laisser influencer par le regard de Cécilie comme le fut Breuer, il déplace son fauteuil légèrement en arrière et invente le divan. La parole pouvait désormais se libérer du poids des regards et « l'attention flottante » devenir la règle de l'écoute de l'analyste. Tout ce qui pourra perturber cette attention flottante retarde la saisie par l'analyste des mots importants énoncés par le patient, sans que ces mots aient un sens particulier. La dimension acoustique du mot, sa consonance, sa matérialité (phonèmes, sons) résonne aux oreilles de l'analyste et donne à l'écoute une tout autre dimension. L'attention flottante devient plus facile à l'écoute des signifiants, comme les appelait Lacan. Non pas les signifiés.

*La prochaine rubrique sera pour la 1re semaine de janvier 2018.

 

Dans la même rubrique

Le désir de l’analyste est le moteur de la cure, le contre-transfert est une résistance

Le psychanalyste et le transfert comme symptôme (suite)

Le psychanalyste, le symptôme et la guérison (suite)

Le psychanalyste, le symptôme et la guérison (suite)

Le psychanalyste, le symptôme et la guérison (suite)

Le psychanalyste, la thérapeutique et la guérison (suite)

Comme nous le voyons depuis les dernières rubriques, le désir de savoir de l'analyste est le moteur de la cure psychanalytique, ce qui permet d'accéder à la vérité du patient et par là, de le libérer de ses symptômes. Amour de transfert et de contre-transfert peuvent s'opposer à ce désir de savoir de l'analyste et bloquer l'accès à la vérité, surtout quand le patient ne le veut pas...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut