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Liban - Décryptage

Les projets de loi électorale du CPL et les amendements qui changent tout

Au sujet des discussions sur le projet de loi électorale, c'est l'alternance du chaud et du froid. Après des échos positifs sur l'approche d'un accord, hier c'était de nouveau le scepticisme le plus total. En principe, une nouvelle réunion de la commission quadripartite (CPL, Futur, Amal, Hezbollah. Autrement dit deux ministres : Gebrane Bassil, Ali Hassan Khalil, un député : Ali Fayad et un conseiller : Nader Hariri) devrait se tenir aujourd'hui pour définir les positions, notamment celle du Hezbollah sur les amendements apportés par le courant du Futur au projet de loi présenté par le CPL. Mais les différents milieux politiques ne semblent pas très optimistes.

De quoi s'agit-il au juste ? Un petit rappel des faits s'impose. Dans un souci d'accélérer et de canaliser les discussions de façon constructive au lieu que le débat aille dans tous les sens, et surtout de parvenir à un accord crédible, le CPL, en la personne de son chef le ministre Gebran Bassil, avait proposé trois projets différents ayant tous pour point de départ une constante : assurer une meilleure représentativité des différentes composantes du pays. Cela passe par deux points : la volonté de corriger l'injustice faite aux chrétiens à travers les différentes lois électorales adoptées depuis 1992 et le souci de trouver un critère unifié pour le découpage des circonscriptions et les modes de scrutin, pour en finir avec les exceptions et les traitements de faveur (ou de défaveur).

Le premier projet était basé sur le principe dit « one man limited vote ». Dans ce projet, les législateurs fixent un paramètre pour l'électeur : par exemple, dans une circonscription comptant dix députés, l'électeur devrait voter pour six. Cette proportion serait respectée dans toutes les circonscriptions et ferait en sorte que les électeurs songeraient d'abord à élire leurs coreligionnaires... Ce projet a été écarté d'emblée.

 

(Lire aussi : Loi électorale : ambiguïtés et faux-semblants)

 

Le deuxième était basé sur une élection à deux tours : dans un premier temps, les électeurs votent dans le caza pour les candidats susceptibles de participer au second tour qui serait, lui, basé sur une grande circonscription comme le mohafazat. Ce serait une sorte de « primaire » par caza sur une base donc confessionnelle avant de passer à l'échelle plus grande et quasiment nationale. Ce projet a été longuement débattu. Mais des divergences sont apparues au sujet des candidatures retenues pour le second tour. Dans un souci de tenir compte des appréhensions du courant du Futur qui souhaite le moins possible de scrutin proportionnel et le plus possible de majoritaire, le CPL avait proposé que les deux candidats qui obtiennent le plus grand nombre de voix soient retenus, alors que le Hezbollah et Amal proposaient que ceux qui obtiennent plus de 10 % des voix soient retenus. Pour le Hezbollah et Amal, le choix des deux premiers candidats était de nature à exclure les autres composantes, notamment chrétiennes, alors que le principe était d'assurer le maximum de représentativité. Le CPL avait répondu à cette objection qu'il est faux d'affirmer que dans les régions chrétiennes les deux premiers seraient forcément les candidats du CPL et des FL, car tout dépendra des circonscriptions (à Bécharré, par exemple, il n'y a pratiquement pas de candidat CPL). De même, le CPL a réaffirmé qu'il s'agit essentiellement de rassurer le Futur et Walid Joumblatt. Mais en dépit des discussions poussées, le Futur a déclaré au cours d'une des réunions qu'il ne voulait plus de ce projet.

 

(Lire aussi : Loi électorale : ce que serait un scrutin conforme à la volonté de Bassil...)

 

Il restait donc la troisième formule, qui est un mélange de scrutin proportionnel et majoritaire. Le principe de base est le suivant : dans les circonscriptions dont plus de 66 % des électeurs appartiennent à une même confession (en considérant que les chrétiens, dans leur diversité, constituent une seule confession), le vote sera majoritaire, et là où ce pourcentage n'est pas atteint, le vote sera proportionnel pour assurer la représentation de toutes les communautés. Par exemple, au Kesrouan, au Metn, à Jbeil etc., le vote sera majoritaire, tout comme au Nord, au Sud, où les sunnites et les chiites constituent plus de 66 % des voix. Cette formule est censée assurer une représentation équitable tout en introduisant le principe de la proportionnelle et en rassurant le courant du Futur et Walid Joumblatt qui craignent de perdre des sièges de leurs communautés respectives si le scrutin proportionnel est adopté dans les circonscriptions où les électeurs sunnites ou druzes sont majoritaires.

Sur les grandes lignes, ce projet a donc séduit et les discussions ont pu avancer. Ce qui a permis à certains de déclarer qu'un accord était non seulement possible, mais rapide. Toutefois, lorsque les débats sont entrés dans les détails, la situation a changé. En effet, le courant du Futur, qui semble se considérer comme le représentant aussi de Walid Joumblatt dans les discussions, a suggéré des modifications importantes, notamment au sujet du découpage des circonscriptions, qui n'obéissent qu'à une seule logique, celle des intérêts de ces deux composantes. Pour Walid bey, l'obsession est ainsi de mettre le Chouf et Aley ensemble, tout en se débarrassant du caza de Baabda (où il y a un grand nombre d'électeurs chiites). Même chose pour le courant du Futur, où il s'agit de rassembler autant que possible les électeurs sunnites dans des circonscriptions inhabituelles pour que le scrutin soit majoritaire. En même temps, le Futur a laissé entendre qu'en considérant les chrétiens comme un bloc unique, on préparerait le terrain à un partage par tiers...

Toute l'idée du CPL d'adopter des critères uniques au niveau du mode de scrutin et du découpage électoral a été ainsi mise à mal. De même, le Hezbollah, qui n'a pas donné son avis sur les amendements proposés par le courant du Futur, peut difficilement les accepter. La réunion quadripartite prévue en principe pour aujourd'hui devrait permettre de faire le point sur la question. Si le courant du Futur insiste sur les modifications et si le Hezbollah les refuse, les trois projets du CPL auront été ainsi rejetés. Or, selon le ministre Bassil, les choix sont désormais limités, puisque au cours des trois dernières années, tous les projets possibles ont été étudiés sans obtenir l'approbation des différentes composantes politiques. Le Liban se trouvera ainsi devant une impasse, puisque le chef de l'État a clairement déclaré qu'il n'acceptera pas l'organisation des élections sur la base de la loi actuelle et encore moins une nouvelle prorogation du mandat du Parlement...

 

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Au sujet des discussions sur le projet de loi électorale, c'est l'alternance du chaud et du froid. Après des échos positifs sur l'approche d'un accord, hier c'était de nouveau le scepticisme le plus total. En principe, une nouvelle réunion de la commission quadripartite (CPL, Futur, Amal, Hezbollah. Autrement dit deux ministres : Gebrane Bassil, Ali Hassan Khalil, un député : Ali Fayad...

commentaires (1)

Que de fois nous avions vu à la TV des documentaires animaliers dans lesquels nous regardions des vautours dans les Pyrénées se disputer autour d'une charogne puante d'un isard. C'est le cas des discussions et palabres byzantines sur le sexe d'un scrutin qui serait le plus avantageux pour nos édiles. C'est à celui qui bouffe le plus des parts de l'autre avec une sauce syro-iranienne.

Un Libanais

12 h 25, le 31 janvier 2017

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Commentaires (1)

  • Que de fois nous avions vu à la TV des documentaires animaliers dans lesquels nous regardions des vautours dans les Pyrénées se disputer autour d'une charogne puante d'un isard. C'est le cas des discussions et palabres byzantines sur le sexe d'un scrutin qui serait le plus avantageux pour nos édiles. C'est à celui qui bouffe le plus des parts de l'autre avec une sauce syro-iranienne.

    Un Libanais

    12 h 25, le 31 janvier 2017

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