Le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, l’a affirmé hier et le Premier ministre désigné Saad Hariri l’avait fait avant lui lors de sa conférence de presse de mardi dernier : il n’y aurait pas de dimension régionale, voire internationale, au « nœud sunnite », qui serait donc un problème purement interne.
Si cela est vrai, comment expliquer dans ce cas que la formation du gouvernement prenne tellement de temps, d’autant qu’aucun règlement ne se profile à l’horizon? Selon des sources qui suivent de près le dossier, la cause du retard viendrait essentiellement du fait que les deux parties en conflit sont devenues otages de leurs positions en flèche.
Selon les mêmes sources, la solution au problème du « nœud sunnite » passe par trois étapes. La première consiste dans le droit des députés sunnites de la « Rencontre consultative » (pour rappel, il s’agit de Fayçal Karamé, Jihad Samad, Adnane Traboulsi, Abdel-Rahim Mrad, Kassem Hachem et Walid Succarié) à se faire représenter au sein du gouvernement. La seconde porte sur le mécanisme de la représentation : de quel lot faut-il retirer ce portefeuille ? Et la troisième porte sur le choix des noms : qui devrait être représenté, un des six ou une personnalité de leur choix ?
Selon les sources précitées, le conflit en serait encore à la première étape. À ce sujet, il y a donc deux positions totalement opposées : celle des six députés sunnites, eux-mêmes appuyés par le Hezbollah et Amal d’un côté; et celle du Premier ministre désigné de l’autre. Chacune des deux parties a sa propre logique. Selon celle des députés sunnites, qui se considèrent plus simplement « les sunnites du 8 Mars », selon l’appellation du secrétaire général du Hezbollah dans son dernier discours, la plupart d’entre eux ont été élus par des voix sunnites. Ce qui fait qu’ils représentent près de 30 % des voix des électeurs sunnites, et par conséquent, ils ont parfaitement le droit d’être représentés au sein du gouvernement, selon le critère adopté pour la représentation des autres blocs parlementaires.
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Par contre, le Premier ministre désigné estime qu’ils ne peuvent pas être représentés car ils ne forment pas un bloc cohérent. Après les élections législatives et lors des concertations parlementaires qu’il avait organisées en vue de la formation du gouvernement, ils s’étaient présentés en rangs séparés. M. Hariri considère donc leur regroupement au sein de la Rencontre consultative comme une démarche artificielle, uniquement destinée à l’affaiblir. Au cours de sa conférence de presse mardi dernier, Saad Hariri s’est défendu de vouloir monopoliser la représentation sunnite au sein du gouvernement, en affirmant donner un ministre sunnite au chef de l’État et un autre à l’ancien Premier ministre Nagib Mikati. Mais il a répété que les six n’ont pas droit à un ministre.
Au-delà de ce conflit se profile un problème de fond qui remonte à 2005, lorsque, après l’assassinat de Rafic Hariri, le courant du Futur est devenu le seul représentant des sunnites au sein des institutions et du pouvoir, alors que les personnalités sunnites prosyriennes ou qui ne sont pas dans la mouvance saoudienne ont été pratiquement marginalisées. Aujourd’hui, grâce à la loi électorale basée sur le mode de scrutin proportionnel, elles ont fait leur réapparition dans le paysage politique institutionnel et elles réclament une place au gouvernement. Pour l’instant, les points de vue restent inconciliables, mais les sources qui suivent le dossier affirment qu’il existe des perspectives de solution qui restent liées à la deuxième étape. Si, finalement, il est décidé de leur donner un ministre, il s’agit de voir de quel lot il sera déduit. Les possibilités sont limitées, car les six ministres sunnites d’un gouvernement de 30 sont partagés jusqu’à présent entre le Premier ministre (5, dont un à Nagib Mikati) et le chef de l’État (1). Soit le chef de l’État accepte de céder sa part sunnite à la Rencontre consultative, soit le Premier ministre cède un des siens. Il pourrait y avoir ainsi un accord d’échange entre lui et le duo chiite, qui donnerait un ministre sur les six chiites, en contrepartie d’un ministre sunnite.
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Toujours selon les sources précitées, ces solutions dépendent à leur tour de la personne du ministre qui serait choisi, et donc de la troisième phase du processus. Faut-il absolument que le ministre soit choisi parmi l’un des six députés concernés, ou bien ceux-ci accepteraient-ils une autre personnalité qui serait considérée comme plus acceptable aussi pour les autres protagonistes ? Le problème, à ce niveau, selon les sources précitées, c’est que les députés de la Rencontre consultative ne parlent pas d’une même voix. Jusqu’à présent, ils ne sont pas d’accord entre eux sur le nom du ministrable qu’ils voudraient soumettre aux autorités concernées. D’ailleurs, pour l’instant, ils semblent préférer les entretiens séparés. C’est ainsi que M. Bassil, qui a été chargé par le chef de l’État de mener une médiation sur ce dossier, a rencontré Fayçal Karamé et Adnane Traboulsi séparément, et il attend de pouvoir s’entretenir avec les six ensemble...
C’est dire combien ce problème, en apparence simple et qui semblait avoir une solution facile, est en réalité complexe. D’ailleurs, depuis quelques jours, plus personne ne parle d’une formation imminente du gouvernement, les différentes parties assurant que le règlement de ce problème devrait prendre du temps. Le premier pas commencerait par une reconnaissance de la part du Premier ministre désigné de l’existence et du poids des sunnites du 8 Mars regroupés au sein de la Rencontre consultative. Mais cela ne signifierait pas pour autant que « le nœud » sera défait. Il faudrait ensuite s’entendre sur le mécanisme et le nom. M. Bassil a parlé de concessions réciproques. Ce qui pourrait signifier que Saad Hariri avalise le principe de leur représentation au gouvernement et que les six acceptent que le ministre ne soit pas l’un d’eux, mais une personnalité proche des deux camps... On en est encore loin.
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Des que ce "noeud " sera denoue comme le veut le sieur HN priere faire immediatement un nouveau noeud parce que les 16 deputes (+ou-)chretiens non affilie a des partis auront aussi le droit a2 ou 3 ministres pour que les independants sunnites ne soient pa seuls independants a avoir une representation Une fois ce nouveau noeud resolu, il faudra chercher un autre parceque nos politiciens n'ont que faire du Liban c'est clair et tellement evident sinon nous aurions eu deja depuis 5 mois un ministere composes de gens civils competents et non affilies
00 h 26, le 20 novembre 2018