Pour la première fois depuis le tollé suscité dimanche par une virulente campagne menée par des partisans du Hezbollah contre le patriarche maronite Béchara Raï, le chef de la formation chiite Hassan Nasrallah a commenté cette polémique mercredi soir, appelant à "n'insulter personne". Il a toutefois estimé que le fait de discuter des propos du chef de l'Église maronite, qui avait critiqué le Hezbollah, ne constituait pas une insulte à l'égard du prélat.
"Si quelqu'un discute de la neutralité, cela ne veut pas dire qu'il s'en prend au patriarche", a estimé Hassan Nasrallah, dans un discours prononcé à l'occasion des commémorations de Achoura. Selon lui, "il est normal que des personnes discutent de l'appel du patriarche à l'armée libanaise à arrêter les tirs de roquettes et qu'elles se renseignent sur les enjeux de cette proposition". "Il n'y a aucun problème sur ce plan", a-t-il insisté. "Certains parlent de personnalités religieuses. Mais je vous dis non. Toute personne dans ce pays, qu'elle soit d'envergure ou non, ou qu'elle soit une figure religieuse ou politique, et qui prend position ou prononce un discours, ne doit pas être insultée ou faire l'objet d'attaques personnelles", a estimé le chef du parti chiite. "Voilà nos valeurs", s'est défendu Hassan Nasrallah. "Ce genre de comportement ne fait qu'aggraver les hostilités et les rancœurs. Il fait fuir les amis qui se tiennent à vos côtés", a-t-il prévenu, dans une allusion à son allié chrétien, le Courant patriotique libre fondé par le président de la République, Michel Aoun.
Dans son homélie dimanche, le patriarche maronite avait pointé du doigt les dérives résultant de l’affaiblissement de l’État central et de la montée en puissance du Hezbollah, "qui s’est substitué aux autorités constitutionnelles dans la prise de décisions stratégiques qui engagent le sort du pays et des Libanais". Il s’était attelé à déconstruire l’argumentation développée samedi par Hassan Nasrallah, pour tenter de justifier les tirs de roquettes contre Israël. De ce fait, le prélat a surtout recentré le débat sur la décision de guerre et de paix que s’octroie la formation chiite depuis des années. Il a aussi rappelé aux responsables libanais que le Liban est "officiellement engagé par l’accord d’armistice de 1949" avec Israël et, plus encore, que les Libanais ont aujourd’hui d’autres priorités, en rapport avec leur propre survie, que d’entrer en guerre contre l'État hébreu.
Les propos du chef de l’Église maronite sont intervenus après des tirs de roquettes survenus il y a huit jours depuis le Liban contre la partie nord d’Israël. Les autorités n’ont réagi que pour dénoncer les bombardements israéliens qui ont suivi, puis de nouveau les raids aériens israéliens de vendredi alors qu’une nouvelle salve de roquettes tirées à partir du village de Chouaya, dans le caza de Hasbaya, s’abattait sur le plateau occupé du Golan. Les critiques du patriarche Raï contre Hassan Nasrallah n'ont pas plu aux partisans du Hezbollah, qui ont lancé toutes sortes d'accusations à l'encontre du chef de l'Église maronite sur les réseaux sociaux. Mais lundi, le prélat maronite a bénéficié d'une vague de soutien de la part de plusieurs figures et formations politiques, dont le leader druze Walid Joumblatt et le chef du courant du Futur, l'ex-Premier ministre Saad Hariri.
Mardi, 48h après le début de la polémique, le chef de l'État a contacté le patriarche Raï pour condamner la campagne de dénigrement dont il a fait l'objet. Il n'a toutefois à aucun moment mentionné nommément le Hezbollah, ni condamné les tirs de roquettes à l'initiative du parti chiite.
commentaires (15)
On peut critiquer le patriarche, après tout rien d'anormal, mais si le commun des mortels critique notre barbu, à votre avis comment ça se termine ? vous connaissez la réponse ...
Zeidan
20 h 10, le 12 août 2021