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Politique - Liban-Sud

À Hebbariyé, les villageois entrent malgré eux de plain-pied dans la guerre

Les funérailles des sept membres de « l’Association médicale islamique » se sont déroulées en début d'après-midi. 

À Hebbariyé, les villageois entrent malgré eux de plain-pied dans la guerre

L'impact de la frappe israélienne mardi soir dans le village de Hebbariyé qui a tué 7 secouristes du centre de « l'Association médicale islamique », affiliée à la Jamaa Islamiyaa. Photo DR

Dans le petit village de Hebbariyé, dans le Arkoub (Liban-Sud), les habitants sont sous le choc. Pour la première fois depuis le début des combats entre Israël et le Hezbollah le 8 octobre, cette bourgade sunnite de près 2 000 habitants a été visée par l’aviation israélienne pendant la nuit dernière. L’attaque ciblée sur le centre d’un étage de « l’Association médicale islamique », affiliée à la Jamaa islamiya, a tué sept jeunes secouristes, le plus âgé ayant 25 ans, et tous originaires du village.

« Jusque-là, le cœur du village était épargné, mais ce qui s’est passé change la donne », résume Yasser, un habitant, à L'OLJ. Les abords de la zone avaient déjà été frappés à plusieurs reprises par des tirs d'artillerie, tandis qu'une frappe de drone y avait tué trois membres de la Jamaa islamiya mi-mars.

Cet après-midi, une atmosphère plombante régnait dans le village, alors que les corps d’Abdallah Atoui, Mohammad Atoui, Bara' Abou Kaïs, Abderrahmane Chaar, Hussein Chaar Ahmad Chaar et de Mohammad Hamoud étaient enterrés. « Bara’ voulait quitter plus tôt le café, on l’a retenu pour chanter parce qu’il a une belle voix. Puis il a filé peu après minuit rejoindre ses amis au centre », raconte Ziki, 35 ans, joint au téléphone. En chemin, Bara’ croise un autre copain qui lui aurait fait part de son « mauvais pressentiment ». « Dis aux jeunes de ne pas trop traîner dans le centre », lui aurait-on dit. Selon plusieurs habitants interrogés, des drones israéliens rôdaient dangereusement depuis plusieurs jours au-dessus du village, laissant présager du pire. « Bara’ lui a sorti une blague sur les MK (drones) et a continué son chemin », déplore Ziki.

De haut en bas et de gauche à droite: Abderrahmane Chaa, Hussein Chaar, Ahmad Chaar, Mohammad Hamoud, Mohammad Atoui, Abdallah Atoui et Bara' Abou Kais.

Peu après minuit trente, le bruit d’un missile s’est fait entendre suivi d’une forte explosion secouant les habitations. Assaad s’est réveillé en panique et a couru dans la chambre de ses deux enfants de 11 et 8 ans. « Les vitres ont explosé, mais heureusement ils n’ont pas été blessés », raconte-t-il. Son immeuble se trouve en face du centre médical. Depuis son toit, on aperçoit le lieu réduit à néant, ainsi que des dégâts matériels sur les habitations et les véhicules stationnés tout autour. « A cause de leur présence (celle de la Jamaa islamiya) au village, j'étais persuadé que ça allait arriver », dit Assaad. Dans la nuit du drame et plus tard vers l’aube, des mouvements de départs ont été aperçus au village, avec plusieurs voitures quittant la région pour se mettre à l’abri.

« Crime odieux »
La défense civile s’est précipitée sur les lieux peu après la frappe qui a provoqué un incendie. Six corps ont d’abord été découverts. « C’était la panique, il n’y avait pas d’électricité. Le corps de Bara’ a été retrouvé en dernier. Il ne restait presque plus rien de lui. Ses membres étaient dispersés un peu partout », déplore Ziki qui se trouvait sur les lieux.

Une dizaine de jeunes avaient pour habitude de se réunir au centre tous les soirs jusque tard dans la nuit. Dix minutes avant le drame, alors qu’ils étaient neuf, deux d’entre eux sont rentrés chez eux, dont un après avoir reçu un appel de sa mère lui ordonnant de rentrer « parce qu’(il) a cours à l’université le matin ».

Les funérailles des sept secouristes à Hebbariyé. Photo DR

L'Association médicale islamique a dénoncé dans son communiqué « un crime odieux à tous points de vue ». « C'est une violation criante des lois et conventions internationales, et l'auteur de ces crimes en porte l'entière responsabilité », poursuit le texte. L'Association demande aux autorités libanaises de « prendre les mesures nécessaires pour poursuivre les criminels dans les tribunaux internationaux ». Le Hezbollah a également condamné « une agression criminelle odieuse ». Le parti a par la suite lancé des dizaines de roquettes, en guise de représailles, contre la ville de Kyriat Shmona, dans le nord d'Israël, où un civil a été tué selon les secours israéliens. D'après cette source israélienne citée par l'AFP, il s'agit d' « un ouvrier de 25 ans », non-résident de la ville, qui a été retrouvé dans les décombres d'une fabrique touchée par une frappe.

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Avichay Adraee, porte-parole arabophone de l'armée israélienne, a pour sa part affirmé que cette dernière a « éliminé un terroriste important» , dans un message posté sur X,  avant d'ajouter qu'il « a été tué avec d'autres saboteurs qui étaient avec lui dans le bâtiment ». « La nuit dernière, les avions de guerre ont attaqué un bâtiment militaire à Hebbariyé au Liban-Sud, où un terroriste important appartenant à la Jamaa Islamiya a été éliminé », indique le militaire israélien. L'homme en question « était impliqué dans des opérations menées précédemment contre le territoire israélien, et a été tué avec d'autres saboteurs qui étaient avec lui dans le bâtiment ».

Départs du village
A Hebbariyé, comme dans les autres villages sunnites du Arkoub, la résistance à Israël est une cause sacrée : sur les terres de ce qu’on appelait autrefois le Fatehland, chaque famille a eu son lot de prisonniers ou de martyrs. Mais la présence aujourd’hui de la Jamaa islamiya, un groupe devenu une excroissance du Hamas, et qui se bat dans l’ombre du Hezbollah, n’est plus la bienvenue au village. La Jamaa reconnaît officiellement avoir perdu cinq de ses membres depuis le début des hostilités en octobre, trois tués au Liban-Sud en mars et deux lors de l’attentat qui a visé le numéro deux du Hamas au Liban, Saleh el-Arouri, le 2 janvier dernier dans la banlieue sud de Beyrouth. Jusque-là préservée, Hebbariyé accueille depuis le début du conflit des habitants des bourgades voisines comme Kfar Chouba et Kfar Hamam, régulièrement bombardées et désormais quasiment vides. Mais le revirement de cette nuit pourrait changer la donne. Car la peur a gagné les foyers, et de nombreux habitants fustigent la présence du groupe islamiste, lui reprochant de mettre le village entier en péril.

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« Le Hezbollah voulait sa couverture sunnite qu’il a trouvé avec la Jamaa, mais ces jeunes ne sont pas préparés à la résistance. Ils n’ont ni expérience militaire ni celle des armes », déplore pour sa part Yasser, qui travaille dans une ONG locale. « C’est clairement un message des Israéliens pour lui dire de ne pas se mêler au conflit. Il met tout le village sous leurs radars », ajoute-t-il, rappelant qu’il abrite aussi un centre militaire, et que plusieurs cadres de la Jamaa résident à Habbariyé parmi le reste de la population. « Il est certain que tout le monde les fuit désormais comme la peste », commente de son côté un villageois qui a requis l'anonymat. 

Assaad et Ziki, tous deux pères de familles, affirment avoir décidé aujourd’hui d’envoyer leurs proches à Beyrouth. Tout comme Emm Mohammad qui, après les condoléances aux familles des martyrs, compte elle aussi regagner la capitale. « Je suis triste pour ces jeunes, mais j’ai deux garçons de 18 et 20 ans que je ne peux pas empêcher de sortir le soir. J’ai désormais peur qu'ils se trouvent au mauvais endroit au mauvais moment », confie-t-elle. 

Dans le petit village de Hebbariyé, dans le Arkoub (Liban-Sud), les habitants sont sous le choc. Pour la première fois depuis le début des combats entre Israël et le Hezbollah le 8 octobre, cette bourgade sunnite de près 2 000 habitants a été visée par l’aviation israélienne pendant la nuit dernière. L’attaque ciblée sur le centre d’un étage de « l’Association médicale...

commentaires (3)

Les habitants n’ont qu’à se rebeller et ça a un prix. Morts pour morts mieux vaut mourir debout qu’à genoux. Les islamistes pullulent dans notre pays et le HN les encourage à élargir le terrain de guerre sur notre territoire pour le détruire entièrement. Qu’attend l’armée pour voler au secours des habitants pris en otages pour les libérer avec leur aide de tous ces mercenaires sur notre sol? On en a marre de subir les diktats des fossoyeurs et usurpateurs de notre pays, il faut que cela cesse le plus tôt possible.

Sissi zayyat

12 h 08, le 28 mars 2024

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Commentaires (3)

  • Les habitants n’ont qu’à se rebeller et ça a un prix. Morts pour morts mieux vaut mourir debout qu’à genoux. Les islamistes pullulent dans notre pays et le HN les encourage à élargir le terrain de guerre sur notre territoire pour le détruire entièrement. Qu’attend l’armée pour voler au secours des habitants pris en otages pour les libérer avec leur aide de tous ces mercenaires sur notre sol? On en a marre de subir les diktats des fossoyeurs et usurpateurs de notre pays, il faut que cela cesse le plus tôt possible.

    Sissi zayyat

    12 h 08, le 28 mars 2024

  • "Le Hezbollah a également condamné « une agression criminelle odieuse »". Oui! Il s’agit bien dun "crime odieux", mais le Hezbollah en porte la responsabilité à 50%

    Yves Prevost

    07 h 43, le 28 mars 2024

  • LES CIVILS SONT BOMBARDES DANS LES VILLAGES BDU SUD HABITES CAR UTILISES COMME LANCEMENTS DE ROQUETTES ET LE HEZBOLLAH PREND LA REVANCHE... DEVINEZ ! IL BOMBARDE METULA ET KERIET SCHMONA ET LEURS ALENTOURS VIDES DEPUIS LE 8 OCTOBRE. IL SE RIT DES SUDISTES COMME QUOI IL PREND REVANCHE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    21 h 11, le 27 mars 2024

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