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Politique - Décryptage

Larijani dans une discussion informelle : Les Américains ont commis une erreur stratégique en tuant Soleimani

Arrivé dimanche soir à Beyrouth, sur une invitation de son homologue libanais Nabih Berry, et venant de Damas, le président du Parlement iranien (Majliss al-Chaoura) Ali Larijani a entamé ses rencontres hier au Liban par un débat élargi avec des hommes de religion, des intellectuels et quelques journalistes libanais, en présence de l’ambassadeur d’Iran et du conseiller culturel de l’ambassade. Il a ensuite rencontré les responsables libanais, réalisant ainsi la première visite au Liban d’un haut responsable étranger après l’entrée en fonctions du gouvernement Diab.

Si les Iraniens refusent de donner à cette visite, à ce timing précis, une portée symbolique au sujet d’un changement dans le positionnement stratégique du Liban, Larijani a malgré tout laissé entendre, au cours de la rencontre informelle avec les intellectuels, que l’Iran est prêt à renforcer sa coopération avec le Liban.

Au cours de cette rencontre qui a duré près d’une heure, l’échange a essentiellement porté sur des problèmes de fond, notamment le dialogue islamo-chrétien et le dialogue intermusulman, pour éviter tous les pièges de la discorde. C’est surtout le père Antoine Daou (membre de la commission épiscopale pour le dialogue islamo-chrétien) qui a insisté sur l’importance de maintenir les ponts du dialogue entre les différentes communautés dans la région pour y assurer la stabilité et préserver la richesse de son tissu social. Les participants à cette rencontre ont aussi axé leurs questions sur l’aide que pourrait apporter l’Iran au Liban, sur les raids israéliens en Syrie et l’absence de riposte iranienne et sur l’importance de tenir compte des appréhensions de certaines parties musulmanes face à une éventuelle hégémonie iranienne sur la région.

Larijani a écouté toutes les questions et les interventions, prenant des notes, puis il a répondu en vrac.

Il a commencé par préciser que si le Liban est petit en superficie, il est grand par l’importance de ses élites. Il est aussi, selon lui, grand à cause de sa résistance contre Israël qui est « une fierté pour tous les pays de la région ».

Le président du Parlement iranien a ensuite fait un rapide survol des dernières décennies pour expliquer comment les différentes stratégies américaines et israéliennes pour affaiblir la République islamique ont échoué.

Selon lui, les Américains ont commencé par imposer une guerre militaire violente via l’Irak, croyant ainsi que la jeune République islamique serait détruite. Il a même rapporté des propos que lui aurait tenus le sultan Qabous d’Oman qui avait dit que Saddam Hussein lui avait demandé d’utiliser Oman pour lancer des attaques contre l’Iran, et voyant l’hésitation du sultan, il lui avait dit : « Ne vous inquiétez pas. Dans peu de temps, l’armée irakienne entrera à Téhéran. » Le sultan avait quand même refusé et les soldats irakiens ne sont jamais entrés à Téhéran.

Selon Larijani, le même processus a été utilisé au Liban avec l’invasion israélienne, destinée à détruire toute velléité de résistance, puis en Afghanistan et en Irak. Cette stratégie forte ayant partout échoué, les Américains et les Israéliens ont choisi d’avoir recours à « la guerre douce », en suscitant une discorde entre les sunnites et les chiites et en envoyant les takfiristes, disant qu’ils représentent l’islam. Il a même repris une phrase de l’ancienne Premier ministre du Pakistan Benazir Bhutto qui avait dit : « Washington et Londres aident les extrémistes militairement et politiquement, l’Arabie saoudite et les Émirats les financent et le Pakistan fournit la base arrière. » Pour lui, les Américains ont donc appuyé les takfiristes pour détruire le tissu social de la région. Mais cette méthode a aussi échoué. C’est pourquoi ils ont choisi maintenant de recourir à la guerre économique. Pour pouvoir faire face à cette nouvelle guerre, il faut toutefois une organisation et une vision.

Selon Larijani, les Américains ont des points faibles : d’abord une partie de leurs supposés partenaires ne sont pas d’accord avec leur vision (comme l’Union européenne). Ensuite, le style de Donald Trump et ses méthodes sont rejetés par la plupart des États. D’ailleurs, en Asie, certains États commencent à réagir contre la volonté américaine d’étouffer leurs économies.

En Iran par exemple, ils ont voulu réduire à zéro les exportations pétrolières. Mais ils ont échoué, les exportations ont été réduites, mais elles existent encore, a-t-il assuré. De plus, l’Iran a mis à profit les décisions américaines pour relancer ses raffineries et fabriquer des produits pétroliers. De même, les sanctions américaines empêchant les Iraniens d’importer des pièces de rechange pour les voitures, ils ont commencé à les fabriquer sur place.

Avec le Liban, l’Iran, a dit Larijani, peut établir une coopération sur le plan pétrolier et dans les industries pétrochimiques. « Nous avons tout un éventail de propositions à faire. Mais il faut que le Liban décide », a-t-il dit.

Interrogé sur le « deal du siècle », Larijani a affirmé que c’est « un véritable scandale et un crime contre les Palestiniens ». Selon lui, certains États régionaux ont cependant accepté ce plan américain, mais ils n’osent pas le dire ouvertement.

Larijani a toutefois insisté sur le fait que l’Iran cherche le dialogue avec les pays de la région. Selon lui, « il n’y a pas de raison d’être éloignés les uns des autres et les divergences ne signifient pas que nous sommes des ennemis ». Il a ajouté que « le ministre iranien des Affaires étrangères a rappelé il y a quelques jours que l’Iran est prêt au dialogue. C’est d’ailleurs sa seule option avec ses voisins ». Mais il a déclaré que « certains États nous attaquent publiquement, tout en cherchant à dialoguer avec nous discrètement ».

Au sujet des bombardements israéliens contre des positions iraniennes en Syrie, Larijani a précisé que les Israéliens amplifient leurs exploits, et assuré que les Iraniens n’ont pas de positions militaires en Syrie.

Enfin, il a évoqué l’assassinat du général Kassem Soleimani en précisant qu’il s’agit d’un personnage historique, d’une grande envergure, et il a affirmé que son assassinat est un acte lâche. « Mais c’est aussi une erreur stratégique, car les Américains vont désormais être contraints à quitter l’Irak, et peut-être la région. »




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commentaires (5)

C,ETAIT UN COUP DE MAITRE.

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 25, le 18 février 2020

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Commentaires (5)

  • C,ETAIT UN COUP DE MAITRE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 25, le 18 février 2020

  • Attention, attention ! L'Iran a des ressources fantastiques et son aide pourrait sortir le Liban de l'impasse , beaucoup plus que celle des Seoudiens et consorts ! Ils ont plein d'éléctricité à nous offrir avec des techniciens de premier plan , , plein de petrole , de gaz , de produits agricoles , d'ingenieurs, cela pourrait vraiment constituer une belle sortie des ténèbres, surtout si les russes et les chinois se mettent de la partie , nous serions sauvés des complots qui nous attendent , fomentés par les americano-sionistes ! ET À TRÈS BAS PRIX !

    Chucri Abboud

    13 h 01, le 18 février 2020

  • Comme ils ont commis une erreur stratégique en éliminant Saddam...

    LeRougeEtLeNoir

    07 h 49, le 18 février 2020

  • C’est la meilleure des choses qu’ont pu faire les usa depuis longtemps.

    Saleh Issal

    01 h 21, le 18 février 2020

  • Au bout du compte les usa finiront par quitter l'Irak c'est sûr, mais aussi le moyen-Orient. Leur politique est dévastatrice pour le monde, leur barbarie démasquée finira par se retourner contre eux et tous ceux qui les auront cautionné.

    FRIK-A-FRAK

    00 h 48, le 18 février 2020

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