Le Parlement libanais a adopté vendredi en séance plénière le nouveau texte de loi électorale à l'unanimité des 115 députés présents, malgré les critiques exprimées par plusieurs députés représentant plusieurs formations politiques tenues à l'écart des tractations qui ont abouti à un accord sur ce texte et à son approbation mercredi par le gouvernement.
Ce texte de loi, devant régir les prochaines législatives désormais prévues en mai 2018, prévoit la proportionnelle avec 15 circonscriptions. Il est qualifié de "consensuel".
Parallèlement, des heurts, parfois violents, entre manifestants, dénonçant une troisième prorogation du mandat de la Chambre, et forces de l'ordre ont eu lieu sur la place Riad Solh, non loin de la place de l'Étoile qui était bouclée pour la tenue de la séance.
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Le CPL et les FL heureux
Plusieurs leaders politiques ont salué l'adoption de la nouvelle loi électorale.
"Il n'a pas été simple d'aboutir à une nouvelle loi électorale. Nous savons tous que cette loi n'est pas idéale mais nous devons tous reconnaître qu'elle est la meilleure possible au vu des complexités libanaises", a déclaré Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, lors d'une conférence de presse à Meerab.
"Certains semblent oublier qu'ils avaient approuvé à Bkerké la proportionnelle et les 15 circonscriptions. Je leur dis : pourquoi n'avez-vous pas fait de propositions ?", a-t-il ajouté, s'adressant notamment aux pôles chrétiens, dont les Kataëb, qui ont exprimé des réserves à l'égard du texte adopté à l'unanimité. Saluant un texte "fabriqué au Liban", le leader des FL a déclaré que son parti et le Courant patriotique libre "auraient pu ensemble rafler tous les sièges si la loi de 1960 avait été en vigueur". "La loi adoptée ne favorise pas les grands partis et coalitions", a-t-il affirmé.
"Vingt sept ans après l'accord de Taëf et la marginalisation, 12 ans après la lutte en faveur des réformes, la nouvelle loi a été approuvé", a de son côté déclaré Ibrahim Kanaan, député représentant le Courant patriotique libre. "Il ne nous était pas possible d'éviter la prorogation du mandat du Parlement. Mais au moins nous avons une nouvelle loi électorale".
"Le positif, c'est qu'une nouvelle loi ait été votée. Le négatif, c'est qu'elle ne comporte pas de quota de femmes", a déclaré pour sa part, le chef chrétien du Liban-Nord, Sleiman Frangié à l'issue de la séance plénière. "Nous avons toujours été en faveur de cette loi sur laquelle nous nous sommes mis d'accord à Bkerké, alors que certains avaient changé d'avis", a-t-il ajouté.
Annonçant que le courant des Marada, la formation politique dont il est le chef, présentera une liste complète dans la circonscription regroupant les cazas de Zghorta, Batroun, Bécharré et le Koura, il a déclaré que cette loi "ouvre la possibilité aux électeurs de faire des choix politiques clairs".
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Samy Gemayel à la tête des frondeurs
Cette séance a été marquée par un violent échange ayant opposé le chef des Kataëb, Samy Gemayel, au Premier ministre Saad Hariri. Ainsi, le député du Metn a accusé le gouvernement de vouloir se servir de la période de prorogation pour pouvoir payer des pots-de-vin électoraux. Ce à quoi Saad Hariri a vivement répliqué en assurant que le gouvernement n'avait pas l'intention d'avoir recours à de telles méthodes. M. Gemayel a alors reproché au chef du gouvernement de lui avoir coupé la parole.
Suite à cet échange houleux, le président de la Chambre, Nabih Berry, a demandé que les déclarations du leader des Kataëb soient rayées du procès-verbal de la séance. "Vous pourrez rayer ces déclarations mais vous ne nous empêcherez pas de dire ce que nous voulons", a répondu M. Gemayel.
Au cours de la séance, le chef des Kataëb a décrit la nouvelle loi électorale de "loi de Batroun en faveur de Gebran Bassil". Le chef du Courant patriotique libre est candidat dans la circonscription comprenant le caza de Batroun, au Liban-Nord.
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Berry : cette loi est la meilleure possible
Au début de la séance, Nabih Berry a permis aux députés s'opposant à ce texte, dont M. Gemayel et Boutros Harb, député de Batroun, qui réclamaient tous les deux que la loi soit discutée article par article, et non en un bloc, de pouvoir s'exprimer avant le vote.
"Nous devons être réalistes, nous serions arrivés à une crise majeure" si une nouvelle loi électorale n'avait pas été adoptée, a ensuite indiqué M. Berry. "Cette loi était la meilleure possible", a-t-il ajouté. Il a également appelé le gouvernement à "restaurer la confiance des gens".
Par ailleurs, le député Assem Kanso, membre du parti Baas, s'est retiré de la séance plénière après avoir critiqué le fait que l'option de la circonscription unique n'ait pas été adoptée pour la loi électorale. "La loi électorale ne pouvait être que consensuelle. Autrement, nous nous serions dirigés vers une destruction du pays, a affirmé M. Berry. Ce consensus auquel nous avons abouti ne fait de mal à personne", a-t-il ajouté, exprimant son attachement aux communautés, "et non au confessionnalisme".
Avant le début de la séance parlementaire, le ministre d'Etat aux Droits de la femme, Jean Oghassabian, avait déclaré qu'"une loi électorale, sans quota de femmes, est une loi injuste et qui salit l'image du Liban et du Parlement".
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Face-à-face houleux entre manifestants et forces de l'ordre
A l'extérieur du Parlement, des dizaines de membres de collectifs de la société civile se sont heurtés à l'armée libanaise et aux Forces de sécurité intérieure, qui ont parfois violemment réprimé le rassemblement.
Une vidéo prise dans l'après-midi et diffusée sur la page Facebook du collectif de la société civile "Vous puez!" montre des soldats de la garde du Parlement en train de taper sur des manifestants.
Dans un communiqué publié en début de soirée, la garde du Parlement a expliqué que certains manifestants avaient tenté de s'en prendre à certains de ses soldats en tentant de les déposséder de leurs armes. "C'est ce qui a poussé nos hommes à agir", ajoute le communiqué.
De nombreux convois appartenant à des parlementaires ont été accueillis sous les huées de dizaines de manifestants qui dénoncent une troisième prorogation du mandat de la Chambre, après celles de 2013 et 2014. Quelques heurts entre manifestants et forces de l'ordre ont eu lieu sur la place Riad Solh.
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au moins un aperçu de la belle brochette des auto-satisfaits de la République. Le fromage doit être bon Lamentable
20 h 58, le 16 juin 2017