Le Conseil des ministres s’est réuni hier de midi à 17h30. Photo Dalati et Nohra
Le Conseil des ministres n’a toujours pas réussi à finaliser le projet de budget pour 2019, après deux semaines et pas moins de 11 réunions consacrées à son examen – dont une organisée dans la nuit de dimanche à lundi qui s’est achevée à 2 heures du matin –, sur fond de contestation sociale (voir page 2). Des séances à l’issue desquelles les informations distillées ont été une fois de plus incomplètes, rendant difficile toute conclusion sur l’avancée réelle des débats.
Certains points ont toutefois pu être confirmés par le ministre de l’Information Jamal Jarrah et celui de la Défense Élias Bou Saab, qui se sont exprimés à l’issue de la réunion d’hier.
En premier lieu, le Conseil des ministres a une nouvelle fois reporté l’examen de la baisse des rémunérations et avantages des fonctionnaires et des responsables politiques, dans le cadre de la politique d’austérité qu’il a annoncé vouloir mener. Selon M. Jarrah, le ministre des Finances doit présenter, lors de la réunion prévue aujourd’hui, un rapport dressant le bilan comptable des mesures sur lesquelles les membres du gouvernement se sont entendus jusqu’ici afin de savoir si elles sont suffisantes pour atteindre les objectifs du gouvernement, notamment en matière de réduction du déficit public.
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La mesure n° 3
Le ministre de la Défense a, de son côté, déclaré que la question des droits des militaires en activité et retraités n’avait pas été abordée non plus « sous quelque forme que ce soit ». M. Bou Saab a en revanche indiqué que le gouvernement s’était entendu pour ponctionner 3 % sur les « allocations » de l’ensemble des fonctionnaires – et pas seulement les militaires à la retraite comme il prévoyait initialement de le faire – pour financer leur couverture santé.
L’annulation de « la mesure n° 3 », un niveau d’état d’alerte maximum de l’État en vertu duquel des compensations financières sont versées aux militaires et membres des services de sécurité, n’a pas non plus été évoquée. Deux autres niveaux (n° 1 et n° 2) existent et s’appliquent aux niveaux d’alerte inférieurs. L’enjeu de ce sujet est de savoir si la mesure n° 3 peut être supprimée ou aménagée et si elle doit s’appliquer de manière uniforme à l’armée – qui dépend du ministère de la Défense – et aux forces de sécurité – placées sous la tutelle du ministère de l’Intérieur et des Municipalités. Répondant à la question d’un journaliste, le ministre de l’Information a souligné à ce sujet que la mesure n° 3 était pour l’instant « maintenue pour faire face aux menaces israéliennes » au Liban-Sud. Il a également rappelé que le ministre de la Défense et sa collègue de l’Intérieur, Raya el-Hassan, devaient s’entendre sur une formule pour décider de son application dans les autres régions du pays.
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Les aides aux associations
Le Conseil des ministres a, en outre, approuvé une réduction de 10 à 15 % des aides publiques aux associations, à l’exception de celles perçues par les ONG, ainsi que par plusieurs organisations « sérieuses », dont Caritas ou la Croix-Rouge et d’autres « qui fournissent des services médicaux, sanitaires et éducatifs aux citoyens », a exposé M. Jarrah. Le ministre a toutefois précisé que l’examen de cette disposition n’était pas terminé et a botté en touche concernant le cas des associations culturelles qui organisent des festivals.
Le gouvernement, qui espérait conclure l’examen de l’avant-projet de budget la semaine dernière, prévoit de se réunir aujourd’hui et demain au Grand Sérail à Beyrouth. « Les choses prennent du temps (…) c’est un budget de réformes », a notamment concédé M. Jarrah lorsqu’il a été interrogé sur le retard cumulé jusqu’ici.
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Mais le débat pourrait se compliquer dès aujourd’hui. Selon son service de presse, le ministre des Affaires étrangères et des Émigrés, Gebran Bassil, a indiqué aux autres membres du gouvernement qu’il n’approuvait pas l’ensemble de l’avant-projet préparé par le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, et s’est engagé à présenter dès aujourd’hui des propositions qui se focaliseront sur « les services de la dette, l’évasion fiscale et les fraudes douanières ».
Dans la nuit de dimanche à lundi, le gouvernement avait examiné certaines mesures fiscales contenues dans l’avant-projet de budget. Les ministres s’étaient notamment entendus pour augmenter les pénalités applicables en cas d’évasion fiscale, les frais à payer pour obtenir des permis de travail pour les travailleurs étrangers ou encore les frais imposés aux compagnies aériennes à chaque atterrissage d’un de leur appareils à l’Aéroport international de Beyrouth.
Le budget pour 2019 doit mettre en œuvre une partie des engagements de réformes pris par les dirigeants libanais lors de la conférence de Paris (CEDRE) d’avril 2018. Il devrait en principe être adopté par le Parlement avant la fin du mois.
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11 h 01, le 14 mai 2019