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Liban - La situation

Joumblatt à « L’OLJ » : Ni le vide ni la proportionnelle

Le débat autour de la loi électorale semble tourner en rond. Le projet mixte du Courant patriotique libre (élection de 50 % des députés au scrutin majoritaire au niveau des cazas et 50 % à la proportionnelle à l'échelle du mohafazat) est tombé à l'eau. L'échec de ce projet a été aussi prompt que sa naissance, comme si sa divulgation ne visait pas tant à faire avancer le débat sur le fond, qu'à servir de tactique au camp aouniste : faire montre d'ouverture à l'égard de ceux qui contestent la proportionnelle intégrale, de manière à ce que ce camp puisse prétendre avoir tout essayé pour aboutir à un compromis.

Mais cette déclaration apparente de bonne volonté n'a été assortie d'aucune démarche sur le fond à même d'apaiser les parties les plus réfractaires à la proportionnelle, notamment le chef de la Rencontre démocratique, le député Walid Joumblatt. Ainsi, le projet mixte du CPL a prévu la fusion des cazas de Aley et du Chouf dans un seul mohafazat –comme l'avait souhaité le député Walid Joumblatt – mais en y appliquant une proportionnelle quasi intégrale, au détriment du leader druze. Du reste, cette attitude est symptomatique d'une méthode plus large qui s'est exacerbée chez le tandem CPL-Forces libanaises depuis la présidentielle : véhiculer ne serait-ce que l'image d'une « force » chrétienne autoproclamée, qui veut démontrer son aptitude à faire contrepoids aux autres communautés.

 

(Lire aussi : Derrière les discussions sur le mode de scrutin, les règlements de comptes..., le décryptage de Scarlett Haddad)

 

À peine décrété « l'échec » de la pseudo-tentative aouniste de trouver un compromis électoral, que le bloc du Changement et de la Réforme a jeté la balle dans le camp des autres : « Nous sommes allés à votre rencontre, ne nous repoussez pas », a déclaré le ministre Salim Jreissati, à l'issue de la réunion du bloc mardi dernier. Présent de son côté à la dernière réunion du comité quadripartite, mardi dernier, le député Alain Aoun devait déclarer que son parti reste « ouvert à tout projet de loi fondé sur des critères uniformes », en précisant toutefois que « la part des sièges relevant de Walid Joumblatt lui sera préservée, à l'exception des députés chrétiens ». Hier, le président de la République a durci sa position sur la loi électorale, en plaidant une nouvelle fois pour la proportionnelle – même s'il s'est dit en même temps ouvert à toute autre suggestion.
En plus de se référer une nouvelle fois à la proportionnelle, le chef de l'État maintient son refus de signer le décret de convocation des collèges électoraux, en dépit de l'insistance du ministre de l'Intérieur de le faire approuver dans les délais. C'est comme si Baabda revenait implicitement vers l'alternative : la proportionnelle ou le vide.

Cette alternative, qui avait été formulée explicitement par le chef de l'État il y a deux semaines, avait été interprétée positivement – par les parties soucieuses de ménager Baabda, y compris le courant du Futur – comme une réponse à ceux qui recourent au chantage par le vide pour justifier le maintien de l'ancienne loi de 1960.

 

(Lire aussi : Le tandem chiite pour une loi qui produirait un bloc sunnite favorable au Hezbollah)

 

Cette interprétation a été indirectement désavouée hier par le double niet opposé par le député Walid Joumblatt, et à la proportionnelle et au vide. Une position que M. Joumblatt fonde sur Taëf.
S'il appelle à un retour à Taëf, c'est en référence à un point « précis sur lequel le texte a été très clair : le texte a prévu un redécoupage des mohafazats qui doit être pris en compte dans l'adoption d'une nouvelle loi ». Mais Taëf n'a mentionné « ni de près ni de loin la proportionnelle », insiste-t-il dans une interview téléphonique express accordée à L'Orient-Le Jour. Il rappelle dans ce cadre que « la proportionnelle ne peut s'appliquer dans un pays profondément inégalitaire du fait du confessionnalisme. Ce mode de scrutin requiert nécessairement une abolition du confessionnalisme, d'abord au niveau du régime politique ». Dans ce sens, M. Joumblatt est ouvert à l'idée de créer un Sénat qui libèrerait les législatives du critère communautaire, comme le prévoit la Constitution – une idée véhiculée comme deuxième option par les tenants de la proportionnelle intégrale. « Qu'on forme le Sénat ! Qu'on abolisse le confessionnalisme politique ! Et qu'on adopte aussi le mariage civil facultatif ! », répond-il.

Mais on n'en est pas là. Et la question plus urgente reste de savoir si le débat autour de la loi électorale, qui n'a fait jusque-là qu'attiser des tensions politico-communautaires, n'augure pas d'un « vide » qui pourrait justifier une révision de Taëf.
M. Joumblatt tend à minimiser cette éventualité dans sa déclaration à L'Orient-Le Jour. Il rappelle avant tout que ce n'est pas lui qui a parlé de tensions communautaires, ni lui qui a projeté le vide. « La majorité des composantes du pays sont pour Taëf, à ma connaissance », dit-il. « Mais puisqu'on menace du vide – et je rappelle que ce n'est pas moi qui ai mis les Libanais face aux choix de la proportionnelle, ou du vide – il faut garder en tête que le vide est un grand risque que le pays ne peut se permettre. » « Les amendements de Taëf s'étaient faits dans un encadrement régional et international. Aujourd'hui, qui donc tient encore compte de nous ? », ajoute-t-il.
Précisément, dans un pays laissé à lui-même, ne serait-il pas plus facile d'imposer des solutions radicales ? « Personne au Liban ne peut rien imposer », dit-il, catégorique, en insistant sur le fait que « le Liban est un pays unifié par sa diversité ».

 

(Lire aussi : Samy Gemayel : Nous sommes prêts à collaborer avec le CPL et les FL pour voter une nouvelle loi électorale)

 

Le débat autour de la loi électorale semble se tendre, surtout que les milieux de Baabda jugent inenvisageable pour le chef de l'État un retour à l'ancienne loi de 1960.
Pourtant, un retour à cette loi avec amendements semble l'option la plus réaliste, du moins la seule qui serait pour l'instant acceptée par la Rencontre démocratique, selon une source parlementaire. Aujourd'hui, une délégation de la Rencontre démocratique doit se rendre à Bnechii, et prévoit un entretien, dans la matinée, avec le député Ali Fayad.

Trois autres projets sont sur le tapis : le projet qui avait été élaboré par le cabinet de Nagib Mikati, qui prévoit une proportionnelle intégrale sur treize circonscriptions – avec possibilité d'en réduire la taille pour ménager le camp joumblattiste ; le projet dit de l'habilitation, scrutin mixte, en deux tours, proposé par le président de la Chambre (qui a omis une nouvelle fois hier toute référence à la proportionnelle) ; la proposition de loi mixte (60 % scrutin majoritaire-40 % proportionnelle) qui avait été soumise conjointement par le courant du Futur, les Forces libanaises et le Parti socialiste progressiste. Une proposition à laquelle a renoncé le PSP mais que les deux autres partis continuent de préconiser, avec d'éventuels amendements. Cette option a été au cœur de la visite hier à Meerab d'une délégation Kataëb, composée de l'ancien ministre Alain Hakim, le membre du bureau politique du parti, Albert Costanian, et son ancien secrétaire général, Michel Khoury, en présence du député Antoine Zahra. « Nous avons fait part de nos remarques au chef des FL, Samir Geagea, et au président de la République. Nous appuyons un amendement du projet de loi mixte qui optimise la représentativité au Parlement », a déclaré M. Hakim. La tournée des Kataëb doit se poursuivre : une rencontre est prévue aujourd'hui avec le courant du Futur, suivie d'une visite à Bnechii samedi prochain. Une autre réunion est également prévue avec le chef du CPL, Gebran Bassil, à son retour de Copenhague, selon une source du parti, qui réaffirme, par ailleurs, le refus Kataëb de la 1960, mais aussi de toute formule qui exclurait « les partis réformateurs et les indépendants ».

 

 

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commentaires (3)

Pauvre Liban...avec de tels "irresponsables" politiques tu ne deviendras jamais un pays respectable ! Irène Saïd

Irene Said

14 h 37, le 02 février 2017

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Commentaires (3)

  • Pauvre Liban...avec de tels "irresponsables" politiques tu ne deviendras jamais un pays respectable ! Irène Saïd

    Irene Said

    14 h 37, le 02 février 2017

  • SACRÉ JOUMBLATT, SON RÔLE A TOUJOURS ÉTÉ DE CASSER LES BONNES IDÉES SANS RIEN PROPOSER COMME RECHANGES POSITIVES.

    Gebran Eid

    13 h 04, le 02 février 2017

  • Et pourquoi ne pas laisser chaque communauté conFessionnelle, élire ses "propres!" députés ? Et à l'intégrale proportionnelle. Where is the problem ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    02 h 16, le 02 février 2017

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