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Liban - Justice

Le parquet financier lance des poursuites contre l’ancien ministre Fayez Chokr

L’action du juge Ali Ibrahim contre le prévenu est en rapport avec ses années en tant que médecin observateur à la CNSS.


Le barrage de Brissa pendant sa construction. Naïm Assafiri/ photo d’archives

Le procureur financier, le juge Ali Ibrahim, a lancé hier des poursuites contre l’ancien ministre Fayez Chokr (Parti syrien national social) pour « négligence dans l’exercice de sa fonction », transférant son dossier au premier juge d’instruction de Beyrouth. Ce dossier a été ouvert suite à une plainte déposée par le groupe d’avocats « Moutahidoun », en relation avec le fait que « M. Chokr, qui est médecin de métier, était enregistré auprès de la Caisse nationale de Sécurité sociale en tant que médecin observateur sans avoir honoré sa mission », confirme une source proche du dossier à L’Orient-Le Jour.

Rami Alleik, de Moutahidoun, assure à L’OLJ que « M. Chokr était enregistré auprès de la CNSS durant 15 ans mais n’y avait jamais mis les pieds, d’ailleurs personne n’a entendu parler de lui, notamment dans les hôpitaux ». Selon l’avocat, suite au départ de M. Chokr de cette institution, « des indemnités de 450 millions de livres lui ont été accordées, pour un travail somme toute fictif ». « Nous suivons cette affaire de près », poursuit-il.

De son côté, M. Chokr a publié un communiqué virulent dans lequel il accuse le juge Ibrahim de « blanchiment d’argent et de détournement de fonds publics ». « Le fait que le juge ait publié sa décision dans les médias prouve son intention de nuire à ma réputation, loin du secret de l’instruction qu’il est censé honorer », poursuit l’ancien ministre, affirmant que le juge « touche quatre salaires simultanément ».

Le « barrage percé » au cœur d’une enquête

Par ailleurs, le juge Ali Ibrahim a engagé lundi des poursuites judiciaires contre le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) et plusieurs sociétés pour gaspillage de fonds publics dans le dossier du barrage de Brissa, sur les hauteurs de Denniyé (Liban-Nord). Ce barrage n’a jamais été en mesure, depuis son inauguration en 2001, de stocker efficacement de l’eau.

Des sources proches du dossier indiquent à L’Orient-Le Jour que l’accusation contre le CDR et les compagnies en charge du projet, notamment Dar el-Handassa (qui a effectué l’étude), ainsi que Batco et LK, concerne « le non-respect du cahier des charges et la négligence dans l’application des travaux sur le terrain ».

Le barrage de Brissa a été affublé du surnom de « barrage percé », et pour cause : construit dès 2001, il n’a jamais stocké efficacement de l’eau. L’affaire du barrage de Brissa avait resurgi au cours d’une séance au Parlement le 24 septembre dernier. À l’issue de cette réunion, un prêt de huit millions de dollars de la Caisse koweïtienne pour le développement économique arabe avait été approuvé en vue de la réhabilitation de cette infrastructure défectueuse, mais, en parallèle, il a été décidé qu’une enquête serait ouverte, suite à une intervention du député Hassan Fadlallah (Hezbollah).

Ce dernier a mis l’accent sur les défauts d’ingénierie qui ont rendu ce barrage inapte à stocker convenablement de l’eau : il a rappelé que la structure avait coûté à l’origine 10 millions de dollars, avant que 20 millions supplémentaires n’y soient injectés en 2003 pour tenter – en vain – d’en réparer le fond. Il a fait valoir que le nouveau prêt destiné à le réparer ne serait dépensé à bon escient que si la population pouvait en profiter, demandant qu’une enquête soit ouverte, ce qui a été approuvé. 

La ministre sortante de l’Énergie, Nada Boustani, avait, quant à elle, reconnu que suivant les réponses données par le CDR, le problème est lié à la nature de la roche à cet endroit. Cela prouve, si besoin en était, que les études préalables à la construction de ce projet n’étaient pas suffisantes. Une information confirmée par l’hydrogéologue Samir Zaatiti interrogé par L’OLJ : « Le problème de base est dans le choix du site, qui est un milieu karstique où la roche est naturellement fissurée. Dans le cas de Brissa, une roche volcanique, le basalte, s’est infiltrée dans certaines fissures, se solidifiant avec le temps. »

Les poursuites engagées par le juge Ibrahim contre le CDR et les compagnies viennent donc en réponse à la demande d’enquête formulée par les parlementaires. L’ouverture de ce dossier revêt une importance particulière, étant donné la controverse qui entoure les projets de grands barrages au Liban, notamment le barrage de Bisri (Jezzine) dont les travaux viennent d’être entamés, avec une étude d’impact environnemental datant de 2013 (selon la loi, elle ne devrait pas dater de plus de deux ans) et « des études insuffisantes concernant la nature du terrain et des ressources hydrauliques, le risque sismique ou encore les conséquences sur la nature et le patrimoine », accusent les environnementalistes et de nombreux habitants de la région.


Pour mémoire

Le « barrage percé » de Brissa au cœur d’un débat au Parlement

Le procureur financier, le juge Ali Ibrahim, a lancé hier des poursuites contre l’ancien ministre Fayez Chokr (Parti syrien national social) pour « négligence dans l’exercice de sa fonction », transférant son dossier au premier juge d’instruction de Beyrouth. Ce dossier a été ouvert suite à une plainte déposée par le groupe d’avocats « Moutahidoun », en...

commentaires (9)

Alors pour noyer le poisson on choisit de commencer par condamner un emploi soit-disant fictif pour quelques milliers de dollars pour ne pas parler des emplois effectifs qui ont ruiné le pays. Mais c’est bien. Ces petits poissons vont enfin nous mettre sur la piste des gros poissons. Tu dénonces mon petit larcin je dénonce tes millards volés est tout benef. Quand aux juges? On saura qui a couvert qui. Et ça n’est que le commencement d’un long feuilleton qui s’avère, certes désolant mais oh combien croustillant.

Sissi zayyat

11 h 45, le 06 novembre 2019

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Commentaires (9)

  • Alors pour noyer le poisson on choisit de commencer par condamner un emploi soit-disant fictif pour quelques milliers de dollars pour ne pas parler des emplois effectifs qui ont ruiné le pays. Mais c’est bien. Ces petits poissons vont enfin nous mettre sur la piste des gros poissons. Tu dénonces mon petit larcin je dénonce tes millards volés est tout benef. Quand aux juges? On saura qui a couvert qui. Et ça n’est que le commencement d’un long feuilleton qui s’avère, certes désolant mais oh combien croustillant.

    Sissi zayyat

    11 h 45, le 06 novembre 2019

  • S'IL FAUT RETENIR QUEQUE CHOSE, C'EST D.ABORD QUE LA CULPABILITE DES UNS ET DES AUTRES NE S'ARRETE PAS A CEUX QUI VOLENT L'ARGENT DU PEUPLE MAIS AUSSI S'ETEND A CEUX QUI AURAIENT MANQUE A LEUR DEVOIR ET A LEUR RESPONSABILITE. S'IL FAUT ESPERER QUELQUE CHOSE C'EST QUE CES POURSUITES ABOUTISSENT ET VITE.

    Gaby SIOUFI

    10 h 16, le 06 novembre 2019

  • Est-ce que Ali Ibrahim va être limogé comme Ghada Aoun?

    TrucMuche

    10 h 12, le 06 novembre 2019

  • Le Systeme en place se moque de l’intelligence des gens et joue encore aujourd'hui sur leur credibilite. Y aura t il aussi un autre arrêté pour stopper cette procedure contre petit larcin histoire de faire la paire a l’action ouverte par la Juge Aoun contre Gros larcin ? That is the question...

    Cadige William

    09 h 59, le 06 novembre 2019

  • Il faut quand même commencé par quelque chose! Et si trente millions de dollars n'est que du menu fretin, qu'on me les donne, je prends.

    TrucMuche

    09 h 48, le 06 novembre 2019

  • Il n'est vraiment pas bon de commencer par juger les plus petits ladrons , au lieu de commencer par les plus gros qui ont volé des dizaines de milliards de dollars !!! Ceci prouve le peu de sérieux de ces enquêteurs qui veulent se faire une publicité ! Mais c'est se moquer des gens ! Il est à craindre donc que ce "haro sur le baudet" ne soit kuste un moyen , pour les plus gros et les plus puissants , de s'en tirer plus tard ! Dieu comme La Fontaine avait raison ! Relisons la fable des animaux malades de la peste ! C'est décevant !

    Chucri Abboud

    08 h 46, le 06 novembre 2019

  • QUAND A L,EX MINISTRE FAYEZ CHOKR C,EST UN PETIT EXEMPLE. IL FAUT POURSUIVRE LES GRANDS REQUINS DE LA CORRUPTION... EN EXEMPLE LE SCANDALE DU SIECLE DES BARGES TURQUES !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 15, le 06 novembre 2019

  • FAUT POURSUIVRE LES SOCIETES ET LES PERSONNES QUI AVAIENT FAIT L,ETUDE DES LIEUX.

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 12, le 06 novembre 2019

  • Et voilà le cirque qui commence: des petites accusations isolées qui vont mener à des contr’accusations gratuites... Des enquêtes débutent, on fait semblant de lutter contre la corruption en s’attaquant à des petits poissons qu’on peut facilement pêcher à la ligne, sans avoir le courage de s’attaquer aux vrais requins et baleines de la finance qui demeurent intouchables car dangereux et bien défendus! Pourvu que cette révolution ne finisse pas en mascarade dramatique sans queue ni tête et ne mène à rien! D’autant que les expériences passées des révoltes populaires qui n’ont pas de leaders bien connus, ont toujours été récupérées par les pouvoir totalitaires et militaires et ont mal fini! J’espère toujours que je me trompe, mais la réalité vous rattrape!

    Saliba Nouhad

    02 h 49, le 06 novembre 2019

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