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À La Une - Irak

Neuf manifestants tués à Bagdad, sanctions américaines contre des miliciens

Sistani prend ses distances avec la classe politique.

Une manifestation place Tahrir à Bagdad, le 6 décembre 2019. AFP / AHMAD AL-RUBAYE

Après quelques jours d'accalmie, la violence a de nouveau explosé vendredi en Irak où au moins neuf manifestants ont été tués à Bagdad, au moment où Washington dénonçait "l'ingérence" de Téhéran dans ce pays et imposait des sanctions à des miliciens pro-iraniens.

Ces nouveaux décès portent à près de 440 le nombre de personnes tuées --essentiellement des manifestants-- depuis le lancement début octobre d'un vaste mouvement spontané de contestation contre le pouvoir. Quelque 20.000 personnes ont également été blessées.

Les neuf manifestants ont été tués et plusieurs dizaines d'autres blessés en soirée près de la place Tahrir, épicentre de la contestation à Bagdad contre le pouvoir et son parrain iranien. Le bilan pourrait encore augmenter, des manifestants sur place ayant fait état de tirs intenses qui se poursuivaient toujours vendredi tard.

Les contestataires ont accusé des hommes armés arrivés à bord de pick-up de les viser pour les déloger d'un parking à plusieurs étages qu'ils occupaient depuis plusieurs semaines, aux abords du pont Senek, non loin de Tahrir. En soirée, ces hommes armés ont repris le parking, selon des médecins et des manifestants sur place. La télévision d'Etat a rapporté que le bâtiment avait été incendié par "des hommes non identifiés".

La journée avait pourtant été calme sur la place Tahrir où d'importants rassemblements se sont tenus, rejoints par des dignitaires religieux venus des sanctuaires chiites du pays. Mais depuis jeudi, les manifestants disaient redouter des violences après que des partisans des paramilitaires pro-Iran du Hachd al-Chaabi, coalition hétéroclite désormais intégrée à l'Etat, s'y étaient livrés à une démonstration de force.



(Lire aussi : L’Iran transfère à nouveau des missiles en Irak)



"Bête noire" de Washington
En soirée, les Etats-Unis ont annoncé avoir imposé des sanctions sur trois chefs de factions du Hachd pour "violations graves des droits humains et corruption", ainsi qu'un sulfureux politicien sunnite.

Washington a également dénoncé "l'ingérence" iranienne comme une "grave violation de la souveraineté irakienne", alors que deux émissaires de Téhéran --le général Qassem Soleimani et le dignitaire chiite en charge du dossier irakien au Hezbollah, Mohammed Kaoutharani-- participent aux négociations pour remplacer le gouvernement démissionnaire en Irak.

"Le peuple irakien veut récupérer son pays. Il demande des réformes authentiques et veut des dirigeants dignes de confiance, qui feront passer les intérêts nationaux irakiens en priorité", a déclaré le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo dans un communiqué.

L'un des Irakiens sanctionné est Qaïs al-Khazali, chef du groupe armé Assaïb Ahl al-Haq, l'un des plus importants du Hachd, "bête noire" des Américains et déjà sous le coup de sanctions. Les deux autres sont Laith al-Khazali et Hussein Falil Aziz al-Lami, chef de la puissante sécurité du Hachd qui regroupe les unités d'élite de la coalition. Le dernier homme, Khamis al-Khanjar, est, lui, sanctionné pour "corruption", un mal endémique en Irak qui a déjà coûté au pays --l'un des plus riches en pétrole du monde-- l'équivalent de deux fois son PIB.

A la mi-journée, le grand ayatollah Ali Sistani, plus haute autorité religieuse chiite d'Irak, avait pris ses distances avec une classe politique conspuée par la rue depuis le 1er octobre et appelé à rejeter "les ingérences étrangères" dans le choix du prochain chef de gouvernement. Le dignitaire de 89 ans qui passe pour avoir fait et défait tous les Premiers ministres depuis le renversement du dictateur Saddam Hussein après l'invasion américaine du pays en 2003, a indiqué qu'il ne jouait "aucun rôle" dans les négociations en vue de la désignation d'un nouveau Premier ministre. La semaine dernière, c'est un prêche en son nom qui avait précipité la chute du gouvernement d'Adel Abdel Mahdi, un an après sa prise de fonctions.



(Lire aussi : Les trois grands enjeux de l’impasse politique en Irak)



Religieux sur Tahrir
Les manifestants, eux, refusent quiconque sera nommé à la tête d'un pouvoir qui n'a pas été entièrement revu. Ils veulent une nouvelle Constitution et une nouvelle classe politique.

Vendredi, des centaines de clercs chiites et d'employés des lieux saints chiites d'Irak se sont joints aux manifestants de Tahrir. "Nous sommes solidaires des manifestants pacifiques, nous voulons des élections rapidement et un nouveau Premier ministre", a déclaré à l'AFP Fadhel Aouz, venu de Kerbala. Ce soutien des religieux a été exprimé au lendemain du déferlement place Tahrir de milliers de partisans du Hachd, veut croire Thaër Steifi, un manifestant de 41 ans. "Comme on redoutait des violences, on a appelé les religieux des lieux saints et ils sont venus".

Les morts de vendredi soir prouvent que cela n'a pas suffi.


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