La cruauté envers les animaux n’est plus impunie : c’est ce qu’a démontré l’affaire sordide de la maltraitance d’un cheval dans une ferme à Tripoli, dont l’auteur a été filmé en flagrant délit de violence contre l’animal. La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux et mobilisé autant l’opinion publique que les associations de protection des animaux. L’homme, M. B., est depuis dimanche derrière les barreaux, suite à une plainte des associations « Animals Lebanon » (AL) et BETA, dans l’attente de son procès.
Les faits se sont déroulés vendredi : un cheval, qui aurait provoqué la chute d’un jeune client, a été roué de coups par un homme qui est vraisemblablement son propriétaire. Dans la vidéo, poignante, on voit le cheval tomber à terre, pris de convulsions, alors que les coups s’abattent sur lui de plus belle.
Samedi, avec la diffusion de la vidéo et une pluie d’appels, deux associations, BETA et AL, se mobilisent. « Notre première réaction a été de contacter le ministère de l’Agriculture, qui a promis de s’en occuper juste après le week-end de Pâques, raconte à L’Orient-Le Jour Maggie Chaaraoui, d’AL. Nous avons estimé que le cheval ne survivrait pas jusqu’à mardi, et avons décidé de nous déplacer jusqu’à Tripoli, comme l’a fait BETA avec son avocat. Nous avons présenté une dénonciation auprès de la justice. »
Maggie Chaaraoui, accompagnée de la présidente d’AL Lana el-Khalil, s’est rendue à Bab el-Tebbané, après avoir prévenu le mohafez Ramzi Nohra, qui a donné son feu vert. « La gendarmerie de Bab el-Tebbané a été incroyablement coopérative et efficace, affirme la militante. En peu de temps, la ferme a été fermée, les chevaux rendus à leurs propriétaires – parce qu’ils n’appartiennent pas tous à l’homme incriminé – et le dénommé M. B. arrêté. Le cheval, lui, a été placé sous la tutelle d’AL, qui l’a transporté le même jour vers une ferme à Bickfaya où il est actuellement soigné. »
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« Un centimètre plus haut ou plus bas, et c’était la fin »
Le Dr Maher Yehia, vétérinaire officiel de la Fédération équestre libanaise, a examiné l’animal. À L’OLJ, il souligne avoir été rassuré de constater que ses jours ne sont pas en danger, mais affirme qu’il n’a « jamais constaté une telle brutalité commise contre un cheval, même si des cas de maltraitance existent ». Le cheval, qu’il a ausculté dimanche à 14h, a un hématome au niveau de l’orbite au-dessus des yeux, ainsi qu’un saignement près d’un œil. Son boulet droit est enflé. Le vétérinaire a constaté des douleurs au dos, au niveau de la colonne vertébrale et de la croupe. « Vu la violence qu’on peut voir dans la vidéo, j’avais craint que son état général ne soit encore pire, reconnaît le vétérinaire. Mais on n’était pas loin du drame : un centimètre plus bas, l’œil était perdu, un centimètre plus haut, la tête aurait été atteinte, et la mort inévitable. »
« Il semble que ce n’est pas la première fois que ce cheval subit de la violence, poursuit le Dr Yehia. Il est squelettique et paraît avoir été mal nourri durant longtemps. Le pire, c’est qu’il a subi un traumatisme intense et sursaute à l’approche des hommes. Il faudra du temps pour qu’il se rétablisse et reprenne confiance dans les humains. »
Du temps, c’est ce qu’il faut au cheval pour se rétablir, et à l’affaire pour suivre son cours en justice. La juge Dima Dib a fait arrêter le propriétaire abusif du cheval. Pour statuer dans une affaire de ce type, la justice dispose désormais d’une loi sur la protection des animaux, adoptée au Parlement en août 2017. Selon Maggie Chaaraoui, le ministère de l’Agriculture prendra très prochainement les mesures qui s’imposent concernant la ferme en question. Les associations, elles, suivent l’affaire de près.
commentaires (7)
Enfin bravo pour la justice libanaise .
Antoine Sabbagha
22 h 22, le 03 avril 2018