Au-delà du drame occasionné par le coronavirus et la douleur des proches des victimes, il serait frustrant de passer à côté d’une consolation non négligeable : l’épidémie a cloué net le bec des vieux briscards de la politique. La trouille au ventre, ils fuient désormais caméras et micros qu’ils avaient pourtant sniffés et léchés goulûment pendant des décennies. Ne reste plus qu’à les maintenir claquemurés dans leurs clapiers… et leur couper l’internet par la même occasion pour les empêcher d’inonder les réseaux de leur prose inepte.
Fini, les deux ministres qui se visitent à l’heure où les gens normaux travaillent, et papotent « des-problèmes-de-l’heure-à-la-lumière-des-derniers-développements ».
Terminé, le spectacle hebdomadaire d’Istiz Nabeuh tenant salon face à une tripotée de parlementaires suiffeux venus prendre des notes, pendant que Bac –6 leur explique sa théorie sur la création d’emplois fictifs dans l’administration virtuelle d’un État imaginaire, mais aux salaires bien réels.
Oublié, le Basileus qui nous chante les louanges de ses navires-centrales, infoutus en quatre ans d’alléger ne serait-ce que d’un quart d’heure par jour le rationnement de l’électricité. Tout cela, jure-t-il, par la faute de ses rivaux qui ne l’ont pas laissé travailler.
Zappé, le Barbu en chef qui ne pourra plus nous raconter pour la millionième fois qu’Israël et les USA c’est caca, et que grâce à l’alliance avec l’Iran, la planète entière sera bientôt isolée.
Mais les neuneus de la politique à peine neutralisés, voilà qu’au milieu de cette médiocrité assoupie se pointent d’autres ahuris sur les réseaux sociaux. Ceux-là sont le plus souvent anonymes. Forcément, ça donne du courage ! Le plus débile dans cette frénésie, ce n’est pas tant le droit à la parole, que son amplification : la mise en commun de l’imbécillité, le cercle vicieux de la bêtise se justifiant par son propre volume sonore. Vissés sur leur smartphone, les journaleux, débordés et aux abois, participent eux aussi au chaos en relayant des tweets auxquels ils finissent par croire, avant de s’emmêler les pinceaux et mitrailler les démentis. Et allons-y pour les scoops sur le coronavirus ! En quelques heures, ils se sont multipliés encore plus vite que lui…
Comme il fallait s’y attendre, la panique a fini par gagner la population qui dévalise les supermarchés. Des clients en scaphandre de pied en cap, dont le chariot vulgaire surchargé de pâtes, de riz et de sucre relève davantage du secours humanitaire que de l’alimentaire.
Conclusion pratique : les Libanais ont tout lieu d’être optimistes. Si le coronavirus trouve son vaccin, il ne sert à rien de s’inquiéter. Et s’il n’en a pas, alors s’inquiéter ne change strictement rien.
gabynasr@lorientlejour.com
Crever ou ne pas crever this is the question . Gaby merci .
20 h 59, le 13 mars 2020