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Économie - Budget 2019

Bassil continue de défendre l’option d’une baisse plus drastique du déficit

Le chef du CPL, qui souhaite que l’intégralité de ses propositions soient discutées, s’est défendu de toute volonté de « bloquer » ou « retarder » l’adoption du texte.


Le ministre des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, hier, lors de sa conférence de presse. Photo ANI

Le ministre des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, a une nouvelle fois exprimé hier son insatisfaction par rapport à la dernière version du budget de 2019 lors d’une conférence de presse qu’il a tenue à l’issue de la réunion hebdomadaire de son bloc parlementaire. « Certains au sein du gouvernement estiment que ce qui a été fait est suffisant. Nous pensons que ce n’est pas le cas. C’est pour cela que nous devons saisir cette opportunité pour agir », a affirmé Gebran Bassil. « Le pays a besoin de beaucoup de réformes, mais certains ne veulent en faire que très peu. Voilà où résident les divergences. Il n’y a pas de divergences avec un responsable en particulier. Nous voulons tous réduire le déficit et adopter le budget le plus vite possible. Ce qui nous manque, c’est une décision politique pour assumer le prix de la réduction du déficit », a-t-il poursuivi.

Après une quinzaine de réunions consacrées par le Conseil des ministres à l’examen de la première version du budget soumise par le ministre des Finances Ali Hassan Khalil, Gebran Bassil a remis le 14 mai à ses collègues une quarantaine de mesures additionnelles visant à réduire davantage le déficit public. Si certaines d’entre elles ont déjà été approuvées cette semaine, d’autres n’ont pas été examinées par les membres du gouvernement, puisque M. Khalil avait considéré avoir déjà atteint l’objectif souhaité en matière de réduction de déficit.

De vives tensions ont éclaté entre les deux hommes, ce qui a poussé le Premier ministre Saad Hariri à fixer un délai de 48 heures aux membres de son gouvernement afin d’étudier les propositions restantes, avant d’en débattre aujourd’hui lors d’une nouvelle réunion du Conseil des ministres, annoncée une nouvelle fois comme étant la dernière avant le vote du budget, y compris par Gebran Bassil. « Nous allons poursuivre nos efforts positifs afin d’achever l’étude de l’avant-projet (aujourd’hui) de sorte à ce que le budget soit voté au Parlement dès le mois de juin et que nous puissions nous consacrer à l’étude du budget de 2020 », a assuré le chef du CPL, avant de nier toute volonté de sa part de « bloquer » ou « retarder » l’adoption du texte.


(Lire aussi : Le bras de fer entre Bassil et Khalil appelé à se dénouer)


Le vice-président du Conseil des ministres, Ghassan Hasbani, a déclaré hier à Reuters qu’il avait de « profondes inquiétudes » concernant une éventuelle prolongation des débats sur le projet de budget alors que le gouvernement a déjà reporté à plus d’une reprise la date limite qu’il s’était imposé.

Interrogé à ce sujet par L’Orient-Le Jour, le conseiller économique du CPL, Charbel Cordahi, estime que « le budget tel que présenté par M. Khalil comporte quelques ajustements positifs, mais reste insuffisant pour réduire le déficit public, contenir les risques croissants sur la balance des paiements et relancer la croissance économique. Il faut adopter des mesures plus restrictives tant au niveau des dépenses que des recettes ». Contrairement à M. Khalil qui annoncé que le déficit public devrait représenter 7,5 % du PIB en 2019, M. Cordahi affirme qu’avec la version actuelle du budget, il serait plutôt autour de 9 %, puisqu’il est « estimé à plus de 5,5 milliards de dollars, en incluant les transferts du Trésor à Électricité du Liban ».

La BDL appelée à contribuer davantage

Gebran Bassil a déjà réussi à inclure une dizaine de ses propositions dans la dernière version du projet de budget, dont notamment la mesure prévoyant l’instauration d’une taxe de 2 % sur les importations. « Cette disposition ne vise pas uniquement à augmenter les recettes fiscales. Elle a également un objectif économique, celui de rediriger la consommation vers la production locale et de soutenir l’industrie afin de lui permettre de se renforcer et d’augmenter ses exportations », explique Charbel Cordahi.

D’autres propositions n’ont,  en revanche, pas été examinées. « Étant donné que les taux d’intérêt n’ont cessé d’augmenter, nous considérons que l’impôt sur ces intérêts doit être relevé de 7 à 12 %, et non à 10 % comme proposé dans l’avant-projet du budget et ensuite adopté. Nous souhaitons aussi soumettre la Banque du Liban (qui détient une importante partie des obligations étatiques) à cet impôt, alors qu’elle en est jusqu’ici épargnée », a détaillé le conseiller économique du CPL.


(Lire aussi : Morgan Stanley « en partie » rassurée par l’évolution des débats sur le budget)


Charbel Cordahi estime que la version actuelle du budget ne fait que décaler certains paiements au lieu de réduire les dépenses structurelles. « Il faut agir sur le service de la dette de manière à le réduire d’un milliard de dollars par an. Cela devra se faire par le biais de swaps avec la BDL sur les 38 milliards de dollars d’obligations qu’elle détient dans son portefeuille », suggère-t-il.

M. Khalil a confirmé le week-end dernier que le gouvernement envisageait bien d’émettre des bons du Trésor d’une valeur de 11 000 milliards de livres libanaises, soit plus de 7,2 milliards de dollars, à taux réduits (à 1 %) afin d’alléger le service de la dette et permettre à l’État d’économiser environ 663 millions de dollars en 2019. Mais le CPL souhaite que cette opération « porte graduellement sur une plus grande partie des bons du Trésor détenus par la BDL, soit l’équivalent de 30 milliards de dollars, ce qui permettra de réduire progressivement le service de la dette, à raison d’un milliard de dollars par an », poursuit M. Cordahi.


Les mesures de Bassil toujours non tranchées

Sur les pensions de retraite, « nous souhaitons que les employés, les militaires et les professeurs contribuent davantage, car le coût actuariel dépasse les 6 % déduits actuellement de leurs salaires », indique le conseiller économique du CPL.

Gebran Bassil souhaite aussi fermer certaines institutions devenues obsolètes, dont le ministère des Déplacés, le ministère de l’Information, la Direction des céréales et de la betterave sucrière, le Conseil du Sud, la Direction de l’énergie nucléaire, l’Établissement public des marchés de consommation ou encore l’Office national de l’emploi.

Pour le moment, deux de ses propositions auraient été discutées au cours de réunions d’un comité interministériel restreint tenues mercredi et hier : celle visant à réduire le plafond des contributions de l’État aux frais de scolarité des enfants de fonctionnaires et celle de la remise en question de la mesure n° 3 sur les indemnités des militaires. « Il n’est pas normal qu’un militaire qui assure une permanence dans un dispensaire à Batroun bénéficie de la mesure numéro trois comme les militaires déployés sur le front », a encore dénoncé hier le chef du CPL.

La loi libanaise prévoit trois niveaux d’alerte, dits « mesures », allant de la plus faible (n° 1) à la plus élevée (n° 3) avec des compensations financières assorties à chaque échelon. Depuis 2006, le Liban est au troisième de ces échelons. L’enjeu est de savoir si ces niveaux d’alerte doivent être tous maintenus en l’état et s’appliquer de manière uniforme à l’armée – qui dépend du ministère de la Défense – et aux forces de sécurité – qui sont placées sous la tutelle du ministère de l’Intérieur.

Une autre de ses propositions, celle visant à annuler l’ensemble des postes pourvus dans la fonction publique après le vote du gel temporaire des recrutements voté en août 2017, devra également être discutée par le Conseil des ministres. Le président de la commission des Finances et du Budget, le député Ibrahim Kanaan (également CPL), a consacré hier une conférence de presse aux résultats de l’enquête parlementaire menée sur ce dossier. « Nous avons constaté d’importantes infractions, surtout en période pré-électorale (en référence aux élections législatives de mai 2018). Sur les 5 473 personnes qui ont été embauchées après le 21 août 2017, en dehors des corps militaire et sécuritaire, seulement 460 personnes l’ont été en respect de la loi, et 5 013 de manière abusive », a-t-il dénoncé. Ces derniers mois, la commission a convoqué plusieurs ministres et directeurs d’établissements publics afin qu’ils répondent des embauches effectuées sur cette période, alors que tout recrutement est normalement gelé depuis l’adoption, en août 2017, de la loi sur la nouvelle grille des salaires.

Pour Charbel Cordahi, « l’ensemble de ces propositions, si elles sont mises en œuvre simultanément, vont permettre une baisse du déficit public mais aussi in fine des taux d’intérêt, ce qui nous permettra d’avoir une croissance économique certes faible, mais meilleure que la stagnation que nous connaissons actuellement ». Il ajoute qu’à partir de la mi-2020, « avec les premières étapes du processus CEDRE, les mesures pour booster les entreprises locales et la lutte contre l’évasion fiscale, nous pourrons connaître un niveau de croissance plus significatif ». « Si nous réussissons à inverser la tendance de l’évolution de la dette, la perception du risque de défaut va disparaître, ce qui permettra aux banques de moins rémunérer les déposants et de baisser les taux d’intérêt pour les prêts au secteur privé (injection de nouvelles liquidités dans l’économie réelle). Les entreprises pourront alors contracter des prêts pour relancer leurs activités et réaliser de nouveaux investissements », prévoit-il.


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Le ministre des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, a une nouvelle fois exprimé hier son insatisfaction par rapport à la dernière version du budget de 2019 lors d’une conférence de presse qu’il a tenue à l’issue de la réunion hebdomadaire de son bloc parlementaire. « Certains au sein du gouvernement estiment que ce qui a été fait est...

commentaires (6)

Par ailleurs il y en a dans ce pays qui commencent à avoir des crises aussitôt que certains individus bien particuliers prennent la parole. Ces gens là se permettent de juger qui est Libanais et qui ne l’est pas, qui est souverainiste ou pas, qui à le droit à la parole etc... Pour info le budget est discuté par tous les ministres et Gebran Bassil en est un, donc qu’on le veuille ou pas il a le droit de s’exprimer comme tous les autres.

Chady

13 h 52, le 24 mai 2019

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Commentaires (6)

  • Par ailleurs il y en a dans ce pays qui commencent à avoir des crises aussitôt que certains individus bien particuliers prennent la parole. Ces gens là se permettent de juger qui est Libanais et qui ne l’est pas, qui est souverainiste ou pas, qui à le droit à la parole etc... Pour info le budget est discuté par tous les ministres et Gebran Bassil en est un, donc qu’on le veuille ou pas il a le droit de s’exprimer comme tous les autres.

    Chady

    13 h 52, le 24 mai 2019

  • Et même avec les mesures de Bassil, cela reste insuffisant, mais au moins lui il pense à faire fermer toutes ces organisations relevant de l’Etat qui ne servent strictement à rien. Il faut au moins que ses idées soient débattues, après ils peuvent faire passer ce qu’ils veulent au conseil des ministres, mais ils ne peuvent pas refuser de debattre.

    Chady

    13 h 46, le 24 mai 2019

  • M. Bassil est certes un personnage qui pèse sur la scène politique mais il ne fait pas parti, à mon avis, du cercle hyper-restreint des décideurs dans le pays. Le feu vert pour le budget sera actionné à un moment donné, choisi par les décideurs, ni avant ni après. C'était la même chose pour la formation du gouvernement. C'était pareil pour le choix de la date des élections législatives et la loi électorale, ainsi de suite. Ne faites pas porter tous les retards sur le dos du ministre des AE. Cherchez ailleurs.

    Shou fi

    10 h 47, le 24 mai 2019

  • QUAND A L,IMMIXION DU GENDRE DANS TOUTES LES AFFAIRES DE TOUS LES MINISTERES ET SES DECLARATIONS A LA PLACE DES AUTRES MINISTRES CA REVIENT AUX AUTRES MINISTRES DE LUI COUPER NET SES INTERVENTIONS. MAIS IL A DROIT DE DONNER SON AVIS ET D,EXPRIMER SES PROPOSITIONS SUR LE PROJET DE BUDGET QUI N,EST PAS UNE AFFAIRE EXCLUSIVE DU MINISTRE DES FINANCES. LE PAYS EST EN CRISE. CA CONCERNE TOUT LE MONDE. CHACUN DOIT DONNER SON AVIS SANS POURTANT METTRE DES BATONS DANS LES ROUES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 31, le 24 mai 2019

  • On aimerait comprendre, la personne dont la photo figure en tête de cet article, est-elle aussi ministre des finances ? Est-elle le responsable politique principal de notre pays, qui veut tout contrôler, même dans les domaines qui ne le concernent pas ? Sa photo apparaît plusieurs fois par jour dans ce journal... à quoi bon nommer 30 ministres, si un seul d'entre eux veut tout diriger ? Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 28, le 24 mai 2019

  • SANS DE VRAIES MESURES CONCRETES ET NON D,INTENTION L,ACTUEL PROJET DE BUDGET NE SERAIT PAS ACCEPTE PAR LES DONATEURS ET INVESTISSEURS DE LA CEDRE. HELAS C,EST LE PEUPLE... LA MASSE... QUI VA FAIRE DES SACRIFICES POUR SAUVER L,ECONOMIE, LES FINANCES ET L,EXISTENCE MEME DU PAYS. LE PEUPLE AURAIT ETE PLUS ENCLIN A ACCEPTER LES SACRIFICES S,IL AURAIT VU AUSSI DES MESURES DRASTIQUES PRISES PARALLELEMENT CONTRE SES ABRUTIS CORROMPUS, INCOMPETENTS, VOLEURS ET MAFIEUX QUI ONT DEVALISE TOUTES LES CAISSES DE L,ETAT ET PRECIPITE LE PAYS DANS LE PRECIPICE. DES MESURES IMMEDIATES DOIVENT ETRE PRISES CONTRE LES ABRUTIS ALIBABISTES, EDL, AEROPORT, PORTS, ACCAPAREMENTS DU LITTORAL, FAINEANTS DU SECTEUR PUBLIC, TRAFICS DE TOUTES SORTES ET LA LISTE EST LONGUE TRES LONGUE. DES COMMISSIONS DOIVENT ETRE CREEES POUR LE SUIVI DES MESURES EXCEPTIONNELLES. C,EST SEULEMENT ALORS QUE LE PEUPLE CROIRA QUE LES SACRIFICES QU,ON LUI DEMANDE NE SERONT PAS VAINS. OISEAU DE MAUVAIS AUGURE OU CONSTATATION ET FAIT ? ON LE SAURA TRES PROCHAINEMENT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 03, le 24 mai 2019

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