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Économie - Liban - Finance

La restructuration globale des dettes privées désormais applicable au Liban

La Banque du Liban a émis récemment une circulaire permettant aux sociétés en difficulté de paiement de voir leur dette restructurée sans passer par une liquidation judiciaire.

Le taux de créances douteuses plafonne à moins de 4 %, contre 24 % en 1993.

L'activité économique continue de montrer des signes d'essoufflement, de plus en plus d'entreprises peuvent se retrouver dans la situation où elles ne sont plus en mesure d'honorer leurs dettes. Or, au Liban, débiteurs et créanciers doivent composer avec une législation vétuste et peu protectrice en matière d'insolvabilité.
Le Liban a ainsi été classé 134e sur 189 pays sur ce point dans le dernier rapport Doing Business de la Banque mondiale (BM), avec un taux de recouvrement des dettes de seulement 32 % contre 72,3 % pour les pays de l'OCDE. Pour y remédier, la Banque centrale (BDL) a émis fin octobre une circulaire (n° 135) introduisant la possibilité d'une restructuration globale des dettes contractées auprès des banques par un agent privé – particulier ou entreprise – se retrouvant dans l'incapacité de rembourser.

 

Améliorer le recouvrement
« Selon la loi de 1943, lorsqu'une société est en incapacité de régler ses dettes commerciales, elle est déclarée en faillite et une action en justice est intentée contre elle devant le tribunal de commerce à Beyrouth. Une procédure de liquidation de la société est mise en place après la déclaration des dettes de l'entreprise par ses créanciers », explique une avocate sous le couvert de l'anonymat.
C'est justement pour éviter ce cas de figure que cette circulaire a été mise en place : « Elle permet un accord extrajudiciaire grâce auquel les compagnies endettées peuvent être redressées si on leur permet de trouver un accord à l'amiable avec leurs créanciers, s'ils considèrent que la société est viable. Le ratio de recouvrement de la dette via une procédure judiciaire est de seulement 20 %, avec de surcroît un lourd préjudice porté à la réputation du chef d'entreprise, alors qu'avec un processus de restructuration, ce ratio est trois fois plus élevé », explique le directeur du département bancaire au sein de la BDL, Najib Anwar Choucair.
« Cette circulaire s'adresse surtout aux sociétés ayant un problème de liquidité, non pas de solvabilité, car la société peut avoir beaucoup d'actifs mais plus assez de liquidité pour payer ses dettes, notamment du fait de la situation politico-sécuritaire, comme dans les secteurs du luxe ou de l'hôtellerie par exemple », poursuit-il.
Car limiter l'endettement du secteur privé reste le cheval de bataille de la BDL, et ce même si le taux de créances douteuses plafonne à moins de 4 %, contre 24 % en 1993 : « Ce taux reste plus qu'acceptable, et est même inférieur à ceux de nombreux pays. Mais le degré de risque de ces créances s'accentue, les dettes restructurées à travers le mécanisme prévu par la circulaire devraient donc être moins risquées », explique M. Choucair.

 

Procédé incitatif
Concrètement, un particulier endetté auprès de plusieurs institutions financières peut désormais obtenir l'approbation des deux tiers des banques – et possédant au moins 60 % de la dette totale – pour renégocier ses prêts non remboursés. Dans ce cas, il sera impossible d'attaquer en justice le client pendant les trois mois des négociations, renouvelables une fois.
La Banque centrale met donc en avant un procédé incitatif : «  Cette circulaire n'a pas l'effet d'une loi, c'est pourquoi elle met l'accent sur le consentement des banques dans le processus de restructuration, car si les deux tiers des banques se mettent d'accord, le tiers restant aura d'autant plus intérêt à donner sa chance au client », avance M. Choucair. « Nous procédions déjà à la restructuration de la dette de nos clients à la banque de détail, mais il s'agissait d'une procédure strictement interne et prêt par prêt. Cette circulaire élargit donc le champ de la restructuration », confirme Antoine Rif, directeur du département de la banque de détail et du risque à la Fransabank.


Dans le cadre de cette restructuration, les banques peuvent aussi accorder de nouveaux prêts à court terme à l'entreprise en difficulté voire réduire le montant de certaines créances. Et, pour pousser les banques à mettre en place de telles procédures, « la Banque centrale pourra financer chaque banque de 50 % du montant prêté au client, ou du nouveau prêt qui lui est accordé lors de la restructuration de sa dette, si ce montant ne dépasse pas les 50 % du prêt initial. Ce sous plusieurs conditions, par exemple que la durée du nouveau prêt ne dépasse pas les 7 ans », explique Antoine Rif.
Reste que plusieurs banquiers ont confié à L'Orient-Le Jour éprouver des difficultés à comprendre certains mécanismes prévus par la circulaire, comme par exemple les modalités d'octroi du financement assuré par la BDL ; ou celles relatives au recouvrement de tout ou partie de la dette à travers l'acquisition des biens mobiliers et immobiliers du débiteur, et notamment le montant des provisions obligatoires à effectuer dans ce cadre. « Nous avons prévu un atelier avec les banques pour traduire cette circulaire en guide pratique détaillé le mois prochain. Il faudra peut-être élaborer une autre circulaire pour expliquer cette circulaire », ironise M. Choucair.

 

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