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À La Une - L’éditorial de Issa GORAIEB

Sur un carrosse

Tout comme la mauvaise, une bonne nouvelle arrive rarement seule. De bon augure était, en vérité, le sabordage, subitement survenu la semaine dernière, d’un gouvernement formé sous le signe de l’homogénéité au travail politique mais failli sur tous les plans. Et qui en était même venu à rendre la vie impossible à son propre chef, finissant par l’acculer à la démission.

À son tour, l’irrésistible accession au Sérail de Tammam Salam, à la quasi-unanimité des parlementaires déjà consultés ou qui doivent encore l’être ce samedi, est, à plus d’un titre, un fort heureux événement. Pour commencer, le député sunnite indépendant de Beyrouth et ancien ministre de la Culture, homme raffiné et courtois, a toujours arboré une modération de bon aloi, qui lui vaut le respect de tous. Issu d’une famille politique qui, des décennies durant, a marqué de son empreinte la capitale avant d’être longtemps écartée de la scène par l’occupant syrien, son entrée au club des présidents du Conseil est une jolie revanche sur une sombre tranche d’histoire.

C’est surtout du juste retour au jeu démocratique, dont l’alternance du pouvoir est un élément fondamental, qu’il faut se féliciter. En 2011, le leader druze Walid Joumblatt et son bloc quittaient inopinément le 14 Mars : lequel, de majorité élue en 2009, devenait aussitôt minorité, et assistait donc, impuissant, à l’avènement d’une équipe gouvernementale largement contrôlée par le Hezbollah et ses alliés. Or c’est un même et spectaculaire renversement que le chef du PSP vient de réaliser en sautant une fois de plus par-dessus la barrière pour promouvoir le candidat de son propre choix au Sérail. Du coup a paru reconstituée, bien que ponctuellement, l’ancienne majorité, même si elle a dû renoncer à son candidat de prédilection, le général Achraf Rifi. À court de champion, le 8 Mars, quant à lui, n’a pu que suivre, bon gré mal gré, le mouvement.

L’alternance, c’est signe de santé. Ce qui est plus opportun encore, dans le cas présent, c’est l’alternance dans l’alternance. Car ce gouvernement de transition à naître, et qui est appelé à organiser et superviser les prochaines élections législatives, il est juste qu’il ne soit l’émanation ni de l’un ni de l’autre des deux camps. Pour cette raison, la déclaration gouvernementale devra nécessairement s’appuyer sur la proclamation de Baabda, document auquel ont solennellement adhéré tous les protagonistes. On peut regretter en revanche que la tendance soit actuellement à la formation d’un gouvernement d’unité au sein duquel seraient représentées les diverses fractions ; compte tenu des expériences malheureuses du passé, un recours à des technocrates libres de toute attache politique, et donc plus enclins à produire qu’à se perdre en polémiques, serait bien plus indiqué, pourtant.

Cela dit, les acteurs d’outre-frontière n’échappent pas, eux non plus, aux capricieux mouvements du balancier ; ce phénomène est fort salutairement illustré par les propos conciliants auxquels se livrent soudain les amis de l’axe Téhéran-Damas, ordinairement plus portés sur l’outrance et le défi. Car c’est bien un regain d’influence de l’Arabie saoudite aux dépens d’une Syrie pataugeant dans une féroce guerre civile que traduit visiblement le choix de Tammam Salam. Un peu trop visiblement peut-être, à en juger par l’oracle qui a parlé haut et fort à Riyad, comme par les démarches déployées au grand jour, auprès des différents pôles politiques, par l’ambassadeur saoudien.

Il est vrai, hélas, que l’amour-propre national en a vu bien d’autres...

Issa Goraieb
igor@lorient-lejour.com.lb
Tout comme la mauvaise, une bonne nouvelle arrive rarement seule. De bon augure était, en vérité, le sabordage, subitement survenu la semaine dernière, d’un gouvernement formé sous le signe de l’homogénéité au travail politique mais failli sur tous les plans. Et qui en était même venu à rendre la vie impossible à son propre chef, finissant par l’acculer à la...

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