Après avoir déclaré qu'il ne se présenterait pas devant la Justice dans le cadre des soupçons de dépenses de onze milliards de dollars entre 2006 et 2008, et après l'annonce du report de son audience du 7 au 14 novembre, l'ancien Premier ministre libanais Fouad Siniora a finalement été entendu jeudi par le procureur financier, Ali Ibrahim, rapporte l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Selon l'agence, l'audience a duré près de trois heures. Des informations confirmées par le procureur lui-même qui a déclaré à al-Mayadeen qu'il a "longuement entendu l'ancien Premier ministre". Aucun détail supplémentaire sur cette audience n'était disponible pour le moment.
Dans un entretien au quotidien panarabe Achark al-Awsat, Fouad Siniora avait pourtant affirmé qu'il ne se présentera pas au bureau du juge Ibrahim, soulignant qu'il "n'avait rien à ajouter" concernant cette affaire. "Si je pouvais remonter le temps, je referai la même chose", a assuré l'ancien Premier ministre. "Je suis un homme qui se place sous la loi et j'ai pleine confiance dans mon action envers le Liban et les Libanais, et j'aurai refait la même chose aujourd'hui, si j'étais Premier ministre", a affirmé M. Siniora. "J'ai déjà présenté un projet de loi pour le contrôle des comptes de l'Etat libanais en 2006, mais ce texte est encore dans les tiroirs du Parlement", a-t-il regretté, avant de qualifier l'affaire des 11 milliards de "tempête dans un verre d'eau". "J'ai préparé une étude complète que je vais transmettre au président de la République, Michel Aoun, au Conseil des ministres et au Parlement, afin de clarifier tous les détails pour mettre fin aux informations qui trompent les gens et afin que tout soit clair pour tout le monde", a conclu l'ancien Premier ministre.
A Saïda, près du domicile de l'ancien Premier ministre, quelque dizaines de protestataires se sont rassemblés pour dénoncer la politique de M. Siniora, scandant "On veut les 11 milliards". La veille, des jeunes s'étaient rassemblés au même endroit, accusant M. Siniora d'être "un voleur". Plusieurs centaines d'étudiants se sont également rassemblés dans la rue Bliss, dans le quartier de Hamra, à Beyrouth, où M. Siniora a un autre domicile.
(Pour mémoire : Gestion des comptes publics : les principaux arguments de Fouad Siniora)
Dans un livre intitulé “Le quitus impossible” et publié en 2013, Ibrahim Kanaan, député du Courant patriotique libre fondé par le président de la République Michel Aoun et dirigé par Gebran Bassil, accuse Fouad Siniora d’avoir manipulé les comptes et détourné des fonds publics. Ce dernier lui a répondu dans un ouvrage, l’accusant de calomnie.
Le CPL reproche à M. Siniora d’avoir dépensé ces 11 milliards sans accord du Parlement. Se réfugiant comme les gouvernements qui ont suivi jusqu’en 2017 dans la nécessité d’assurer la continuité de la gestion des affaires courantes pour justifier le détournement de la règle du douzième provisoire, l’ancien Premier ministre a néanmoins assuré en mars dernier que les fonds avaient bien servi à financer l’action de l’État sur cette période.
M. Siniora avait notamment expliqué que les dépenses publiques avaient été supérieures sur la période allant de 2006 à 2009 aux 10 000 milliards de livres prévus par an – soit 40 000 milliards de livres au total (26,5 milliards de dollars) – via la règle du douzième provisoire, en raison notamment de la hausse des prix du pétrole ou des dépenses engagées suite à la guerre de juillet 2006 contre Israël. Des aléas qui ont porté le total des besoins de l’État, selon lui, à 56 590 milliards de livres (37 milliards de dollars) qui ont été financés par des avances du Trésor.
En début de soirée, hier, des protestataires se sont rassemblés devant le domicile de M. Sinora, rue Bliss, à Beyrouth, l'accusant d'être un "voleur". Des agents des forces de l'ordre étaient également déployés.
(Lire aussi : Jour XXII : marches estudiantines, blocage des administrations publiques... la pression se maintient)
Mercredi également, le procureur financier avait lancé des poursuites pour blanchiment d'argent et échange de pots-de-vin contre le président de l'Agence pour la sécurité de l'aviation civile à l'Aéroport international de Beyrouth, Omar Kaddouha.
Le juge Ibrahim a déjà lancé dernièrement plusieurs procédures contre des responsables et sociétés accusés de corruption. Hier encore, il a engagé des poursuites contre l'ancien ministre Fayez Chokr (Parti syrien national social) pour "négligence dans l’exercice de sa fonction", suite à une plainte déposée par le collectif d’avocats "Moutahidoun". Le groupe rapporte que "M. Chokr, qui est médecin de métier, était enregistré auprès de la Caisse nationale de Sécurité sociale en tant que médecin observateur sans avoir jamais honoré sa mission", révèle une source proche du dossier à L’Orient-Le Jour. Lundi, le procureur avait engagé des poursuites judiciaires contre le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) et plusieurs sociétés pour gaspillage de fonds publics dans le dossier du barrage de Brissa, sur les hauteurs de Denniyé (Liban-Nord). Ce barrage n’a jamais été en mesure, depuis son inauguration en 2001, de stocker efficacement de l’eau.
Ces actions en justice interviennent au moment où le Liban connaît une contestation populaire inédite qui touche tout le territoire depuis le 17 octobre. Les Libanais réclament, par dizaines de milliers, la chute de la classe dirigeante, accusée de corruption.
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Ah, la mafia.... quand elle tient un pays....elle le suce jusqu'au sang.... Au Liban, ce n'est pas une mais plusieurs mafia nous dirigent.....mafia politiques, mafia religieuses..... pauvre Liban.... cela ne sera pas aussi facile qu'on croit... attendez vous qu'ils se rebiffent..ils vont se battre.... et ils ont les moyens....ce sont les mêmes qui n'ont rien fait depuis toujours qui se proposent de trouver les solutions.... devinez lesquelles? pour le mariage civile réclamé par les jeunes libanais, on va commencer par demander au patriarche et au mufti ce qu'ils en pensent... on formera une commission etc....Pour les déchets, on croit que seul le Liban a ce problème ...alors que les solutions existent depuis belle lurette...il n'y a qu'au Liban que ce problème est insoluble...devinez pourquoi... le partage du bakchich...Ils se croient indispensables...et il y a des gens qui les soutiennent encore malgré les manif... voyez ceux qui hurlent "birrouh, biddam. nafdika ya zaim".... tous ces gens qui croient encore que le chef a raison même s'il est voleur..... pauvre Liban.. A suivre
23 h 37, le 07 novembre 2019