Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a abordé vendredi soir, dans un discours télévisé, la crise économique aiguë qui sévit au Liban, assurant que sa formation n'était pas contre une aide de la part d'institutions financières, notamment le Fonds monétaire international, "tant qu'elle est assortie de conditions raisonnables et tant qu'elle ne violait pas la Constitution et n'allait pas à l'encontre des intérêts nationaux". Le leader chiite s'est également longuement exprimé sur la propagation du nouveau coronavirus, dans le monde et au Liban, assurant que son parti n'a pas dissimulé des cas avérés et appelant les Libanais à prendre des "précautions comme en temps de guerre" et l'Etat à déclarer l'état d'urgence "si cela s'avérait nécessaire".
"Nous ne sommes pas contre une aide du FMI"
Alors que sa formation s'opposait il y a quelques semaines à une intervention du FMI au Liban, nuançant toutefois récemment sa position, Hassan Nasrallah a affirmé dans son discours qu'il n'était contre "aucune aide" de la part d'institutions financières telles que le FMI et la Banque mondiale. "Nous n'avons aucun problème que le gouvernement ait recours à des consultations, a-t-il affirmé. Nous n'avons aucun problème si une partie veut aider le Liban sans conditions". "Toute assistance conditionnée, tant qu'elle ne viole pas la loi et la Constitution et ne va pas à l'encontre des intérêts nationaux, nous l'acceptons", a-t-il assuré. Et de demander : "Si quelqu'un nous donne de l'argent en imposant comme condition la naturalisation des Palestiniens, qui accepterait cette aide ?"
Il s'est dans ce contexte dit contre "toute aide nécessitant une augmentation des impôts sur les pauvres ou les personnes à revenus limités". "Nous ne rejetterons aucune assistance liée à un système judiciaire indépendant, tant que ses conditions sont raisonnables et ne sont pas incompatibles avec l'intérêt national, a-t-il encore dit. Nous ne sommes pas contre une aide du FMI ou autres, mais nous refusons d'être sous la tutelle de n'importe quelle partie. Qui accepterait de mettre le Liban sous la tutelle du FMI ?"
Samedi dernier, le Premier ministre Hassane Diab avait annoncé que le Liban ne serait pas en mesure de rembourser 1,2 milliard d'eurobonds -des obligations émises en dollars par l'Etat- qui sont arrivés à échéance le 9 mars . Face à ce premier défaut de paiement de l'histoire du pays, M. Diab a dévoilé une restructuration à venir de la dette, après des négociations avec les créanciers. Avec une dette de 92 milliards de dollars -81,5 milliards d'euros, soit environ 170% du PIB-, le Liban fait partie des pays les plus endettés au monde.
Jusqu’à présent, le Liban n’a pas formulé de demande officielle d’aide à l'institution financière internationale, en dehors de la demande d’assistance technique pour laquelle une délégation du Fonds était venue à Beyrouth fin février. Jeudi, le FMI a exhorté le Liban à mettre "rapidement" en œuvre une série de réformes pour endiguer le marasme économique.
Les déclarations de Hassan Nasrallah interviennent alors que l’Iran en a appelé mercredi à la responsabilité du FMI à qui, de manière très exceptionnelle, Téhéran dit avoir demandé de l’aide face au Covid-19. "Notre Banque centrale a demandé un accès immédiat", à l’instrument de financement rapide (IFR) du FMI, avait déclaré le ministre des Affaires étrangères iranien Mohammad Javad Zarif sur Twitter. Téhéran n’a plus reçu d’aide du FMI depuis un crédit dont l’Iran a bénéficié entre 1960 et 1962, bien avant la fondation de la République islamique en 1979.
(Lire aussi : Les négociations entre État et détenteurs d’eurobonds : comment ça marche)
Le coronavirus, une "bataille mondiale"
Au sujet du coronavirus, le leader chiite a estimé qu'il s'agissait d'une "bataille mondiale". "Tous les pays et peuples du monde doivent mener cette bataille. Nous sommes face à un ennemi que nous devons affronter. Nous ne devons pas abandonner", a déclaré Hassan Nasrallah au début de son discours. Selon un dernier bilan, trois personnes infectées par le coronavirus sont décédées au Liban, qui compte 78 cas avérés de contamination.
"La responsabilité doit être globale. Au Liban, la responsabilité incombe à l'Etat, tous les ministères -non seulement le ministère de la Santé-, la justice, le Parlement, l'armée, les forces de sécurité, les municipalités... tous doivent assumer leurs responsabilités. De même que le peuple libanais, les réfugiés palestiniens, les déplacés syriens et les résidents non libanais, arabes ou pas", a-t-il affirmé. "En attendant que le monde découvre un traitement à ce virus, nous devons limiter sa propagation et réduire le nombre de décès. Les pertes au niveau de l’éducation, l'industrie et l'économie peuvent être compensées plus tard. La priorité est la santé des gens et leur maintien en vie", a ajouté le leader chiite.
Il a dans ce cadre appelé à "l'entraide et la solidarité". "Ce n'est pas le moment pour régler des comptes, se venger ou marquer des points. Nous devons nous comporter de manière positive et responsable, a-t-il dit. Nous devons craindre Dieu dans ce combat. C'est un devoir humain et religieux de préserver notre santé et celle de ceux qui nous entourent".
Hassan Nasrallah a en outre appelé à "la transparence et l'honnêteté". "Toute personne qui se sent contaminée doit le dire en toute honnêteté et s'isoler", a-t-il dit. Il a dans ce cadre affirmé que "le ministère de la Santé a été dès le premier jour transparent. Le premier cas a été annoncé immédiatement", a-t-il assuré. Et d'affirmer dans le même temps que le Hezbollah ne cachait pas de cas de coronavirus. "Tout ce qui a été dit au sujet de la dissimulation de cas de coronavirus de la part du ministère de la Santé ou du Hezbollah est un mensonge", a-t-il affirmé.
"Le plus grand menteur sur terre c'est Trump", a-t-il poursuivi, dénonçant la gestion du président américain de la pandémie. Sur la proposition des Etats-Unis d'aider l'Iran, l'un des pays les plus touchés par le virus, Hassan Nasrallah a lancé : "Tu veux aider l'Iran, lève les sanctions" économiques.
Le chef du Hezbollah a également appelé au "respect total des mesures prises par le gouvernement". "Prenez des précautions comme en temps de guerre", a-t-il lancé, appelant à cesser les rassemblements, notamment en cas de "funérailles d'un martyr". "Nous devons rester chez nous autant que possible et ne sortir qu'en cas de nécessité", a-t-il encore dit assurant que l'on "peut prier à la maison".
Il a également affirmé que son parti était prêt à mettre toutes ses "capacités, son personnel médical et ses institutions à la disposition du gouvernement et du ministère de la Santé pour les aider à combattre le virus". "Il faut donner une priorité absolue à cette bataille, être solidaires, et être vigilants. Le gouvernement libanais doit mettre en tête de ses priorités les besoins du peuple et, s’il juge qu'il est nécessaire de déclarer l’état d’urgence, il devrait en prendre l'initiative", a-t-il poursuivi. "J'appelle les banques libanaises à aider dans cette bataille. Vous êtes les premiers qui devez à tendre la main à l'État, à ses finances et à être solidaires", a-t-il encore dit.
Pour lutter contre la propagation du virus, le gouvernement a pris des mesures drastiques de protection. Mercredi, le Premier ministre Hassane Diab avait annoncé la fermeture de tous les lieux publics pour empêcher les rassemblements. Il a également annoncé l'arrêt de toutes les liaisons aériennes avec les pays foyers de la pandémie, et l'interdiction d'entrée sur le territoire des voyageurs en provenance d'autres pays où le virus se propage. Cependant, les ressortissants libanais, les résidents étrangers au Liban, les membres de la famille d’un(e) ressortissant(e) libanais(e) non détenteurs de la nationalité ou d’un permis de résidence libanais, ainsi que les membres des délégations diplomatiques étrangères travaillant au Liban et ceux de la Finul ont jusqu’au lundi 16 mars compris pour rentrer au Liban.
Plusieurs responsables de l'opposition avaient critiqué la faiblesse des mesures prises par le gouvernement Diab face au coronavirus, notamment sa décision qu'ils estiment tardive d'arrêter les liaisons avec les pays foyers du coronavirus, dont l'Iran.
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en quoi est il compétent pour parles Économie ? A part dépenser l'argent pour faire des guerres sur commande iranienne, que sait il? Rien Et maintenant il donne des conseils de médecin pour faire face au corona.... il ne manque de toupet
14 h 49, le 15 mars 2020