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Liban - La situation

Le 14 Mars rompt l’équation des veto de Nasrallah

Climat chaleureux, hier, en soirée, entre Samir Geagea et Saad Hariri, à Meerab, pour redéfinir les constantes stratégiques du 14 Mars. Photo Aldo Ayoub

Les réactions, plutôt mitigées, à l'allocution du chef du courant du Futur Saad Hariri au Biel donnent l'impression que le pays suit deux trajectoires parallèles différentes.

La première, la plus tangible, est circonscrite aux trois candidatures de Michel Aoun, d'Henri Hélou et de Sleiman Frangié, et aux initiatives et positionnements qui les sous-tendent. Simulacre d'une course à la présidentielle, cette « trajectoire du vide », définie et tracée par le Hezbollah, est propice au brouillage des alliances et des repères : c'est dans ce cadre que s'opposent les deux candidats du 8 Mars, soutenus respectivement par les deux principales composantes du 14 Mars – lesquelles donnent libre cours, de leur côté, à leurs reproches mutuels.

Les bases chrétiennes, partisanes des FL notamment, qui se sont insurgées depuis dimanche soir contre « l'humiliation » infligée selon eux par Saad Hariri au président des Forces libanaises (FL), Samir Geagea (dont ce dernier a substantiellement minimisé la portée, hier soir, alors qu'il recevait M. Hariri chez lui), sont engluées dans la phase de la contre-initiative de Meerab (la candidature de Michel Aoun en réponse à celle de Sleiman Frangié par M. Hariri). Ne retenant du discours que le « reproche » adressé par Saad Hariri à Samir Geagea de ne pas avoir scellé plus tôt la réconciliation interchrétienne, cette réaction souffre de plusieurs failles – que trahissent d'ailleurs la violence et la haine sectaire reflétées par certains propos, notamment sur les réseaux sociaux.
Elle défend une perception frileuse et repliée du rôle de la communauté chrétienne : en reniant la symbolique et l'historique de l'alliance sunnito-chrétienne depuis 2005, cette réaction s'aligne, en définitive, sur la thématique de l'alliance des minorités (une thématique qui dissocie – à tort – la préservation d'une communauté de son engagement national).

C'est dans ce sens que « certains partisans des FL ont prouvé qu'ils étaient plus aounistes que les partisans du Courant patriotique libre », relève une source indépendante du 14 Mars à L'Orient-Le Jour. Enlisés dans la surenchère chrétienne, ces derniers auraient omis la dimension pragmatique de l'accord de Meerab (celle de rallier une partie de l'opinion publique du CPL au projet souverainiste des FL), et, surtout, sa dimension tactique liée stricto sensu à l'échéance présidentielle. Pourtant, la viabilité de l'accord de Meerab reste tributaire de plusieurs inconnues, dont l'issue du scrutin de la présidentielle (que resterait-il par exemple de cet accord si, par le jeu des compromis, et par obligation d'un vote unifié du 8 Mars, le CPL se verrait contraint de voter pour un candidat non soutenu par les FL ? ). Elle est surtout mise devant le défi de sa compatibilité avec les enjeux stratégiques du 14 Mars.

Or, c'est l'affirmation en force des choix stratégiques du 14 Mars, précisément sur le dossier de la présidentielle, qui constitue « l'essentiel » utile du discours de Saad Hariri : son appel, fort de l'autorité des textes constitutionnels, à toutes les parties de se rendre à l'hémicycle pour élire un président, quel qu'il soit, mais aussi et surtout la réaffirmation du rejet de toute nouvelle tutelle – iranienne de surcroît – sur le pays.
Et c'est « l'essentiel » de ce discours que les FL ont décidé officiellement de retenir, pour reprendre la déclaration de la députée Sethrida Geagea à la radio hier.
Les déclarations communes de Samir Geagea et de Saad Hariri à la presse, à l'issue de leur entretien hier soir, révèlent cette vision stratégique commune et cette entente sur le déblocage – une entente qu'il faudrait comprendre en dehors des candidatures en lice.
En effet, les deux leaderships auraient décidé, de concert, de dépasser le face-à-face stérile Aoun-Frangié.
Cette décision serait motivée par leur souci commun d'immuniser leur alliance contre les retombées de leurs initiatives paradoxales : les FL avaient déjà exprimé leur souci de réparer leurs rapports avec le courant du Futur, étant convaincus de la portée stratégique de leur alliance ; le Futur est conscient de « la place privilégiée » que continue de détenir Samir Geagea auprès de l'Arabie saoudite. Il y a donc une entente tacite sur le fait que « ni Michel Aoun n'est représentatif de Samir Geagea ni Sleiman Frangié de Saad Hariri », selon une source du 14 Mars, critique à l'égard des deux candidatures.


(Lire aussi : Appel commun de Geagea et Hariri au 8 Mars à participer aux séances électorales)


Le souci de consolider le 14 Mars partisan et civil est surtout lié à la bataille que le courant du Futur entend mener contre la politique du vide du Hezbollah au Liban, et qui fait directement écho à la guerre irano-arabe menée actuellement dans la région, et dont la Syrie est aujourd'hui le terrain privilégié.
Parce que, sur cette trajectoire du vide où les alliances ont failli se brouiller, c'est le Hezbollah qui mène le jeu, in fine. Le seul moyen de donner un semblant de sens à son jeu est d'opposer le veto chiite contre le veto sunnite. Un face-à-face qui minerait Taëf et plongerait le Liban, indirectement, dans l'engrenage régional. C'est justement cet équilibre forcé des deux veto que Saad Hariri a décidé de rompre, en affirmant qu'il n'opposait de veto à aucun candidat et qu'il était prêt à se rendre à l'hémicycle indépendamment du résultat du scrutin. « La réponse à Hassan Nasrallah est venue clairement de Saad Hariri, lorsqu'il lui a déclaré qu'il ne boycottera pas la séance électorale », a relevé Samir Geagea, lui-même, hier soir à Meerab. La tournée de Hariri, qui a inclus hier Meerab et Saïfi, lui a permis de rétablir un lien avec les forces chrétiennes, malmené depuis l'appui à la candidature de Sleiman Frangié, et d'initier une dynamique plurielle vers un retour aux constantes du 14 Mars. La réponse de Hassan Nasrallah est attendue ce soir.

(Lire aussi : Samir Frangié : Le 14 Mars se concerte pour une initiative en faveur de la « protection du Liban »)


Mais le discours de Saad Hariri comporte également un second volet, révélateur d'une voie qui se dessine, en parallèle, vers un candidat consensuel.
Une seconde trajectoire, celle d'un consensus autour de la présidentielle, s'ébaucherait en effet discrètement dans les chancelleries et s'exprimerait sous forme d'allusions ponctuelles sur la scène politique. « Il y a trois candidats en lice, et il pourrait y avoir d'autres... » est une expression récurrente dans les propos de Saad Hariri (il l'a insérée dans son discours au Biel et l'a réitérée hier). C'est cette expression que Walid Joumblatt a d'ailleurs intégrée dans un tweet hier. « Allons donc au Parlement pour voter, nous avons trois candidats et peut-être plus, Saad Hariri (le chef du courant du Futur) a été clair hier (la veille), et nous le soutenons », a-t-il écrit.
C'est dans ce contexte que le député Fouad el-Saad a appelé le Hezbollah à « prendre une décision historique de se rendre à l'hémicycle, sinon de souscrire à l'idée d'un candidat consensuel ».

La coïncidence dimanche de la commémoration du 14 Février, et de la rencontre, à Aïn el-Tiné, entre le président de la Chambre, Nabih Berry, et le chef du Rassemblement démocratique, le député Walid Joumblatt, est représentative d'une synchronie entre les efforts de limiter les dégâts du vide, d'une part, et d'en rompre l'existence, de l'autre.
Mais, pour l'heure, aucun package-deal n'est en vue : le Hezbollah refuserait d'accorder la présidence du Conseil au courant du Futur, cela signifiant, pour lui, un retour à l'influence saoudienne au Liban.

 

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Les réactions, plutôt mitigées, à l'allocution du chef du courant du Futur Saad Hariri au Biel donnent l'impression que le pays suit deux trajectoires parallèles différentes.
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commentaires (7)

rien ni personne ne pourra ebranler ce qui c'est construit en 2005 meme avec les insultes sur les réseaux sociaux !! ce ne sont que des mou3etabet

Bery tus

18 h 36, le 16 février 2016

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • rien ni personne ne pourra ebranler ce qui c'est construit en 2005 meme avec les insultes sur les réseaux sociaux !! ce ne sont que des mou3etabet

    Bery tus

    18 h 36, le 16 février 2016

  • Dramatique , et surtout symptomatique du cocu qui jure ses grands dieux que c'est la 1 ère fois qu'il le fait ..lol.. et qu'il ne recommencera plus jamais .

    FRIK-A-FRAK

    11 h 32, le 16 février 2016

  • Allons au Parlement pour voter pour un candidat neutre et consensuel non déclaré !

    Un Libanais

    11 h 31, le 16 février 2016

  • "Allons donc au Parlement pour voter, nous avons trois candidats et peut-être plus...." ! Et pourquoi alors le Râââëh, une sorte de Makarios à la sauce libanaise mais en 8 ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    08 h 41, le 16 février 2016

  • EST-CE UN PAYS... EST-CE UN ETAT çA... Où UNE CONSTITUANTE... FORTE DES ARMES ILLÉGALES QU'ELLE POSSÈDE... VEUT S'IMPOSER EN IMPOSANT UN CHEF D'ETAT DE SON CHOIX... VEUT AVOIR LE DERNIER MOT À DIRE SUR QUI SERA LE PREMIER MINISTRE ET NOMME UNILATÉRALEMENT LE PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE... TOUT AU MÉPRIS DE TOUS LES AUTRES PARTENAIRES ET COMMUNAUTÉS DU PAYS ? LA MAINMISE NE DOIT PAS PASSER... SINON LE LIBAN SERA UNE WILAYET DU FAKIH ET LES CHRÉTIENS PAYERONT LE PRIX FORT AVANT TOUS LES AUTRES...

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 07, le 16 février 2016

  • Mais, pour l'heure, aucun package-deal n'est en vue :le Hezbollah refuserait d'accorder la présidence du Conseil au courant du Futur, cela signifiant, pour lui, un retour à l'influence saoudienne au Liban ET POURQUOI LE FUTUR A T IL ACCORDEE EN 2OO5 ,C'EST A DIRE APRES LE DEPART DES FORCES D'OCCUPATION BAASSYRIENNES ,LA PRESIDENCE DU PARLEMENT AU CHEF DU MOUVEMENT AMEL DONT LES LIENS ORGANIQUES AVEC LE REGIME BAASSYRIEN NE POUVAIENT QUE SIGNIFIER LE RETOUR DE L'INFLUENCE BAASSYRIENNE AU LIBAN ? FORCE EST DE RECONNAITRE DANS CE CAS DE FIGURE L'ESPRIT DE SOUMISSION ET DE SERVILITEE DU COURANT DU FUTUR.MAIS AUSSI ET SURTOUT SA NAVRANTE MYOPIE POLITIQUE .SERVILITE ET SOUMISSION QUE PARTAGENT PAR AILLEURS TOUTES LES FARCES DU 14 MARS ET QUI ONT MENEE LE LIBAN VERS LA CRISE ACTUELLE DANS LAQUELLE IL SE DEBAT ET SE DEBATTRA JUSQU'A L'AVENEMENT DE LA REPUBLIQUE ISLAMIQUE FAKIHISTE DU LIBAN.

    Henrik Yowakim

    06 h 11, le 16 février 2016

  • Quel pays compliqué ! Putz !

    Halim Abou Chacra

    04 h 03, le 16 février 2016

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