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Culture - DANS LES GALERIES

De l’abstraction, de la sensualité, de la nostalgie et des contes

Quatre expositions, quatre artistes aux thématiques, visions et styles différents attendent votre visite cette semaine à Beyrouth.

De l’abstraction, de la sensualité, de la nostalgie et des contes

Une huile sur toile de Michel Chidiac de la série « Jardin stellaire ». DR

Entrez dans le « Jardin stellaire » de Michel Chidiac

Voilà une exposition, à la galerie Cheriff Tabet, qui vous mettra du baume au cœur. Un accrochage de peintures qui diffuse instantanément un sentiment de bien-être chez celui qui les contemple.

Et pour cause, elles ont été réalisées dans la joie. Celle qu’éprouve Michel Chidiac, peintre et décorateur bien connu de la place beyrouthine, lorsqu’il s’attelle à son chevalet. « Je ne suis jamais triste quand je travaille », confie-t-il à L’OLJ. Et ce bonheur de peindre rejaillit sur ses toiles et enveloppe d’une lumineuse douceur les formes et les couleurs qui habitent sa nouvelle cuvée d’huiles et ses délicats dessins au crayon et pastels.

Des géométries aux angles arrondis qui semblent s’élancer dans un espace intergalactique chez Michel Chidiac. DR

Des œuvres, comme des bulles de légèreté, surgies des rêveries, des souvenirs, des fantasmes et de la fantaisie de cet artiste serein, dont le coup de crayon dessine délicatement des formes circulaires ou organiques, des géométries aux angles arrondis qui semblent s’élancer dans un espace intergalactique. Une volée de configurations et de plans qui, nimbés de couleurs, se rejoignent et se superposent par endroits… Dans des compositions abstraites, à la dynamique rythmée et parfois tourbillonnante – suggérant une certaine « influence kandinskyenne ». Mais qui chez Michel Chidiac se distingue par une palette chromatique particulièrement éthérée. Une douceur suave, quasi sensuelle, due à l’utilisation de l’huile de lin qui donne à ses toiles le rendu lisse et transparent de l’aquarelle, le « média d’origine » de ce peintre… bienfaisant. Car on sort de son exposition comme d’une balade dans un Jardin stellaire (pour reprendre le titre que l’artiste a donné à cet ensemble d’œuvres réalisées au cours de ces deux dernières années). Un moment fluide et évanescent où des figures dansantes, formant une galaxie de couleurs en suspens, vous emportent dans un univers onirique diurne, élégant et lumineux…Loin, très loin de la lourdeur ambiante. N'est-ce pas là qu’est la finalité suprême de l’art ?

*Le « Jardin stellaire » de Michel Chidiac, à la galerie Cheriff Tabet (Achrafieh, rue Abdel Wahab el-Inglizi), jusqu’au 24 mai.


Cette « Babel » calligraphique de George Merheb…

« New Way of Sending Love and Messages », une mixed-medias de Georges Merheb (2024; 190x120 cm ).

De Georges Merheb, beaucoup connaissent sa prédilection pour les les taureaux et les pommes… Mais aussi pour les signes, les symboles et les caractères des alphabets anciens qu’il s’amuse à disperser en lignes fermes et graphiques sur des toiles aux tonalités dominées par une palette terre, grise et ocre.

La nouvelle cuvée d’œuvres en mixed-médias que cet artiste donne à voir à la galerie Mark Hachem de Beyrouth reste dans cette continuité thématique, tout en présentant une plus grande liberté de formes, de formats, de tracés et de couleurs.

Affranchissant la calligraphie de la contrainte des mots et des phrases, Merheb en revisite les traits et les courbes à travers un pinceau, à la fois spontané et subtilement équilibré, qui célèbre leur intrinsèque beauté.


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Dépouillés donc de leur signification lexicale, les caractères calligraphiques qu’il trace à profusion dans un enchevêtrement faussement chaotique ne sont pas pour autant dénués de sens. Car il se dégage de ses compositions un langage méditatif qui transcende les limites traditionnelles du vocabulaire linguistique.

Il y a dans les nouvelles peintures de Georges Merheb quelque chose de la poésie et de l’universalité d’une tour de Babel dans laquelle chacun découvre son propre langage intérieur et projette son propre ressenti.

Par ailleurs, parallèlement aux œuvres picturales abstraites abordées comme « une exploration du geste, de l'énergie et de l'harmonie des lignes », l’artiste présente aussi quelques sculptures reproduisant des figures de son bestiaire de prédilection, à savoir : le taureau, l’oiseau et le cheval. Des pièces élaborées à partir de pliage et de gondolage de feuilles de métal ferreux qui font flirter la tridimensionnalité sculpturale avec la finesse des silhouettes dessinées non plus sur papier mais dans l’espace vide environnant. Des pièces dont l’artiste garde l’« empreinte » sur des toiles blanches. Comme un témoignage de plus de son désir de toujours transcender les frontières des écritures artistiques classiques…

*« Babel » de George Merheb, à la galerie Mark Hachem, jusqu’au 25 mai.


Des insectes et autres « oubliés » dans les toiles de Mirna Maalouf

Une œuvre signée Mirna Maalouf exposée à L'Atelier de Maher Attar. DR

Le monde des insectes la fascine. Mouches, fourmis, araignées, termites… Mirna Maalouf peut vous parler longuement de leur intelligence, leur résistance, leurs mutations, leur habilité à construire ou encore leur organisation sociale… Et puis, il y a les vieilles maisons abandonnées qui l’attirent tout aussi fort. Et dont elle ne résiste pas à l’envie de franchir les seuils pour se plonger dans les vestiges de vies qu’elle y imagine. Comment concilier ces deux univers qui la font rêver ? Eh bien en les mélangeant sur ses toiles.

Pour sa première exposition solo en galerie, intitulée « Les oubliés », la jeune femme, qui a précédemment participé à des expositions collectives à teneur engagée (chez Janine Rubeiz), a réuni à L’Atelier de Maher Attar (une galerie située au premier étage d’un ancien immeuble de la rue Gouraud) ces deux thématiques dans des œuvres faites d’un transfert d’images, de grattage et de peinture. Une technique que Mirna Maalouf – licenciée en arts plastiques en 2020 de la Sorbonne Paris, mais également docteure en droit pénal et psychologue de formation – a développée au fil de ses expérimentations.

Avec Mirna Maalouf, une plongée dans les vestiges de vie des anciennes maisons. DR

A la fois engagée dans des combats sociaux et « nostalgique dans l’âme », cette artiste à la fibre émotionnelle aiguisée a trouvé ainsi dans l’art véritablement sa voie. Tendre exploratrice du passé comme du monde de l’enfance, dont elle se plaît aussi à peindre des figures de bandes dessinées, elle présente ici une cuvée d’œuvres qui, sans être toutes au même diapason, ne manqueront pas de remuer chez les visiteurs des réminiscences et des émotions collectives ou plus personnelles, largement liées au temps qui passe…

*« Les oubliés » de Mirna Maalouf, à L’Atelier by Maher Attar, Gemmayzé, jusqu’au 18 mai, de 15h à 19h.


Les tables, les hommes et les histoires… de Ghylan Safadi

« Fish and Cactus Table », une acrylique sur toile de Ghylan Safadi (2023; 120x140 cm).

Il peint des groupes de gens debout côte à côte et cependant totalement esseulés. Des hommes et des femmes collés les uns aux autres mais aux regards qui ne se croisent jamais. Des individus isolés chacun dans ses pensées, ses ruminations ou encore ses rêveries… Et qui semblent tous convoiter cette petite table qu’insère Ghylan Safadi dans chacune des toiles de sa récente cuvée d’acryliques réunies à la galerie Art on 56th, sous l’intitulé « Every table has a story ». Des tables sur lesquelles sont posés un ou deux objets porteurs d’une certaine symbolique : un cactus et un poisson sur l’une, un jeu d’échiquier sur l’autre, une clé ou encore un masque sur une troisième… Ce masque, justement, on le retrouve aussi sur les faces de certains des personnages de ce peintre syrien, connu pour sa propension à représenter des foules caricaturales et taciturnes. Dans lesquelles il glisse parfois son propre visage…

La « Boat Table » de Ghylan Safadi (2023 ; 75x100 cm).

Cette fois, c’est autour de tables donc qu’il tisse ses contes silencieux. En mettant en scène des assemblées à priori festives – une première impression induite par la pétulance de sa palette chromatique – mais en réalité évocatrices de récits sous-jacents moins réjouissants. Des histoires révélant les troublantes similitudes entre corps social et commedia dell'arte. En particulier dans notre région du monde où les imposteurs, les intrigants et les hypocrites règnent en maîtres… Des tableaux qui suscitent la réflexion, en somme.

*« Every table has a story » de Ghylan Safadi, chez Art on 56th, Gemmayzé jusqu’au 25 mai.

Entrez dans le « Jardin stellaire » de Michel Chidiac Voilà une exposition, à la galerie Cheriff Tabet, qui vous mettra du baume au cœur. Un accrochage de peintures qui diffuse instantanément un sentiment de bien-être chez celui qui les contemple.Et pour cause, elles ont été réalisées dans la joie. Celle qu’éprouve Michel Chidiac, peintre et décorateur bien connu de la place...
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