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À La Une - Syrie

Les civils pris dans la nasse d'Alep-Est

"Les conditions sur place sont telles que même des animaux ne les supporteraient pas".

Une colonne de fumée s'élève du quartier d'al-Ethaa, contrôlé par le régime à Alep-Est, en Syrie, le 5 décembre 2016. AFP / Youssef KARWASHAN

A mesure que l'armée progresse dans les quartiers d'Alep-Est, les civils sont contraints de choisir entre deux maux : rester sur place et passer sous la coupe des troupes gouvernementales ou fuir et se replier dans les enclaves rebelles soumises à l'une des plus impitoyables offensives depuis le début de la guerre en Syrie ?

Hassan al-Ali, père de trois enfants, a choisi de quitter le quartier de Sakhour pour rejoindre une zone toujours aux mains des insurgés. Sur place, on manque de tout, de nourriture, d'eau, de carburant et de médicaments mais la peur des forces pro-Assad demeure la plus forte. "Je n'ai rien pris avec moi. J'ai pris mes enfants, je suis monté dans ma voiture et je suis parti", raconte-t-il. "Nous avons pris la décision au dernier moment car l'armée risquait d'arriver à tout instant".

Pour Ali et des milliers d'autres, le danger des bombardements et des pénuries semble préférable à l'emprisonnement ou l'enrôlement de force dans les rangs des troupes soutenant le régime. Si certains choisissent de se retrancher en territoire rebelle, d'autres assument le risque de franchir la ligne de front et de rallier les quartiers occidentaux contrôlés par l'armée.

 

(Lire aussi : Russes et Américains vont discuter du départ des rebelles d'Alep)

 

"J'espère que la Syrie redeviendra comme elle était, que les gens retrouveront la sécurité et la paix comme avant", explique Abed al-Salam, ancien ouvrier du bâtiment qui a quitté la partie est de la ville. Les conditions sur place, raconte-t-il, sont telles que même des animaux ne les supporteraient pas. Avec sa femme et ses six filles, il est parti à l'aube, a franchi la ligne de front et rejoint une ancienne usine de coton dans le quartier de Jibrine qui sert désormais de centre d'accueil pour les déplacés.

Rebelles et gouvernement s'accusent mutuellement d'exploiter la peur des habitants à leur avantage. Les opposants diffusent de fausses informations, affirme l'armée, pour dissuader les civils de partir. Les militaires obligent les civils à se dire victimes de mauvais traitements de la part des rebelles, soutiennent ces derniers.

Depuis que les troupes pro-Assad ont commencé à pénétrer dans Alep-Est par le nord il y a une semaine, au moins 30.000 personnes ont franchi la ligne de front à partir des zones rebelles, indique le Bureau de l'Onu pour la coordination des affaires humanitaires (Ocha).

 

(Lire aussi : Alep : ceci n'est pas un massacre...)

 

Destructions inimaginables
Des milliers d'autres se sont repliées dans les quartiers insurgés, en particulier le secteur densément peuplé de la vieille ville. Leur nombre est difficile à évaluer mais Ocha avance le chiffre de 5.000.

Pour l'émissaire de l'Onu en Syrie, Staffan de Mistura, plus de 100.000 personnes se trouvent encore dans cette partie de l'agglomération. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) estime leur nombre à quelque 200.000.

Sur place, les conditions sont aggravées par le manque de denrées de première nécessité et par les bombardements constants. Pour ceux qui choisissent de rester, la raison est simple : les contrôles d'identité effectués par l'armée au passage de la ligne de front sont la première étape vers les arrestations de masse, la torture et les exécutions sommaires.
L'OSDH rapportait la semaine passée que des centaines de personnes avaient été emprisonnées par le régime, une accusation démentie par une source militaire syrienne.

Après onze jours de bombardements toujours plus intenses, Khalil Halabi se trouve dans le quartier de la vieille ville avec sa femme et ses enfants. "Les destructions sont inimaginables, des ruines, des ruines calcinées. Les immeubles se sont effondrés et ont été brûlés entièrement, les mosquées ont été totalement détruites", raconte-t-il. "Nous avons perdu beaucoup de gens à cause des barils d'explosifs et des roquettes. Certains sont morts et d'autres sont blessés à vie".

Certains comme Ali, pris dans la nasse d'Alep-Est, rêvent d'un accord similaire à celui conclu à Daraya près de Damas qui a permis aux civils qui le souhaitaient de rejoindre les insurgés à Idleb après des années de siège. "J'irai dans une autre région", affirme Ali. "J'emmènerai ma famille et je chercherai refuge dans une autre région, une région libérée qui n'est pas tenue par le régime".

 

 

Repère
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