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Lifestyle - Vient de paraître

Quand le Libanais crie sa colère... en images

Des photographies d’un peuple en liesse qui bat le pavé, des peintures, des slogans et banderoles réclamant un nouveau Liban... Rassemblée dans un ouvrage édité par la Fondation Diane Sfeir Fadel, l’iconographie de la contestation résume l’essence même de l’esprit de la révolte du 17 octobre.

Photo Cliff Makhoul

Koullouna lil watan (Tous pour la patrie) est l’hymne national rassembleur des Libanais. C’est aussi le titre d’un recueil de 225 photographies témoignant des moments forts des premières semaines de la thaoura. Des images sélectionnées par Diane Sfeir Fadel et rassemblées dans un ouvrage édité par sa fondation qu’elle signera ce dimanche 15 décembre à l’ABC Department Store L0, à partir de 16 heures.

Les clichés que déroule Koullouna lil watan constituent notre mémoire à tous. Ce sont les images d’un mouvement national exceptionnel et d’un peuple en colère étrillant un pouvoir accusé de tous les maux. « Vous avez volé le pays, vous l’avez noyé sous les déchets, vous l’avez affamé ; vous l’avez fait émigrer. » À l’amertume, à la colère, déclinées sur fond noir, succèdent en rouge les petites victoires qui font la différence entre hier et aujourd’hui. « Nous avons brisé les barrières et le mur de la peur ; du clientélisme, nous nous sommes libérés, et nous nous sommes solidarisés. La révolution ira jusqu’au bout. Jusqu’à ce que toute la classe politique “tous, sans exception”, quitte le pouvoir. » Les mots ont une forte résonance. Rien ni personne ne peut arrêter une foule qui réclame ses droits. Même pas quand les contre-révolutionnaires lâchent « leurs loups ». La photo de cet homme torse nu, armé d’un bâton et menaçant de l’abattre violemment, le 29 octobre, sur une manifestante de la place des Martyrs, est devenue virale. Elle est naturellement publiée dans ce recueil.

Un manifeste en couleurs

« Ce que nous Libanais vivons actuellement écrit une page importante de notre histoire, note dans la préface Diane Fadel. Révolution pacifique et nombreuses victoires seront liées à jamais dans cette épopée (…) Aux yeux de tous, cette révolution du 17 octobre aura représenté le rêve qu’ils ont tous eu et fini par réaliser (…) En un grand nombre d’images et peu de mots, nous avons voulu sauvegarder et partager avec vous tous ces arrêts dans le temps, attrapés au vol, ces déclics expressifs de moments uniques de notre histoire. »

Quels que soient les supports ou les formats – slogans d’affiche, phrases coups de poing, graffitis, photographies –, les images publiées sont indissociables de la mobilisation contestataire. Saisies par 27 photographes, elles ont été classées en six chapitres : Slogans ou messages du peuple ; La révolution en mouvement ; La citoyenneté « verte » en action ; Explosion des talents ; Solidarité ; Régénérescence. Chaque chapitre est accompagné d’un court texte introductif (trilingue, arabe, français et anglais) écrit par Diane Fadel.

Mémoire des murs...

Le vent de la liberté a rarement soufflé plus fort que de nos jours, accélérant le rythme même de l’histoire. À la poursuite de l’instant à capturer, les photographes ont immortalisé les événements et les masses révolutionnaires occupant les places du pays.

Et en première ligne, les femmes qui font porter haut et fort leur voix pour leurs droits. Lois sur l’héritage, le divorce, la garde des enfants ou encore le mariage civil, les Libanaises comptent bien récolter les fruits de cette « révolution d’octobre ».

Mais à travers leur objectif, une autre histoire se donne à lire : celle des murs que les tagueurs et graffeurs ont réquisitionnés pour s’y exprimer. Acte de révolte, geste créatif à la fois drôle et incisif, leur production revêt bien une signification protestataire. L’Œuf, qui porte les stigmates de la guerre du Liban, a même pris des couleurs. Quant aux slogans et dessins, ils pullulent sur toutes les façades du centre-ville de Beyrouth, notamment à Lazarieh et à la place Riad el-Solh : « Ne perdez pas espoir », « Le pouvoir au peuple », « Assez, c’est assez », et l’incollable slogan « Kellon, yaani kellon »... Chacun y va de sa propre expression. Le recueil met également en lumière l’engagement civique d’une armée de volontaires, hommes, femmes et enfants, équipés de gants, de masques et de grands sacs poubelles, s’affairant à trier les déchets laissés la veille par les manifestants. Engagement hautement symbolique dans un pays en butte à une crise des déchets depuis des années.

Solidarité

« Sans les Libanais, le Liban serait exsangue et perdrait son sens, son originalité, sa marque de fabrique, sa pluralité et sa vocation », relève par ailleurs l’auteure, dont le livre déroule les marches et rassemblements majoritairement placés sous le signe de l’unité et de la solidarité. Des initiatives organisées dans la bonne humeur, au son de chants révolutionnaires et des slogans, devenus rengaines de la révolte. Ou encore la veillée à la lueur des bougies à la mémoire de Ala’ Abou Fakhr, le « martyr de la révolution », tué sous les yeux de sa famille dans la nuit du 12 au 13 novembre. Le premier tome de Koullouna lil watan permet de (re)découvrir le mouvement tel qu’il fut vécu et rêvé en octobre-novembre 2019. Plus qu’un livre, c’est un document à garder dans sa bibliothèque.



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commentaires (2)

Quand Mr Aoun et Nasrallah se décideront le gouvernement sera fait avec la bénédiction des Ayattollahs

Eleni Caridopoulou

20 h 41, le 12 décembre 2019

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Commentaires (2)

  • Quand Mr Aoun et Nasrallah se décideront le gouvernement sera fait avec la bénédiction des Ayattollahs

    Eleni Caridopoulou

    20 h 41, le 12 décembre 2019

  • Toutes ces photos nous émeuvent aux larmes sauf les gens du palais et leurs bouffons qui sont tournés vers leurs intérêts et ne voient ni n'entendent le gémissement de toute la nation et sa résilience après avoir subi beaucoup d'injustice et de terreur et qui utilise toutes les forces qui lui restent pour enfin s'en sortir. Un homme d'état dépourvu de sentiment pour les citoyens est un homme qui ne peut pas conduire un pays et son peuple à bon port. Le nôtre le montre chaque jour il est tourné vers ses dévoyés et nous mène droit dans le mur. Au nom d'une main-mise étrangère qui l'a placé dans ce fauteuil et sans laquelle il ne représente plus rien. Nous avons attendu longtemps un sursaut patriotique de sa part pour lui pardonner, mais apparemment il ne sait pas ce que ça veut dire. Il nous a perdu. Il veut nous ramener vers lui par la force mais ne parvient même pas puisque c'est écrit: Nous vaincrons par amour, l'amour de notre pays. Quant à lui, lorsqu'il rencontra bientôt la vraie divinité suprême elle lui dira qu'il avait fauté.

    Sissi zayyat

    19 h 16, le 12 décembre 2019

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