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Liban - Reportage

À Ramlet el-Bayda, un cri de colère contre les infractions sur les biens-fonds maritimes

Une bousculade entre la brigade antiémeute et les manifestants, estimés à plus d’un millier, a fait un blessé.

Le drapeau libanais pour contester le vol et la corruption.

Parce que Beyrouth est une ville tournée sur la mer et parce que la mer appartient aux habitants de la ville, plus d’un millier de personnes ont pris part hier à une marche longeant le sable blond de Ramlet el-Bayda vers l’hôtel Eden Bay pour protester contre les infractions sur les biens-fonds maritimes.

La construction de cet hôtel avait mobilisé, ces dernières années, plusieurs ONG qui luttent pour la protection de l’environnement et contre la corruption. Divers sit-in avaient été organisés, mais jamais une marche pour contester la construction de cet établissement et réclamer la restitution de l’espace public aux habitants de la capitale n’avait mobilisé autant de monde.

« Hier c’était Zeytuna Bay, aujourd’hui c’est au tour de l’Eden Bay. Nous tenons à rappeler que cinq millions de mètres carrés sont construits illégalement sur la côte libanaise et font partie des infractions sur les biens-fonds maritimes », explique Mohammad Ayoub de l’ONG Nahnoo, qui avait lutté entre autres contre l’octroi des permis nécessaires à la construction de l’Eden Bay. « La municipalité de Beyrouth et le mohafez de la ville étaient de connivence… Le projet appartient à Wissam Achour, un proche du président de la Chambre, Nabih Berry », explique-t-il. « Au Liban, depuis 1925, il existe des lois qui protègent la côte, qui interdisent les constructions et qui donnent accès à tous à la plage, mais elles ne sont pas respectées. Si seulement l’État faisait payer des amendes à ceux qui ont enfreint la loi dans ce cadre ! Elles s’élèvent à 1 200 milliards de livres libanaises comme premier versement, suivies de 400 millions de dollars, payés chaque année par les propriétaires des constructions illégales le long de la côte libanaise », poursuit-il.


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Un blessé

Après une heure de marche le long de Ramlet el-Bayda, les manifestants se sont arrêtés devant l’entrée de l’Eden Bay, et certains d’entre eux ont ôté les barbelés bloquant l’accès à la plage de sable qui est tombée dans l’escarcelle de l’hôtel et est interdite au public. Une bousculade entre la brigade antiémeute et les manifestants a fait un blessé. Une centaine de manifestants ont néanoins réussi à s’approcher de la plage à proximité du bâtiment fraîchement construit. Beaucoup de manifestants étaient venus en famille, comme Khawla, qui habite le quartier Mouawad, dans la banlieue sud de Beyrouth, et travaille à l’hôpital de l’Université américaine. À ses côtés, ses deux enfants, âgés de quatre et deux ans, mangent tranquillement leur goûter. « Je promène mes enfants presque tous les jours quand il fait beau à Ramlet el-Bayda. Ils viennent jouer sur le sable. Je veux que cet espace public soit préservé », dit-elle. Abir, une architecte, tient une pancarte appelant à la préservation de l’espace public, son mari Ahmad porte leur fille de cinq mois dans les bras. « Je lutte pour le port de pêcheurs de Dalieh (à Raouché) depuis 2013. Nous avons réussi à le préserver », dit-elle. « Nous luttons pour notre avenir et celui de notre enfant », précise-t-elle. Rima, la quarantaine, responsable marketing, manifeste tous les jours depuis le 17 octobre. « Je crois dur comme fer au changement. J’ai été au centre-ville au début. Depuis hier, en plus du centre-ville, je participe à un ou deux sit-in par jour. »


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Parmi la foule de manifestants, il y avait l’entrepreneur Riad el-Assaad, ancien candidat aux élections législatives du Liban-Sud et qui a dénoncé à maintes reprises le clientélisme dans les appels d’offres et l’exécution de travaux d’infrastructure, notamment à Beyrouth. L’entrepreneur est venu, pour l’occasion, avec sa fille. Il y avait aussi le danseur Alexandre Paulikevitch. « Cette révolte n’a pas de leader, mais nous organisons tour à tour des évènements. Le sit-in devant la centrale de Zouk (qui se tiendra ce matin), c’est mon groupe. Nous coordonnons via Facebook et WhatsApp. Chacun est libre d’organiser ce qu’il veut et nous nous entraidons », précise-t-il avec entrain.

Peu après la fin de la marche, les manifestants ont ouvert la route de Ramlet el-Bayda aux voitures, applaudissant et agitant leurs drapeaux, alors que les automobilistes klaxonnaient en signe de soutien.


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commentaires (3)

A quoi cela sert-il de faire payer des amendes aux contrevenants ? Cela nous rendra-t-il les plages et bords de mer disparus à jamais ? Il faut agir avant la construction de ces édifices illégaux, car une fois édifiés, plus rien ne pourra être fait, malheureusement, la preuve: cet EDEN BAY ! Irène Saïd

Irene Said

18 h 51, le 07 novembre 2019

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Commentaires (3)

  • A quoi cela sert-il de faire payer des amendes aux contrevenants ? Cela nous rendra-t-il les plages et bords de mer disparus à jamais ? Il faut agir avant la construction de ces édifices illégaux, car une fois édifiés, plus rien ne pourra être fait, malheureusement, la preuve: cet EDEN BAY ! Irène Saïd

    Irene Said

    18 h 51, le 07 novembre 2019

  • DES MILLIARDS A RECUPERER DE L,ACCAPAREMENT DU LITTORAL ET DE LA MONTAGNE DEPUIS LA GUERRE CIVILE. CE SONT DES MONTANTS DUS A L,ETAT PLUS LES INTERETS. EDEN BAY N,EST QUE LE DERNIER DE LA LISTE MAIS LE PLUS RECENT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 27, le 07 novembre 2019

  • "Si seulement l’État faisait payer des amendes à ceux qui ont enfreint la loi dans ce cadre ! " C'est malheureusement l'Etat qui leur a délivré les permis et ne les retirent pas, malgré tous les appels dans ce sens...

    NAUFAL SORAYA

    07 h 40, le 07 novembre 2019

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