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Culture - Musique

De Cairokee à Marwan Pablo, du rock à la trap, passage de flambeau sur la scène musicale égyptienne

Un public électrisé, des visuels flamboyants, l’avant-garde du rap egyptien et le groupe le plus incontournable d’Égypte : retour sur un concert très attendu qui s’est produit au Caire vendredi dernier.

De Cairokee à Marwan Pablo, du rock à la trap, passage de flambeau sur la scène musicale égyptienne

Des visuels flamboyants pour le concert de Cairokee au Caire le vendredi 17 mai. Photo Hesham Marcelo (Instagram : @heshammarcelo12)

L’effervescence est palpable sur le chemin qui relie la scène aux différentes entrées du public. Des dizaines de spectateurs viennent six à dix heures à l’avance pour être certains d’occuper la meilleure place, des centaines de jeunes se remuent déjà derrière les barrières des fosses. À l’arrivée des chanteurs, le public exprime une énergie phénoménale. Quand les deux chanteurs principaux s’épaulent, par ce geste, semblent s’unir deux générations d’auditeurs, non étanches l’une à l’autre, comme en témoigne la présence d’un public de tout âge, enfants sur épaules de parents, étudiants et leurs aînés.

Ce qui justifie l’insatiable excitation du public, c’est que Cairokee est un géant de l’industrie musicale égyptienne, si ce n’est le plus grand, tous styles confondus. Ce groupe de rock qui a fait ses débuts dans les années 2000 a rencontré un immense succès pendant la révolution égyptienne de 2011. Ses musiques ont incarné des hymnes à la liberté, circulant sans cesse dans les rues du Caire et sur les réseaux sociaux, tels que  Ya el-midan ou Sout el-Horeya.  C’est à cette occasion que Cairokee a permis au rock de s’affirmer comme genre musical en Égypte, le groupe étant devenu une véritable icône de la culture égyptienne, de ses préoccupations et de ses exaltations.

Marwan Pablo, précurseur du rap égyptien

En première partie de ce concert, s’est produit Marwan Pablo, un artiste de 26 ans considéré comme le pionnier de la musique trap (une forme de rap où le kick est un élément central) en Égypte. Il tire son nom de scène des figures de Pablo Escobar et Pablo Picasso, qui représentent respectivement dans l’imaginaire de la jeunesse égyptienne la puissance et l’avant-garde.

Marwan Pablo vient d’Alexandrie, ville côtière qui a vu naître un grand nombre d’artistes du pays, d’où son surnom de « celle qui donne des enfants » (« al-wallâda » en arabe égyptien). Devenu célèbre en 2019 à la faveur d’une collaboration avec le célèbre producteur égyptien Molotof, il ne cesse depuis d’élargir son auditoire. Dans une Égypte partagée entre sa culture musicale nationale et une influence culturelle américaine, il sait mêler le style de ses idoles Lil Wayne, 50 Cent et Eminem, ainsi que le genre égyptien dit chaabi, cette musique de jeunes  Égyptiens issus de milieux défavorisés racontant leur quotidien sur des percussions très cadencées.

Amir Eid et Marwan Pablo, deux générations et styles différents, un seul message. Photo Hesham Marcelo (Instagram : @heshammarcelo12)

La semaine dernière, le rappeur est officiellement devenu ambassadeur au Moyen-Orient de la marque de vêtements Diesel, qui a conçu sa tenue de show aux motifs militaires délavés et avec laquelle il se sent partager le même esprit audacieux. Le soin qu’il accorde à son identité vestimentaire témoigne de son ambition de devenir le fleuron de la musique hip-hop dans la région.

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Pour comprendre les raisons de la collaboration entre Cairokee et Marwan Pablo à ce concert, alors qu’ils appartiennent à deux univers musicaux et deux générations (15 ans séparent le rappeur et le chanteur principal du groupe de rock) distincts, il faut revenir sur le projet qui les a réunis ces dernières années. Cairokee et Marwan Pablo avaient en effet travaillé ensemble sur l’album de Cairokee nommé,  Roma, sorti le 23 septembre 2022 et suscitant la stupéfaction et l’enthousiasme de l’audience régionale. Le groupe de rock, dont beaucoup de fans reprochaient des paroles de moins en moins revendicatrices ces dernières années, a su donner une fraîcheur nouvelle à son style en travaillant avec le jeune rappeur.

Le groupe Cairokee, le plus incontournable d’Égypte. Photo Hesham Marcelo (Instagram : @heshammarcelo12)

Cette collaboration inattendue a produit une réelle onde de choc. Dès la première phrase du single  Tarantino, le groupe de rock chantait sa volonté d’écrire l’histoire comme il le souhaite, réplique à laquelle répondait Marwan Pablo par son ambition de laisser sa trace dans l’histoire. On retrouve chez ces artistes le même désir de produire une musique forte, émancipatrice et évocatrice du quotidien des Égyptiennes et des Égyptiens, traitant également de thèmes qui ne connaissent pas de frontières, comme les rêves de jeunesse ou les souvenirs amoureux.

Durant le concert, c’est à l’heure du second acte que réapparaît Marwan Pablo pour relayer le chanteur Amir Eid sur Tarantino. Les voir accoudés dans le chant, c’est entendre un message en musique, assister à la transmission d’un flambeau, celui de poursuivre le combat de la liberté d’expression dans un contexte où la scène musicale se cantonne à un ensemble de sujets de plus en plus réduits.

L’effervescence est palpable sur le chemin qui relie la scène aux différentes entrées du public. Des dizaines de spectateurs viennent six à dix heures à l’avance pour être certains d’occuper la meilleure place, des centaines de jeunes se remuent déjà derrière les barrières des fosses. À l’arrivée des chanteurs, le public exprime une énergie phénoménale. Quand les deux...
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