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À La Une - Liban-La situation

Triomphe du centrisme... en attendant les grincements

Plébiscité au premier jour des consultations parlementaires, Tammam Salam est virtuellement, depuis hier, Premier ministre désigné.

C’est avec Nabih Berry que Michel Sleiman a entamé la première journée des consultations parlementaires contraignantes : 86 voix à Tammam Salam... Photo Dalati et Nohra

Avec 86 voix parlementaires en sa faveur, et sans aucun autre candidat pour lui disputer ce poste, Tammam Saëb Salam est virtuellement, depuis hier, Premier ministre désigné. La deuxième journée de consultations parlementaires, aujourd’hui, sera de pure forme, sur ce plan. Au terme des consultations prévues de onze blocs et de onze députés indépendants, M. Salam disposera probablement de 123 ou 124 voix en sa faveur, sur un total de 128 députés.
Ce qu’il en fera est une autre paire de manches, car, de toute évidence, si le processus de nomination a fonctionné comme une machine bien huilée, la formation du gouvernement produira, à n’en pas douter, beaucoup de grincements. « Retour à la tutelle saoudienne », hurlent les uns. Triomphe du centrisme, clament les autres. En tout état de cause, nouveau départ, nouvel espoir après l’ai vicié des querelles intestines qui a marqué la fin de vie du cabinet sortant. 


Officiellement, le palais présidentiel a annoncé que 87 députés ont participé aux consultations, hier, et que M. Salam a bénéficié de l’appui de 86 d’entre eux. Six des députés ayant participé aux consultations l’ont fait en appelant le président Sleiman au téléphone. Il s’agit de six députés du bloc du Futur, à savoir : Saad Hariri, Nouhad Machnouk, Bahia Hariri, Mohammad Hajjar, Jamal Jarrah et Okab Sakr. Leur avis a été retenu.
Par contre, physiquement absent de Baabda, Michel Aoun a été considéré comme ayant été consulté, mais son avis ne figure pas au décompte des voix favorables à M. Salam. En effet, M. Aoun n’a ni appelé Baabda ni adressé au chef de l’État une note écrite exprimant son désir de nommer Tammam Salam. Dans les milieux politiques, on attribue son absence au divorce qui marque ses rapports avec le président Sleiman, depuis la démission du cabinet Mikati.
Les députés de Zghorta, Sleimane Frangié, Estephan Doueyhi et Salim Karam boycotteront eux aussi les consultations. M. Frangié estime que M. Salam s’est « trahi » en annonçant qu’il est candidat à partir du domicile de Saad Hariri, à Riyad.

Le plus dur
Mais avec la fin prévue des consultations, aujourd’hui, le plus dur restera à faire. De l’avis général, le gouvernement et la déclaration ministérielle ne seront pas faciles à établir. Faudra-t-il former un gouvernement neutre ? Un gouvernement fort ? Un gouvernement souple et ouvert ?
D’évidence, c’est la tâche qui lui sera confiée en priorité qui déterminera la nature du prochain gouvernement. Si la priorité est à l’organisation des élections, il faudra un gouvernement neutre, impartial ; s’il s’agit du maintien de la sécurité, il faudra un gouvernement fort; si le mot d’ordre est à la réconciliation, c’est un gouvernement souple et ouvert qu’il faudra former. 
En fait, le prochain cabinet devra être doté de toutes ces qualités à la fois. Il ne faut pas oublier, pour commencer, que le pays est en pleine crise institutionnelle, et qu’il risque de se retrouver dans quelques courtes semaines sans loi électorale satisfaisante, et donc sans alternance, si un accord n’est pas trouvé au plus vite.

 

(Lire aussi: Charbel demande le report au 16 juin des législatives)


Le maintien de la sécurité est l’une des autres urgences qui s’impose d’elle-même, avec la hausse de la criminalité et l’augmentation alarmante du nombre des réfugiés syriens.
La réconciliation nationale, enfin, sera à l’ordre du jour tant que le chef de l’État – et Walid Joumblatt, en néopacifiste – continueront de lancer des appels au dialogue au courant du Futur et au Hezbollah.
De là à former un « gouvernement d’unité nationale », comme certains en rêvent, il y aura quand même du chemin, estiment les observateurs, soulignant que deux sujets irréductibles (au moins) continueront à diviser le Liban en deux camps : le TSL et les armes du Hezbollah.

Salam, un modéré
En tout état de cause, même s’il est mis au compte du Futur, M. Salam doit être considéré comme un centriste proche de l’école Michel Sleiman, qui a beaucoup fait pour sa nomination. Selon un professeur de l’AUB cité par l’AFP, Hilal Khachane, « toutes les parties au Liban veulent apaiser les tensions, en attendant que la situation en Syrie soit plus claire ». « En choisissant une personnalité acceptable par la Syrie et le Hezbollah, les Saoudiens veulent éviter toute dissension entre sunnites et chiites au Liban », souligne encore l’analyste. 

 

(Portrait : Tammam Salam, « le fils de deux pactes »...)


La déclaration ministérielle
Une partie des écueils que va rencontrer la formation du gouvernement viendra de la déclaration ministérielle. Beaucoup souhaitent que la déclaration de Baabda soit la feuille de route du prochain gouvernement, avec son appel à la « neutralité positive » du Liban, et la distanciation nécessaire qu’il doit observer à l’égard de tous les axes régionaux ou internationaux. 

 

(Lire aussi: Neutralité du Liban vs abolition du confessionnalisme politique, le commentaire d'Emile Khoury)


Mais que va-t-on faire de la formule armée-peuple-résistance, sacrée aux yeux du Hezbollah ? Dans les milieux du parti chiite, on note avec satisfaction que Tammam Salam n’a jamais parlé de la résistance en termes désobligeants. Mais ira-t-il jusqu’à lâcher ses alliés du Futur ? Affichera-t-il la résilience de Nagib Mikati, sous les critiques du Futur, s’il sort des rangs ? Finalement, les mots unité nationale, salut public, coopération, complémentarité, ouverture, modération sont des formules élastiques susceptibles d’être utilisées par tout le monde comme des fourre-tout politiques creux et fastidieux.
Il est donc fort probable que, laissés à eux-mêmes, les Libanais continueront de patiner, en attendant un consensus régional qui leur indiquera la direction à prendre pour élire un nouveau Parlement (ce qui ne saurait se faire avant six mois, si l’on en croit le ministre de l’Intérieur), avec une nouvelle présidence de la République à la clé.

 

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