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Liban - Conférence

La convention sur les sous-munitions reste de mise, même si elle n’est pas avalisée par les producteurs

La deuxième réunion des pays membres de la convention sur les bombes à sous-munitions, qui interdit la production, le stockage et l’utilisation de ces armes, a clôturé hier ses travaux.

Matériel utilisé pour la détection et la dépollution des sols des sous-munitions.

Durant cinq jours à Beyrouth, les représentants des États, institutions onusiennes et ONG internationales ont discuté divers points relatifs aux modalités d’application de la convention, dont son universalisation, l’assistance aux victimes et la coopération entre les États membres.
Pour les personnalités présentes dans la capitale libanaise, le texte de la convention ne perd pas de son importance s’il n’a pas été encore signé par les plus importants producteurs de bombes à sous-munitions, à savoir les États-Unis, la Chine, la Russie et Israël. Au contraire, une loi internationale les prohibant dissuade ces pays d’utiliser ce genre d’armes.
De plus, les participants ont mis l’accent sur l’importance de la tenue au Liban de cette réunion, le lâcher massif de sous-munitions par l’armée israélienne au-dessus du Liban-Sud ayant été à la base de la convention.
Gry Larsen, secrétaire d’État au ministère norvégien des Affaires étrangères, a souligné dans un entretien avec L’Orient-Le Jour que « la convention sur les bombes à sous-munitions établit une fois pour toutes que l’utilisation de ces armes est inacceptable, d’autant que les exemples sur le terrain ont montré que leurs conséquences humanitaires néfastes dépassent de loin leurs avantages militaires ». Elle a noté que « la tenue de la conférence au Liban confirme le rôle de ce pays comme modèle dans la lutte pour l’interdiction des bombes à sous-munitions ».
Rappelons dans ce cadre que la convention avait vu le jour grâce à une initiative de la Norvège, qui planchait depuis 2005 sur le dossier. Impressionné par le nombre de bombes à sous-munitions qui avaient contaminé le territoire libanais, le ministre norvégien des Affaires étrangères de l’époque, Jonas Gahr Store, avait réussi à mobiliser 46 gouvernements, lors d’une réunion qui s’était tenue à Oslo en février 2007, pour préparer une convention interdisant l’utilisation de ces engins mortels lors des conflits. La convention avait été adoptée en mai 2008 à Dublin.
La responsable norvégienne, dont le pays est impliqué sur le terrain dans le déminage et la dépollution des sols des sous-munitions au Liban et ailleurs, a estimé que « même si les États producteurs de ces armes n’ont pas signé la convention, le texte les dissuade désormais de les utiliser ». Elle prend dans ce cadre l’exemple de la convention sur les mines antipersonnel, adopée en 1998, et qui a eu un effet boule de neige auprès de la communauté internationale.

Le CICR : une norme du droit international humanitaire
Présent à Beyrouth également, Peter Herby, chef de l’unité des armes et de la division juridique au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Genève, a indiqué à L’Orient-Le Jour que l’organisme qu’il représente œuvre depuis 2000, après le conflit du Kosovo, à prohiber les bombes à sous-munitions. Un matériel promotionnel en cinq langues et des brochures ont été imprimées et distribuées dans le monde entier et une législation moderne a été proposée aux États signataires afin qu’ils adoptent mieux les lois de leur pays aux clauses de la convention. De plus, des tables rondes auprès des ministères de nombreux pays ont été organisées pour les sensibiliser aux problèmes des sous-munitions.
M. Herby a, en outre, souligné que la convention instaure une nouvelle norme internationale humanitaire, « que nul ne peut ignorer », interdisant les bombes à sous-munitions à cause de leur horrible impact sur les civils. Elle a déjà été ratifiée par 19 pays qui possèdent, produisent et utilisent ces armes, notamment l’Australie, l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas, le Royaume-Uni.
Ces États participent à des conflits et s’engagent, comme on le sait, avec les États-Unis dans des guerres. Sur le plan juridique, si les membres de la convention s’engagent dans des coalitions avec des pays non signataires, les bombes à sous-munitions ne seront pas utilisées, sinon « le texte aura un impact sur les gouvernements qui ne l’ont pas ratifié ».
C’est le cas donc pour l’OTAN, qui ne peut plus faire usage de ces engins. C’était le cas d’ailleurs lors du conflit de la Serbie et du Kosovo.
« Il y a cinq ans, les États-Unis avaient refusé de changer la réglementation relative aux bombes à sous-munitions. Ce n’est plus le cas actuellement. Aujourd’hui, les Américains se sont engagés à réduire de 95 % leurs stocks de sous-munitions qu’ils comptent remplacer par des armes qui, à leur avis, ont un meilleur dispositif de sécurité », a-t-il ajouté.
La convention stigmatise les armes à sous-munitions et les pays non signataires ne peuvent donc plus défendre leur utilisation. Ils ne peuvent plus affronter l’opinion publique, a-t-il dit, rappelant que les Russes et les Géorgiens – qui n’ont pas adhéré à la convention – ont tous deux utilisé des armes à sous-munitions dans le conflit de l’Ossétie du Sud il y a trois ans. « Ils ne l’ont pas reconnu au début, mais ce cas ne se serait pas présenté si la convention n’avait pas été adoptée, a-t-il encore affirmé, ajoutant qu’à la longue cette nouvelle norme gagnera tellement en importance qu’elle influera sur les actes de tous les États en conflit, qu’ils soient signataires ou non du texte. »
Mettant l’accent sur « les perspectives à long terme », il a souligné que les armes chimiques ont été interdites dans le protocole de Genève en 1925 mais que les États-Unis ne l’ont ratifié qu’en 1975. Le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires a été adopté en 1972, mais la France et la Chine ne l’ont adopté que des dizaines d’années plus tard.
Concernant le protocole actuellement en discussion à Genève, qui n’interdit pas l’utilisation de bombes à sous-munitions mais tend à les réduire, et qui pourrait être signé par la Russie, les États-Unis, la Chine et Israël, M. Herby a indiqué que « ce texte ne renforce pas la convention dans la mesure où il permet l’utilisation des sous-munitions dans le cadre d’un traité de droit humanitaire ». « De plus, a-t-il ajouté, la version actuelle de ce protocole ne résout pas le problème humanitaire, car l’utilisation des sous-munitions produites avant 1980, et qui doivent en tout cas être détruites, est tolérée ». Et d’expliquer : « Le texte met l’accent sur les armes nouvelles qui présentent un taux d’échec de 1 %, mais ceci n’a pas pu être prouvé. Le mécanisme d’autodestruction des bombes à sous-munitions dépend de nombre de facteurs, notamment le stockage, l’impact, le transport, le volume... C’est comme une réaction en chaîne. De plus, d’après l’expérience du Liban, bombardé aussi bien avec des armes datant des années soixante-dix qu’avec des bombes modernes, il a été prouvé que le taux d’échec des sous-munitions fabriquées après 1980 s’élève à 10 % », a-t-il souligné en conclusion.
Rappelons qu’au total, entre vieilles bombes à sous-munitions et armes modernes, le taux d’échec de ces projectiles larguées au-dessus du Liban durant la guerre de juillet 2006 était de 42 %.
Durant cinq jours à Beyrouth, les représentants des États, institutions onusiennes et ONG internationales ont discuté divers points relatifs aux modalités d’application de la convention, dont son universalisation, l’assistance aux victimes et la coopération entre les États membres.Pour les personnalités présentes dans la capitale libanaise, le texte de la convention ne perd pas de...
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