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Politique - Enquête sur l’explosion du port

Le tandem chiite s’entête dans son acharnement contre Bitar

Le juge d’instruction a de nouveau été provisoirement dessaisi hier du dossier de la double explosion, le temps que la Cour de cassation tranche sur une nouvelle demande en récusation.

Le tandem chiite s’entête dans son acharnement contre Bitar

Ali Hassan Khalil fait désormais l’objet d’un mandat d’arrêt par défaut. Photo an-Nahar

L’enquête sur la double explosion au port de Beyrouth survenue le 4 août 2020, qui tient véritablement de la saga, a connu hier un de ses épisodes les plus mouvementés : en moins de deux heures, le député et ancien ministre mis en cause Ali Hassan Khalil a fait l’objet d’un mandat d’arrêt par défaut, tandis que le juge d’instruction près la Cour de justice, Tarek Bitar, était dessaisi du dossier suite à sa notification d’une nouvelle demande en récusation présentée le matin même par M. Khalil et son confrère Ghazi Zeaïter, devant la Cour de cassation présidée par Naji Eid.

Convoqué hier à 10h du matin, M. Khalil n’avait pas comparu à l’audience. Un de ses avocats, Mohammad Moghrabi, avait tenté de demander au juge Bitar un délai supplémentaire pour lui présenter des exceptions de forme. Le juge a refusé, estimant probablement que l’affaire avait déjà subi assez d’atermoiements, et émis le mandat d’arrêt.

L'édito de Issa GORAIEB

Le glaive et le boomerang

C’est un peu plus tard, avant midi, qu’un huissier de justice a notifié Tarek Bitar de la requête de MM. Khalil et Zeaïter, ce qui a eu pour effet immédiat de le dessaisir d’office. Le bras de fer entre le juge et une partie de la classe politique, qui dure maintenant depuis des semaines, a donc tourné, hier, au désavantage du magistrat, qui doit suspendre ses investigations et interrogatoires jusqu’à ce que la Cour de cassation tranche sur le fond du recours des deux députés. Ce nouveau dessaisissement – le magistrat avait déjà dû suspendre son enquête fin septembre suite à un précédent recours – est d’autant plus critique que le temps presse : Tarek Bitar n’a plus qu’une semaine pour compléter son enquête avec les anciens ministres, aujourd’hui députés, puisque ces derniers pourront de nouveau faire valoir leur immunité avec l’ouverture de la session parlementaire d’automne, mardi prochain.

Aujourd’hui, deux audiences étaient prévues, l’une à 10h, l’autre à 13h, pour entendre respectivement les députés et anciens ministres Nouhad Machnouk et Ghazi Zeaïter. Elles ne pourront avoir lieu que si la Cour de cassation rend, avant 10h pour M. Machnouk, et avant 13h pour M. Zeaiter, un verdict d’incompétence pour statuer sur la demande en dessaisissement.

Pour des juristes interrogés par L’Orient-Le Jour, cette demande est abusive car, selon eux, identique à celle que MM. Khalil et Zeaïter avaient déjà soumise à la chambre civile de la Cour de cassation présidée par Jeannette Hanna, laquelle les avait déboutés lundi pour cause d’incompétence. Une semaine auparavant, c’est la chambre civile de la cour d’appel de Beyrouth, présidée par Nassib Élia, qui leur avait refusé une demande similaire pour le même motif.

Un magistrat ayant requis l’anonymat s’attend à ce que le juge Eid déclare aussi son incompétence, d’autant que ce dernier est, selon lui, réputé pour son honnêteté et son indépendance. Le juge en question se demande toutefois pourquoi M. Eid a procédé à la notification de M. Bitar, alors que la chambre pénale de la Cour de cassation ne l’avait pas fait, ayant jugé d’emblée qu’elle est incompétente.

Acharnement

La détermination du juge d’instruction à utiliser tous les moyens que lui donne la loi pour parvenir à compléter son enquête est égale à l’acharnement des responsables mis en cause – et des partis politiques qui les soutiennent, notamment le Hezbollah – dans leur volonté d’échapper à une reddition des comptes. Un acharnement qui se traduit notamment par toute sorte d’accusations politiques visant à discréditer l’enquête, mais qui, au final, porte un sérieux coup au principe de la séparation des pouvoirs.

Les adversaires de Tarek Bitar sont rudes. Qu’il s’agisse de responsables politiques, sécuritaires ou même judiciaires, ils tentent de manière flagrante d’entraver le travail du juge et de le pousser vers la sortie. En témoigne la violence de la diatribe prononcée, lundi soir, par le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui a accusé le juge « de faire du ciblage politique », allant même jusqu’à le soupçonner « de ne pas vouloir révéler la vérité ». Un appel, en somme, à le destituer.

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Parallèlement, le Conseil supérieur de la défense a, lors de sa réunion hier, jugé qu’« il n’y a pas de motif légal de poursuivre le directeur de la Sûreté de l’État, Tony Saliba », également mis en cause dans l’affaire de l’explosion.

Sur le parvis de Bkerké, le chef du gouvernement Nagib Mikati, accompagné du ministre de la Justice Henri Khoury, avait, pour sa part, mis en doute vendredi la véracité des menaces qu’avait fait parvenir il y a vingt jours Wafic Safa, patron de la sécurité au sein du Hezbollah, au juge d’instruction. Il avait également critiqué le « populisme » du magistrat et insisté sur la nécessité d’« appliquer la loi et la Constitution ». Quant au ministre de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, il avait refusé lundi de donner l’autorisation de poursuivre le directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, au motif que les indices communiqués par le juge Bitar sont les mêmes que ceux parvenus à son prédécesseur Mohammad Fahmi, sur base desquels celui-ci avait rejeté la demande d’autorisation.

Tarek Bitar se trouve en outre confronté à une aile de la justice qui ne joue pas son rôle de défense des victimes, mais qui est accusée par ses détracteurs d’agir comme le représentant de la classe au pouvoir. Le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Khoury, avait ainsi entériné en juillet dernier la décision de l’ancien ministre Fahmi de refuser les poursuites contre Abbas Ibrahim. Ghassan Khoury fait cependant l’objet d’un recours pour suspicion légitime porté devant la Cour de cassation pénale par l’ordre des avocats qui représente une majorité des victimes. Il a récemment été mis en cause par M. Bitar parce que deux mois avant la catastrophe, il avait classé sans suite un rapport faisant état du stockage dans le port de Beyrouth du nitrate d’ammonium à l’origine de la double explosion. L’avocat général près la Cour de cassation, Imad Kabalan, qui s’est substitué à lui dans cette affaire, a pour sa part affirmé qu’il ne poursuivra pas le directeur de la Sûreté de l’État Tony Saliba.

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Comment ce combat féroce engagé contre Tarek Bitar s’achèvera-t-il? Un juriste ayant requis l’anonymat explique la situation comme suit : « Une justice indépendante veut s’affirmer contre une caste politique liguée contre elle. » « La classe politique a d’abord voulu utiliser les voies légales et judiciaires. Mais étant près de les épuiser, elle recourt à la manière forte », constate-t-il. « Elle se trouve coincée par un juge d’instruction tenace, près de rendre son acte d’accusation », poursuit le juriste précité, estimant que « ce dernier est désormais soucieux d’achever son enquête avant qu’il ne soit destitué d’une manière ou d’une autre, et non plus seulement de prendre des mesures judiciaires contre les députés avant que leurs immunités ne soient levées dès l’ouverture de la session ordinaire du Parlement mardi prochain ».

L’enquête sur la double explosion au port de Beyrouth survenue le 4 août 2020, qui tient véritablement de la saga, a connu hier un de ses épisodes les plus mouvementés : en moins de deux heures, le député et ancien ministre mis en cause Ali Hassan Khalil a fait l’objet d’un mandat d’arrêt par défaut, tandis que le juge d’instruction près la Cour de justice, Tarek Bitar,...

commentaires (15)

T'a qu'a voir la face de crapule de ce Ali Khalil pour comprendre... Il est des fois ou une photo vaut mille mots...

Jean-Paul Khayat

19 h 13, le 13 octobre 2021

Tous les commentaires

Commentaires (15)

  • T'a qu'a voir la face de crapule de ce Ali Khalil pour comprendre... Il est des fois ou une photo vaut mille mots...

    Jean-Paul Khayat

    19 h 13, le 13 octobre 2021

  • God have mercy, quelle photo!

    Christine KHALIL

    13 h 42, le 13 octobre 2021

  • Il font mine de ne avoir entendu les protestations de tous les autres bords qui ont comme eux refusé de se présenter et se sont montrés tous solidaires pour détruire ce qui reste de civilisé dans notre pays qui est la justice. Ils n’ont jamais été aussi tranchants dans leur position d’attaquer la justice de leur pays et ils sont nommés premiers ministres, ministres, élus députés et chef de la sûreté générale de notre pays, c’est dire si ça vole bas depuis des décennies avec des représentants traitres , mafieux et maintenant criminels par dessus le marché. Et ils appellent à la dépolitisation et à la justice. De quelle politique ils parlent? De la loi de la jungle où chacun nomme son pantin pour exécuter les basses besognes à sa place et lorsqu’il est poursuivi il monte au créneau pour le défendre afin qu’il puisse achever son travail de sape et de destruction sans être inquiété? De quoi parlent ces gens là si l’on peut les désigner ainsi. Ce sont des brute épaisses sans foi ni loi qui veulent régner par la terreur et les armes un point c est tout or ca n’est pas notre conception d’un état ni d’une patrie.

    Sissi zayyat

    13 h 18, le 13 octobre 2021

  • The two headed-monster will use all means including violence to scuttle the investigation.

    EL KHALIL ABDALLAH

    11 h 47, le 13 octobre 2021

  • Bien sûr que le tandem chiite fera tout pour torpiller l’enquête car le Hezbollah est le principal responsable de l’explosion du 4 août qui a détruit sciemment la partie chrétienne de la capitale. Je suis quand même curieux de connaître la véritable position du président Berry

    Lecteur excédé par la censure

    11 h 23, le 13 octobre 2021

  • Au moins dans le dossier Hariri, ça aura couté de l’argent , mais on aura su qui sont les terroristes / criminels .. certes impunis pour l’instant …

    LeRougeEtLeNoir

    11 h 22, le 13 octobre 2021

  • Le Tandem chiite est la plaie du Liban et le groupe de la terreur qui dirige le pays !

    LeRougeEtLeNoir

    11 h 18, le 13 octobre 2021

  • Le tandem shiite nest pas la pour proteger certainnes personalités politiques seulement. Son objectif cest de garder la culture d imounité. Car si cette culture tombe, ils ont le plus a perdre puisque le tandem shiite, si ils n'obtiennent pas ce quils veulent de facon democratique dans nimporte quel sujet, ils font marcher leur forces de l ombre et TUENT leur probleme. Alors que les autres partis ne peuvent que se la boucler et accepter defaite.

    Tina Zaidan

    10 h 10, le 13 octobre 2021

  • Le dessaisissement du juge BITAR aura l’effet du WHATS’UP de 2019…. L’étincelle qui fait descendre les libanais dans la rue…. Le juge Bitar est le dernier rempart et dernière lueur d’espoir dans cette classe et régime pourris à l’odeur nauséabonde. Le Hezbollah entraîne les chiites vers l’abîme. Le Hezbollah craint que la vérité éclate. Si l’un des accusés potentiels parle? C’est tout un jeu de Domino qui va s’écrouler et faire délier les langues… accusations et contre accusations… Scandales en perspective… au sein de la classe au pouvoir depuis des décennies….d’où le fait que les islamistes chiites à la solde du régime des ayatollahs essaient de camoufler, cacher voire déformer la vérité que le juge Bitar essaie de trouver.

    LE FRANCOPHONE

    09 h 33, le 13 octobre 2021

  • UN INFIME SENTIMENT D,AMOUR PROPRE OU DE DIGNITE ET ON DEMISSIONNE. AILLEURS DANS LES PAYS OU LA DIGNITE PREVAUT ON SE SUICIDE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 40, le 13 octobre 2021

  • Qu'est ce qu'on est gâtés avec le physique de certains membres de la classe politique ! De quoi nous donner confiance et espoir en leurs capacités intellectuelles...!!! - Irène Saïd

    Irene Said

    07 h 54, le 13 octobre 2021

  • "Le tandem chiite s’entête dans son acharnement contre Bitar". En fait, ce n'est pas que lui. On trouve ici, pour une fois réconciliés, les chiites, les sunnites. les chrétiens aounistes et les Marada! Tous unis contre la justice! Et on va prétendre que l'instruction est biaisée, sélective et politisée! Un tel acharnement, une telle unanimité, laissent fortement à penser que tous ces gens ont beaucoup de choses à cacher!

    Yves Prevost

    07 h 12, le 13 octobre 2021

  • ah si seulement toutes ces crapules,aka KELLON vouaient a la justice autant de "volonte" , a faire appliquer ses lois lorsqu'il s'agit des interets de la nation, lorsqu'il s'agit de serieusement combattre la corruption !

    Gaby SIOUFI

    06 h 54, le 13 octobre 2021

  • C'est malheureusement le combat du pot de terre contre le pot de fer. Dans ce pays tenu par une Mafia surpuissante et surarmée, jamais Justice ne sera faite, jamais le Droit ne sera dit. Ce sera toujours la Loi du plus Fort ! Triste destin !

    Georges Airut

    03 h 36, le 13 octobre 2021

  • …Et à la première occasion le Hezbollah menace de démissionner ses ministres, si ce n’est pas une minorité de blocage ça lui ressemble ! Apparemment H.N. n’a convaincu personne. Mieux ! il ne fait plus peur à personne non plus. Il devient la copie conforme de Gébran Bassil, personne ne l’écoute plus, et personne n’en fait cas de ses remarques. Alléluia ! et… le gouvernement continue de bosser comme si de rien n’était, Waouh ! super camouflet envoyé au sieur Nasrallah, qui apprendra à tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de dire n’importe quoi. Si le gouvernement démissionne à cause des Chiites, ils ne pourront plus la ramener en réclamant un gouvernement dont il se sont eux-mêmes exclus très très vite. Plus que cinq mois pour les élections législatives et hop hop hop hop exit le Hezb et tous les vassaux. Restons solidaire du Juge Tarek Bitar, tout en soutenant le gouvernement dans sa démarche face au FMI, et l’organisation des élections, et pour maintenir le juge Bitar à son poste…

    Le Point du Jour.

    00 h 32, le 13 octobre 2021

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