« Il ne suffit pas que Gebran Bassil s’oppose à Sleiman Frangié. Car l’éventualité de voir le chef du Courant patriotique libre appuyer une figure chrétienne (…) avalisée par le Hezbollah n’est pas à exclure », déclarait le leader des Kataëb, Samy Gemayel, dans une interview accordée à L’Orient-Le Jour en mars dernier. Le député du Metn faisait alors part de ses craintes quant à la possibilité que le chef du CPL fasse volte-face quand bon lui semble. Cinq mois plus tard, ces craintes semblent se justifier. Car après avoir soutenu, avec l'opposition, la candidature de l'ancien ministre Jihad Azour pour la présidentielle, M. Bassil a rouvert les canaux de dialogue avec le Hezbollah, après des mois de froid sur fond de divergences autour du soutien de son allié chiite au chef des Marada, Sleiman Frangié, dans la bataille pour Baabda. Allant encore plus loin, le chef du CPL vient de poser une nouvelle équation : la décentralisation administrative élargie et le fonds fiduciaire en contrepartie du « plus grand sacrifice pour les six prochaines années ». Des propos interprétés comme pavant la voie à un éventuel soutien orange au zaïm de Zghorta. Comment réagira l'opposition si ce scénario venait à se concrétiser ?
Depuis l’annonce de l’accord autour de l’option Jihad Azour entre les opposants (les Forces libanaises, les Kataëb, ainsi que des députés indépendants et d’autres relevant de la contestation), en juin dernier, Gebran Bassil n’a jamais fermé la porte à une relance du dialogue avec le Hezbollah et s’est employé à affirmer le caractère ponctuel de cette convergence. Conscientes de cette équation, les FL ne semblent donc pas surprises de voir le chef du CPL préparer les esprits à un changement de positionnement sur l’échiquier présidentiel. « Nous savions dès le départ que notre convergence avec le CPL se limite au soutien à Jihad Azour », affirme à L’OLJ le porte-parole des FL, Charles Jabbour. « Nous savons aussi que Gebran Bassil n’a fait ce choix que pour protester contre l’appui indéfectible du Hezbollah à Sleiman Frangié », ajoute-t-il. « Ne pouvant pas faire avaler à sa base populaire la pilule d’un probable deal avec le Hezbollah, il brandit des slogans chers aux chrétiens pour justifier un éventuel appui au candidat du Hezbollah », estime M. Jabbour.
Mais on n’en est pas encore là. « Nous sommes en contact permanent avec les aounistes, même après le début de leur dialogue avec le Hezbollah », confie Élias Hankache, député Kataëb, laissant entendre qu’à ce stade rien ne permet de croire que le CPL entend lâcher M. Azour dans un avenir proche.
« Il est impossible de voir Bassil voter pour Frangié »
C’est d’ailleurs ce que les ténors du courant orange ne cessent de répéter. Georges Atallah, député CPL, a assuré, dans une déclaration radiodiffusée dimanche dernier, que « la convergence avec l’opposition (autour de M. Azour) est toujours de mise. Interrogé par L’OLJ, son collègue du Chouf, Ghassan Atallah, se veut plus clair : « Tant que notre dialogue avec le Hezbollah n’a pas porté ses fruits (la décentralisation et le fonds fiduciaire), nous continuerons de voter pour Jihad Azour. C’est-à-dire que si le Parlement se réunit demain, nous glisserons le nom de M. Azour dans l’urne. » « Mais si nous arrivons à un accord avec le Hezbollah, nous voterons pour Sleiman Frangié », affirme-t-il.
Une approche qui ne semble pas convaincre tous les opposants qui estiment que ce sont des calculs à long terme que le leader du CPL est en train d’effectuer. « Il est impossible de voir Gebran Bassil voter pour Sleiman Frangié. Ce qu’il fait aujourd’hui n’est qu’une démarche visant à barrer la voie de Baabda devant le commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun », croit savoir un député relevant de ce camp. Des propos qui interviennent à l’heure où le numéro un de la troupe est perçu comme un sérieux présidentiable. « Nous sommes clairs dans notre rejet de cette option, d’autant que la prochaine phase ne requiert pas une personnalité ayant un background militaire à la tête de l’État. Mais ce n’est pas le but de notre dialogue avec le Hezbollah », rétorque un responsable haut placé au sein du CPL.
Signe que les protagonistes sont encore loin d'un accord, le vice-président de la Chambre, Élias Bou Saab, à remettre sur le tapis sa proposition d'aller vers des législatives anticipées. « Si nous ne parvenons pas, après septembre (date des concertations politiques élargies proposées par l’émissaire spécial de l’Élysée pour le Liban, Jean-Yves Le Drian), à une entente, il faut sérieusement penser à opter pour des législatives anticipées, a déclaré M. Bou Saab mardi depuis Aïn el-Tiné. Parce qu’en tant que députés, il nous est impossible de ne pas élire un chef de l’État. »
Pauvre peuple libanais vivant depuis plusieurs années dans une adoration dévouée pour l‘argent et pour leurs leaders pour la plupart nouveaux riches. Leur trouvant des excuses et des justifications. Recevoir nos chers compatriotes à l’étranger se réduit à leur montrer les malls pour leur shopping et les retrouvailles au Liban se couronnent des surenchères des plus coûteux mariages de l’année. Comment dans cette mentalité pouvoir reconnaître les vraies valeurs chez un politicien honnête, responsable, visionnaire, convaincu et convaincant. Mais en fait il suffit pour lui d’être convaincant pour sa troupe et le combat est gagné
11 h 38, le 06 août 2023