L'enquête sur l'explosion du 4 août 2020 au port de Beyrouth continuait de provoquer des tensions au Liban mercredi. Vingt-quatre heures après une implosion du gouvernement qui aurait été évitée de justesse sur fond de divisions profondes autour de l'enquête, le Conseil des ministres qui était prévu cet après-midi a été reporté à une date ultérieure, faute d'accord. Entre temps, le mouvement Amal et son allié le Hezbollah ont appelé à une manifestation sur le terrain jeudi à 11h devant le palais de Justice pour protester contre le mandat d'arrêt lancé contre le député Ali Hassan Khalil, bras droit du chef du Parlement, Nabih Berry. En face, le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, virulent opposant au Hezbollah, a plaidé en faveur d'un "blocage total et pacifique" dans la rue. Des développements qui font craindre des dérapages sécuritaires dans un pays à la dérive depuis 2019 et qui mettent d'ores et déjà les forces de sécurité "en état d'alerte", selon une source sécuritaire à l'AFP.
Plusieurs responsables politiques, notamment des députés chiites gravitant dans l'orbite du Hezbollah, sont poursuivis par le juge d'instruction Tarek Bitar, dans l'enquête sur l'explosion de centaines de tonnes de nitrate d'ammonium stockés dans le port depuis des années sans mesures de sécurité, un drame qui a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés et détruit des quartiers entiers de la capitale.
Séance reportée
Le dossier, qui s'est invité de facto en Conseil des ministres mardi, a failli causer l'implosion du gouvernement Mikati, à peine un mois après sa formation. Lors de la séance ministérielle, Mohammad Mortada, ministre de la Culture, s'est exprimé au nom de ses collègues chiites pour critiquer l'enquête conduite par le juge Bitar. Il a également appelé le gouvernement à prendre position (comprendre à remplacer le magistrat) et brandi la menace d’une démission des ministres chiites. La séance avait finalement été levée et une nouvelle réunion devait donc se tenir cet après-midi.
Toutefois, dans un bref tweet, le bureau de presse de la présidence de la République a annoncé qu'après "consultations entre le président Michel Aoun et le Premier ministre Nagib Mikati, il a été convenu de reporter le Conseil des ministres qui était prévu cet après-midi" à 16h. Aucune nouvelle date n'a toutefois été fixée. Selon notre correspondante Hoda Chedid, les responsables n'ont pas pu s'entendre autour de ce dossier qui divise la classe politique et ont préféré reporter cette séance afin d'éviter un risque d'implosion du cabinet.
Mardi, le juge Bitar a de nouveau été contraint de suspendre temporairement son enquête après avoir été informé du nouveau recours déposé contre lui par les députés chiites Ali Hassan Khalil et Ghazi Zeaïter, anciens ministres et membres du mouvement Amal, poursuivis dans le cadre de l'enquête.
Manifestation jeudi
Pour protester contre le mandat d'arrêt visant Ali Hassan Khalil, le mouvement Amal du président du Parlement, Nabih Berry, a appelé ses partisans à manifester jeudi à 11h devant le palais de Justice de Beyrouth. "Au vu des retombées de la décision prise par le juge Bitar à l'encontre de Ali Hassan Khalil, une mobilisation aura lieu demain jeudi à 11 heures devant le palais de Justice", peut-on lire dans un texte qui circule sur les réseaux sociaux. Contactée par L'Orient-Le Jour, la numéro deux du bureau des médias du Hezbollah, Rana Sahili, a confirmé que le parti participera "sûrement" à la manifestation de son allié chiite.
Dans une interview accordée mardi soir à la chaîne al-Mayadeen, proche du Hezbollah, Ali Hassan Khalil avait déclaré que "toutes les options sont ouvertes pour une escalade politique ou autre". "Les prochains jours témoigneront d'une mobilisation visant à rectifier le tir de l'enquête, sauver la justice, assurer un climat propice à (la découverte de) la vérité", avait-il lancé.
Appel de Geagea
Réagissant aux pressions du tandem chiite, le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a appelé mercredi "le peuple libanais libre à se tenir prêt à un blocage total et pacifique" dans la rue. Lors de propos accordés à la presse, Samir Geagea a dénoncé un chantage entre l'implosion du gouvernement de Nagib Mikati ou le remplacement du juge Bitar, sous l'impulsion du Hezbollah et de ses alliés.
"Le fait de se plier encore et encore aux chantages qui se poursuivent depuis des années a mené les Libanais à la situation actuelle", a déploré le chef des FL, qui estime que le Hezbollah demande de choisir entre "le déboulonnement du juge Bitar ou l'explosion dans la rue et le pays". "En réaction aux menaces de recourir à d'autres moyens pour faire obstruer le travail du juge Bitar, j'appelle le peuple libanais libre à être prêt à un blocage total et pacifique, au cas où l'autre partie tente d'imposer sa volonté par la force", a appelé M. Geagea. Prié de dire si son appel constitue une menace en réponse à d'autres menaces, Samir Geagea a rejeté ces affirmations. "Il est hors de question de menacer, car ce n'est pas de la sorte que les sociétés progressent. Mais si quelqu'un veut nous imposer par la force une certaine réalité, nous n'accepterons pas cela", a-t-il conclu.
Lundi, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait violemment critiqué le juge Bitar. Le numéro un du parti chiite avait accusé le magistrat de faire du "ciblage politique", allant même jusqu’à le soupçonner "de ne pas vouloir révéler la vérité" sur le drame du 4 août et appelant à son remplacement.
Commentant ces menaces, Ned Price, porte-parole du département d’État américain, a dénoncé les propos du dignitaire chiite et affirmé que les juges libanais ne devaient pas être menacés et intimidés.
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Habbakuk 1: La question a Dieu par l’oppressé Why do you make me look at injustice? Why do you tolerate wrongdoing? Destruction and violence are before me; there is strife, and conflict abounds. Therefore the law is paralyzed, and justice never prevails. The wicked hem in the righteous, so that justice is perverted. ... Habbakuk 2 : La réponse de Dieu a l'oppresseur: ... Now it is your turn! Drink and let your nakedness be exposed! The cup from the Lord’s right hand is coming around to you, and disgrace will cover your glory. The violence you have done to Lebanon will overwhelm you, and your destruction of animals will terrify you. for you have shed human blood; you have destroyed lands and cities and everyone in them. ... Parole du Seigneur. Amen !
Pierre Hadjigeorgiou
09 h 31, le 14 octobre 2021