Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a révélé jeudi que sa formation avait démantelé ses positions militaires à la frontière libanaise avec la Syrie, estimant que la mission du parti chiite, qui consistait à sécuriser la région contre les attaques des éléments jihadistes, était accomplie. Le chef du Hezbollah a en outre abordé, entre autres, la question d'un éventuel conflit entre le Liban et Israël, mettant en garde l’État hébreu contre des attaques à l'intérieur de son territoire en cas de nouvelle guerre.
"Nous avons commencé à démanteler nos positions militaires à la frontière syrienne et nous continuerons à les démanteler, car la mission a été accomplie. Maintenant, c'est à l’État libanais de prendre en charge cette région", a affirmé Hassan Nasrallah. "La frontière orientale (libanaise) sera complètement sous le contrôle de l'État. Cela n'empêchera pas certains membres du Hezbollah d'être présents dans certains villages afin de parer à toute tentative d'infiltration de la part d'éléments armés", a-t-il expliqué.
Le secrétaire général du parti chiite s'exprimait lors d'un discours télévisé retransmis en direct à l'occasion de la 1ère commémoration de la mort du responsable militaire du Hezbollah Moustapha Badreddine, tué en Syrie l'an dernier. Selon le Hezbollah, M. Badreddine - qui figurait sur la liste américaine des terroristes et était recherché par Israël - a été tué dans une explosion le 12 mai près de l'aéroport de Damas, dans des circonstances toujours entourées de mystère. Le Hezbollah a accusé des groupes islamistes extrémistes de l'avoir assassiné.
Moustapha Badreddine était accusé par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) du meurtre de l'ex-Premier ministre libanais Rafic Hariri. Le 11 juillet 2016, le TSL avait annoncé que ses juges avaient décidé à la majorité que "des preuves suffisantes avaient été apportées (...) pour établir la mort de M. Badreddine".
Qualifié de "cerveau" de la planification de l'attentat contre l'ex-Premier ministre libanais, tué à Beyrouth le 14 février 2005, ce chef militaire était l'un des cinq accusés du procès qui s'est ouvert en janvier 2014 en leur absence devant ce tribunal créé pour juger cet assassinat.
(Lire aussi : Israël accuse l'armée libanaise de faciliter « les violations du Hezbollah »)
"Région désormais calme et sécurisée"
Hassan Nasrallah a ensuite abordé la question du village libanais de Toufayl, une localité enclavée en territoire syrien et abritant quelque 3.000 Libanais (sunnites et chiites) et 5.000 réfugiés syriens. Ce village avait été isolé de son environnement il y a quelques années après la main-mise de l'armée syrienne sur la seule route qui y mène. De violents combats avaient eu lieu dans le secteur entre l'armée syrienne et le Hezbollah d'une part, et des éléments jihadistes d'autre part.
"En raison des combats, certains habitants ont dû quitter la localité. Mais nous leur disons qu'ils peuvent désormais rentrer chez eux, la mission a été accomplie et nous ne sommes plus présents dans la zone, au cas où notre présence leur posait problème. Mais personne n'a besoin de notre autorisation, il est normal que l’État prenne cela en charge, c'est à lui de le faire, sans attendre une demande de la part des habitants. La région est désormais calme et sécurisée", a assuré Hassan Nasrallah.
Plus tôt en cours de journée, une délégation d'habitants de Toufayl avait été reçue par le ministre de l'Intérieur, Nouhad Machnouk. Ce dernier leur a assuré qu'il accordait la plus haute importance à leur retour à leur village, regrettant "les manquements des deux gouvernements précédents". M. Machnouk a fait savoir qu'il a évoqué le dossier avec le président de la République, Michel Aoun, et qu'il allait l'aborder avec le Premier ministre, Saad Hariri.
Dans ce contexte, le chef du Hezbollah s'est défendu de toute volonté de changement démographique par la force. "On accuse le Hezbollah de vouloir modifier la démographie de Baalbeck-Hermel, dans la Békaa. Mais le Hezbollah faisait seulement barrage pour repousser la menace (des éléments jihadistes) contre cette région", a-t-il expliqué.
Il a ensuite appelé les habitants de Ersal, localité frontalière de la Syrie, à coopérer. "J'appelle les habitants de Ersal à la coopération, car la présence armée sur les hauteurs de la localité est un fardeau. S'il y a un problème, nous devons le régler calmement, de sorte à éviter toute effusion de sang. Cela est tout à fait possible, comme c'est le cas dans certaines localités en Syrie actuellement", a dit le leader chiite.
Depuis août 2014, le jurd de cette localité sunnite est le théâtre d'affrontements sporadiques entre l'armée et le Hezbollah d'une part, et des jihadistes venus principalement de Syrie, d'autre part.
(Pour mémoire : Les messages du Hezbollah et... ceux de l'État)
Concernant le conflit qui ravage la Syrie voisine depuis 2011, et où le Hezbollah intervient militairement depuis 2013, Hassan Nasrallah a réaffirmé son soutien au régime du président Bachar el-Assad.
"Nous soutenons l'autorité syrienne. Nous acceptons tout cessez-le-feu que les responsables syriens acceptent. Toute opportunité de mettre un terme à l'effusion de sang en Syrie doit être saisie", a-t-il fait savoir.
Et de poursuivre : "Si le régime nous dit qu'il est prêt à reprendre en main intégralement la situation en Syrie, nous accepterons cela. Nous serons seulement présents là où notre présence est requise. Et tous les propos sur des tensions entre alliés sont infondés".
Hassan Nasrallah a toutefois occulté encore une fois l'énorme explosion qui a eu lieu le 27 avril près de l'aéroport international de Damas. La Syrie avait alors accusé Israël d'avoir provoqué cette explosion, et selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) et des sources rebelles hostiles au régime Assad, un dépôt d'armes, vraisemblablement appartenant au Hezbollah, en avait été la cible.
Israël, qui confirme rarement ses nombreuses attaques lancées en territoire syrien depuis le début de la guerre civile en 2011, a laissé entendre qu'il pourrait en être l'auteur.
(Pour mémoire : Le Hezbollah « rassuré » sur les développements en Syrie)
"Israël craint tout nouvel affrontement"
Toujours sur le plan sécuritaire, le chef du Hezbollah a abordé la question d'une éventuelle guerre entre le Liban et Israël. Il a dans ce contexte évoqué la construction d'un mur israélien à la frontière avec le Liban, une information qu'une source anonyme au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (Finul) a confirmé à L'Orient-Le Jour.
Pour Hassan Nasrallah, ce projet est "un aveu de la victoire écrasante du Liban et de l'échec des projets israéliens". "C'est un échec du projet du Grand Israël, qui devait s'étendre du Nil à l'Euphrate. Ce mur montre à quel point Israël craint l'avenir proche ou lointain", a martelé le leader chiite.
Et de poursuivre : "Israël craint tout nouvel affrontement. La Résistance ne lance pas des menaces sans être sérieuse. Tout nouvel affrontement (avec Israël) aura lieu à l'intérieur de la Palestine occupée. L'ennemi le sait. C'est pour cela qu'il prend au sérieux cette éventualité, en effectuant des manœuvres ou en construisant des murs. Cela est bon signe. Le fait qu'Israël évoque autant un éventuel conflit montre à quel point la guerre de 2006 a marqué l’État hébreu et la population israélienne". Lors de cette guerre, plus de 1.200 Libanais avaient laissé leur vie, en majorité des civils. Côté israélien, 160 personnes, pour la plupart des militaires, avaient été tuées.
Hassan Nasrallah s'est malgré tout voulu rassurant : "Je dis aux Libanais, aux réfugiés, aux déplacés, à ceux résidant légalement ou illégalement au Liban : Vivez votre vie normalement. Cela fait 11 ans qu'on évoque une nouvelle guerre avec Israël. Ces propos peuvent s'inscrire dans la logique de la guerre psychologique. En tout cas, ayez confiance en la Résistance, en vous, en l'armée libanaise. Le Liban n'est plus une promenade de santé, ni pour Israël, ni pour aucune autre force. Le Liban a détruit l'élite de l'armée israélienne".
(Pour mémoire : Nasrallah : Nous ne voulons imposer la proportionnelle à personne)
"De vrais espoirs"
Sur le plan politique, le chef du Hezbollah s'est voulu optimiste quant à l'adoption d'une nouvelle loi électorale pour les législatives qui sont censées se tenir en juin, mais dont le sort est plus que jamais incertain en raison des tiraillements politiques.
"Il y a de vrais espoirs d'aboutir à une nouvelle loi électorale. Je dis à tous les pôles politiques : nous ne devons pas abandonner le dialogue, qu'il soit à deux, à trois à quatre ou à cinq... Nous devons également calmer les discours politiques enflammés, car cela ne permet pas d'aboutir à une nouvelle loi électorale", a insisté Hassan Nasrallah.
Les législatives étaient programmées pour le mois de juin, mais en l'absence d'accord sur une nouvelle loi électorale, le scrutin risque de ne pas se tenir. La loi actuelle, dite de 1960, est fondée sur le mode majoritaire plurinominal, un système critiqué officiellement par la plupart des formations politiques qui n'ont toujours pas réussi à s'entendre sur un nouveau texte. Nabih Berry a fixé au 15 mai prochain une séance parlementaire consacrée au vote d'une prorogation de la législature, qui s'achève le 20 mai, mais a affirmé mercredi qu'il comptait reporter cette séance. La Chambre a déjà prorogé son propre mandat par deux fois, en 2013 et en 2014.
Pour mémoire
Le Hezbollah attendrait les sanctions US avant de se prononcer sur la loi électorale
Nasrallah : "Nous soutenons avec force la grille des salaires"
Pour les USA, le Hezbollah « reste un groupe terroriste qui porte atteinte à la sécurité du Liban »
Rumeurs, pour le moment infondées, sur une offensive israélienne imminente
commentaires (10)
Quant a israel, ne nous plaignons surtout pas de notre gouvernement incapable de s'armer correctement, crachons plutot sur ceux qui ont liberer la terre, pour le benefice des iraniens bien entendu, c'est pas comme si c'etait des libanais qui habitaient labas voyons
Chady
21 h 43, le 12 mai 2017